Il a fallu que François Bayrou
propose lors des «universités de rentrée» de son parti, une énième réunion des
centristes pour que les médias s’en emparent alors même qu’il n’y a aucune
discussion en cours à ce sujet et, surtout, que cette proposition est une tarte
à la crème de tous les discours du président du MoDem depuis 2007, depuis le
temps où il ses députés l’ont quitté pour allés fonder le Nouveau centre…
De même, les propos redondants de
Jean-Christophe Lagarde sur l’indépendance de l’UDI datent de son arrivée à la
présidence du parti en 2013 (et il n’a jamais évoqué un retour dans le giron de
Bayrou)…
Rapprocher les deux points de vue
est une sorte d’escroquerie intellectuelle.
Mais, dans l’histoire, Il ne
faudrait pas oublier le troisième larron, Hervé Morin, l’ennemi intime du
président de l’UDI, qui, après avoir répété maintes fois qu’il fallait discuter
avec Bayrou, vient dire le contraire de peur que Lagarde le fasse vraiment
cette fois-ci!
Mais qu’il se rassure, la réunion
des centristes n’est pour l’instant qu’un buzz médiatique.
D’autant que, comme le dit fort
bien (pour une fois) Morin, le parti centriste dominant aujourd’hui c’est La
République en marche.
Donc, si réunion il y a, elle
devrait se faire sous l’égide de cette dernière et dans l’intégration de tous
les centristes à celle-ci.
Mais même si l’UDI et le MoDem se
prenaient l’envie de se fondre dans un même parti, ils auraient un peu plus de
soixante députés contre plus de trois cents du côté de LREM.
Du coup, on ne voit pas très bien
l’intérêt pour chacun des deux partis de brader leur identité et leur
indépendance pour continuer à être des seconds couteaux.
La réalité est évidemment bien
différente pour ceux qui connaissent l’espace centriste.
Depuis que ses lieutenants sont
partis, François Bayrou savait que sa dernière légitimité était d’incarner le
Centre en France.
Peu importe qu’après l’ivresse de
son score à la présidentielle de 2007 il ait déclaré qu’il n’était pas
centriste, il est vite revenu sur cette affirmation en se focalisant sur ce qui
était, selon lui, son patrimoine politique.
Dès lors, il lance à périodes
répétées des appels à l’union de tous les centristes, manière de rappeler qu’il
est le seul légitime à la mener.
C’est ce à quoi nous assistons
aujourd’hui.
Pourquoi, dès lors,
Jean-Christophe Lagarde y répondrait-il favorablement alors même que depuis
quatre ans, c’est la première fois ou presque que Bayrou prononce son nom dans
une interview?!
Plus sérieusement, le président
de l’UDI n’a pas l’intention de devenir le numéro trois, quatre, cinq ou dix de
la galaxie bayrouiste (Marielle de Sarnez étant la numéro deux à vie, Lagarde
comme les anciens UDF ne l’a d’ailleurs jamais oublié…).
Comme le dit Bayrou quand il
accepte de parler de Lagarde, il fut son responsable de la jeunesse!
Non, le patron de l’UDI a de
l’ambition pour lui-même et ses troupes (ou ce qu’il en reste) en formant un
grand parti de centre-droit avec les membres les plus modérés de LR,
c’est-à-dire une grande partie des juppéistes mais aussi les derniers centristes
encore englués dans ce qui fut d’abord l’UMP.
Pour cela, il ne ménage pas ses
efforts et il attend avec impatience que le très droitiste radical Laurent
Wauquiez soit élu à la tête du parti de droite.
Or donc, ce n’est pas en
partenaires que Bayrou et Lagarde se voient mais en concurrents.
Il s’agit pour chacun d’eux de
devenir l’élément principal du «vieux» Centre en espérant dans le même temps,
comme ils le disent, de récupérer un certain nombre de centristes – vieux et
nouveaux – déçus par Emmanuel Macron et LREM.
A ce propos et pour bien comprendre
que le rapprochement MoDem-UDI est plus un fantasme ou une chimère, les membres
de cette dernière quand la direction de la confédération s’est ralliée sans
condition à François Fillon et même avant dès la candidature de Macron à la
présidentielle, ne l’ont pas quittée pour rejoindre le MoDem mais En marche.
Mais, in fine, tout ce que l’on
vient de dire est balayé par l’argument massue qui démontre l’inanité des
discours sur une réunion des centristes de feue l’UDF.
François Bayrou affirme partout
qu’il est un partenaire fidèle et même un coresponsable de la majorité
présidentielle et qu’il soutiendra sans faille Emmanuel Macron.
Jean-Christophe Lagarde, lui,
affirme qu’il est dans l’opposition au pouvoir en place même s’il se veut
constructif.
Ce serait donc la première fois
qu’un nouveau parti se fonderait – puisqu’il est question de cela – avec une
partie dans la majorité et l’autre dans l’opposition…
Les responsables centristes ont
souvent pas peur du ridicule, mais là ce serait vraiment au-delà de toute
espérance en la matière.
Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC
Jean-Louis Pommery
Directeur des études du CREC