François Bayrou |
Pour
ceux qui s’en rappellent, lors de la campagne présidentielle, Le Monde a publié
une interview d’Emmanuel Macron où toutes les questions étaient à charge avec
une agressivité rarement vue de la part de journalistes qui étaient, en
l’espèce, plus des opposants politiques que des professionnels de l’information,
beaucoup de ces derniers s’étant demandé le pourquoi d’une telle hargne.
On
connait dorénavant la volonté de celui qui se voulut un temps et un peu
pompeusement «le journal de référence» d’être un outil de propagande anti-Macron
(il suffit pour le démonter de reprendre l’ensemble de ses Unes à propos du
Président de la république quel que soit le sujet évoqué depuis son accession
au pouvoir), sans que l’on sache très bien pourquoi le quotidien est devenu si
agressif pour un pouvoir politique situé au centre de l’échiquier politique.
La
réponse se trouve sans doute dans le tournant qu’il a pris, bien avant
l’arrivée de Macron à l’Elysée, au temps de la fin du mandat de François
Mitterrand où, noyauté par l’extrême gauche représentée, entre autres, par
messieurs Jean Paul Besset et Edwy Plenel (ce dernier, créateur du site d’extrême-gauche
Mediapart, ayant récemment mené une interview télévisée à charge de Macron en
compagnie de l’ancien journaliste sportif, Jean Jacques Bourdin dont beaucoup
se sont émus pour sa totale partialité) où il s’attaqua systématiquement au
Parti socialiste et à la social démocratie en général (François Hollande peut
témoigner que c’est toujours le cas, lui qui fut une tête de turc du journal
pendant toute la durée de son mandat).
Toujours
est-il que l’interview réalisée il y a deux jours de François Bayrou est de la
même veine avec des questions qui sont à charge pour Macron et dans une volonté
de piéger le président du MoDem en le mettant soi-disant en porte-à-faux avec
ces déclarations passées s’il défendait le Président de la république.
Voici
l’analyse de cette interview:
- Première question orientée: «Pensez-vous que cette affaire
est ‘une tempête dans un verre d'eau’, pour reprendre les mots de M. Macron, ou
qu'elle est au contraire symptomatique d'une dérive du pouvoir?
Réponse ferme de Bayrou: «Il y a une disproportion
surprenante entre les faits tels qu'ils apparaissent au fil des auditions et le
maelström médiatique et politique que nous vivons. (…). Cela n'en fait pas une
affaire d'Etat. (…) Dès lors, quelle est la substance de cette polémique ?»
- Deuxième question où l’interviewer fait une affirmation
que rien ne vient jusqu’à présenté étayer pour faire réagir Bayrou: «M. Benalla
a profité de sa proximité avec le président pour disposer de pouvoirs qui
allaient au-delà de sa fonction, n'est-ce pas la preuve d'un excès du
présidentialisme que vous dénonciez régulièrement par le passé?»
Réponse tout aussi ferme de ce dernier: «Je ne vois pas les
pouvoirs que vous lui prêtez. (…)»
- Troisième question où, manifestement, l’interviewer veut
que Bayrou critique Macron en faisant référence à ce qu’il aurait dit
auparavant: «Lors de vos campagnes, vous avez souvent stigmatisé les avantages
indus des dirigeants. Comprenez-vous les facilités matérielles dont disposait
M. Benalla?»
Réponse de Bayrou qui ne se laisse toujours pas piéger: «Mais
aucun des moyens mis à disposition ne l'était à titre personnel. (…) Il
s'agissait de moyens professionnels qui étaient liés à sa fonction puisqu'ils
ont dans l'instant disparu avec elle.»
- Quatrième question où l’interviewer met un peu plus les
pieds dans le plat en critiquant et en accusant directement Macron: «Vous
évoquez le maelström médiatique mais n'est-ce pas M. Macron le premier fautif?
En dissimulant les faits, en attendant les révélations de la presse pour se
séparer de son collaborateur, n'a-t-il pas alimenté la défiance et le soupçon?»
Réponse de Bayrou qui renvoie la presse à son
(ir)responsabilité dans cette affaire: «La presse révèle ce qu'elle découvre.
