Par Jean-François Borrou
Dans cette rubrique, nous publions les
points de vue de personnalités centristes qui ne reflètent pas nécessairement
ceux du CREC. Ces points de vue ont pour but d’ouvrir le débat et de faire
progresser la pensée centriste.
Jean-François Borrou est le pseudonyme
d’un journaliste proche des idées centristes.
Emmanuel Macron |
Les journalistes ont une mission:
informer les citoyens tout en respectant une déontologie qui est contenue, en
France, dans une «Charte du journaliste».
Donc, avant d’être de tel ou tel
bord, on leur demande de délivrer des faits.
Ensuite, libre à des
éditorialistes et autres commentateurs de donner le sens qu’ils veulent à ces
faits.
Evidemment, aucun média dans le
monde ne respecte cette séparation qui est pourtant essentielle afin d’informer
correctement le citoyen pour qu’il se forme sa propre opinion avec les faits
«bruts» pour qu’il sache ce qui se passe puis en consultant les opinions de personnes
diverses et variées afin qu’il se forme sa propre conviction qu’il traduit ensuite
dans son engagement politique (celui-ci pouvant résulter uniquement par un
bulletin glissé dans l’urne).
La problématique en France est
qu’actuellement à propos du pouvoir en place nous avons, dans les médias, des
faits déjà sur-interprétés et sur-commentés dans la phase de la transmission
d’une information la plus «objective» possible et que lors de celle-ci ainsi
que dans la phase du commentaire, il n’y a qu’un point de vue à charge.
L’hostilité unanime des médias envers
Emmanuel Macron, son gouvernement et sa majorité – je vous incite à regarder l’ensemble
des titres des articles qui leur sont consacrés – vient de plusieurs facteurs.
Le premier et le principal est le
positionnement politique du nouveau président de la république.
Il est largement centriste.
Or il n’existe aujourd’hui aucun
média qui se revendique comme tel.
Certains sont de droite, d’autres
de gauche, ce qui permet, lorsqu’un de ces camps l’emporte d’avoir une presse
de soutien au pouvoir en place (même si elle peut être critique) et une presse
d’opposition (même si elle peut refuser d’être dans la critique systématique).
Pour Macron, rien de tel ce qui
aboutit à un flot d’information traité quasiment toujours à charge, donnant au
début de son quinquennat une atmosphère particulièrement lourde.
On évitera de rappeler aux journalistes,
dont je suis, qu’Emmanuel Macron et sa majorité législative ont été élus
démocratiquement et qu’ils méritent un traitement normal et non celui d’un groupe
factieux qui aurait usurpé son pouvoir.
De même, on les mettra en garde
contre un effet éminemment pervers de leur attitude.
Délégitimer à ce point un pouvoir
démocratique, de plus, qui vient d’être élu, est un mauvais service rendu, non
pas à celui-ci mais, plus grave, à la démocratie représentative.
Tout comme l’ont été en leur temps
les outrances des critiques envers Nicolas Sarkozy et François Hollande d’ailleurs.
L’emballement médiatique de la
critique à charge du politique fait peut-être de bons taux d’audience et un
certain hubris chez les journalistes.
Cependant, le débat politique
dans une démocratie, mené au nom de la liberté d’opinion et de parole, doit toujours
rechercher cette modération et ce respect car l’architecture du régime démocratique
les demande pour fonctionner au mieux, surtout, pour ne pas être à la merci de
tous les extrêmes qui, évidemment, se frayent un chemin dans l’attaque systématique
et le déversement d’un flot de commentaires à la fois malveillants et irresponsables.
Ainsi, c’est bien le consensus
autour de la démocratie et de ses règles qui permettent à ces dernières de
fonctionner.
Or, dans ces postures et ces
attaques, c’est bien ce consensus qui est écorné de plus en plus.
Espérons que cela ne conduira pas
à une catastrophe.
Jean-François Borrou