C'est une démarche civique. Mais la surenchère dans l'exploitation de ces
révélations n'est plus maîtrisée. Nous sommes entrés dans l'ère du soupçon universel
: n'importe qui, dans n'importe quel domaine de responsabilité, peut être mis
en accusation, sans preuve et sans fondement. Les réseaux sociaux, les
télévisions en continu, les fuites des enquêtes… Tout le monde est entraîné
dans une sarabande de dénonciations. Et tout cela n'est plus régulé par aucune
de nos institutions. C'est un sujet pour tous les démocrates.»
- Cinquième question où l’interviewer tente de revenir par
un autre biais à la responsabilité de Macron comme le montre la sixième
question: «S'il n'y a pas d'abus de pouvoir, selon vous, comment expliquez-vous
alors la genèse de cette crise politique?»
Réponse de Bayrou:
(…) Il y a eu une instrumentalisation politique. Ceux qui
exerçaient le monopole du pouvoir depuis des décennies essayent de déstabiliser
le nouveau président. Pour eux, son élection n'est qu'un accident de
l'histoire. Ils veulent revenir à la situation antérieure et pensent son élection
fortuite. Ils se trompent. L'élection de 2017 a répondu à une attente profonde
du pays qui voulait sortir de l'impuissance généralisée et changer le modèle
français d'exercice du pouvoir au sein de l'Etat. Devant ce changement, il y a
des résistances très fortes.»
- Sixième question qui revient à une attaque directe de
Macron en le comparant à Sarkozy, personnalité que Bayrou déteste: «En 2009,
dans votre livre ‘Abus de pouvoir’, écrit contre Nicolas Sarkozy, vous
affirmiez ‘qu'un peuple comme le nôtre, avec son histoire, avec sa profondeur,
n'a surtout pas besoin de quelqu'un qui se croit un –surhomme’. Quand M. Macron
dit ‘Qu'ils viennent me chercher’, ne se place-t-il pas dans la position du
surhomme ?
Réponse de Bayrou: «C'est une formule que j'ai trouvée
inutilement western. Je pense qu'il voulait dire ‘S'ils veulent s'en prendre à
quelqu'un, qu'ils s'en prennent à moi, je ne me défausserai pas…’ Quand je
parle avec lui, je ne vois pas un homme tenté par l'ivresse de toute-puissance.
Au contraire, il pense sa responsabilité devant l'Histoire en mesurant la difficulté
de la tâche. Avec cette crise, il peut désormais vérifier chaque jour la dureté
des résistances qui lui sont opposées.»
- Septième question où revient en force la critique
continuelle du Monde à propos d’un Macron qui ne serait pas démocrate et plutôt
proche d’un personnage comme Napoléon III: «N'est-il pas tenté par une forme de
césarisme moderne? Son souci permanent est de construire une relation directe
avec les Français en critiquant les contre-pouvoirs comme la presse ou en
diminuant les pouvoirs du Parlement…»
Réponse de Bayrou: «La relation directe avec les Français
est constitutive non seulement de la V° République, mais de toutes les
démocraties modernes.»
- Après une huitième question qui attaque la réforme
constitutionnelle voulue par Macron, la neuvième s’attaque à La république en
marche auquel est alliée dans la majorité présidentielle le MoDem de Bayrou: «Avant
la prise de parole de M. Macron, la majorité a semblé perdue. Est-ce que les
macronistes sont mûrs pour traverser de tels moments?»
Réponse de Bayrou qui manie ici l’esquive: «L'organisation
de la majorité présidentielle n'est pas encore aboutie. Les deux organisations,
La République en marche et le MoDem, partagent beaucoup de convictions, mais
n'ont ni la même tradition, ni le même socle doctrinal, ni la même pratique
politique. Or, elles sont coresponsables de l'avenir, embarquées sur le même
bateau. Il faut bâtir la charpente de ce bateau.»
- Enfin la dixième et dernière question tente une dernière
fois de faire dire à Bayrou ce qu’il a refusé de dire lors des neufs premières:
«A l'aune de son exercice du pouvoir, vous arrive-t-il de regretter votre alliance
avec M. Macron?»
Réponse ferme de Bayrou: «Jamais. (…)»
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