Selon un sondage de l’institut
Gallup, 45% des Américains se disent «independents» tandis que 28% se disent
démocrates et 25% républicains.
S’agit-il de dire que 45% des
sondés se réclament du Centre alors que 28% seraient de gauche et 25% de
droite?
C’est en tout cas ce que croient
les initiateurs du Centrist project dont le but est de présenter partout des
candidats «independents» pour casser l’emprise des deux grands partis sur la
vie politique des Etats-Unis.
Néanmoins, ce résultat est
nettement moins tranché que ce qu’ils affirment.
D’abord sur la qualification d’«independent».
Celle-ci qualifie ceux qui ne se
reconnaissent dans aucun des partis dominants, le Parti républicain et le Parti
démocrate qui rythment la vie politique américaine depuis les années 1850
(auparavant il s’agissait du Parti whig face aux démocrates).
Pour autant, d’une part, les «independents»
peuvent être plus à gauche que les démocrates et plus à droite que les
républicains.
Il ne s’agit nullement d’une
catégorie homogène de modérés, même s’il y en a beaucoup dans cette catégorie,
mais avant tout d’une dénomination de ceux qui ne veulent pas être associés aux
républicains et aux démocrates pour des raisons diverses et variées.
D’autre part, il y a, chez ceux
qui se disent démocrates (surtout) ou républicains (un peu), des réels
centristes puisque, rappelons-le, les deux grands partis couvrent chacun tout
le spectre d’un des deux côtés de l’échiquier politique allant des extrêmes aux
modérés.
Il y a donc beaucoup d’électeurs
centristes au Parti démocrate (plutôt de centre-gauche) et au Parti républicain
(plutôt de centre-droit).
Ainsi, il convient de ne pas
oublier que les deux derniers présidents démocrates, Bill Clinton et Barack
Obama, étaient de vrais centristes, tout comme l’était la dernière candidate du
Parti démocrate, Hillary Clinton.
D’ailleurs, actuellement, le
Parti démocrate demeure une formation de centre-gauche avec un courant social-démocrate
minoritaire alors que le Parti républicain est devenu un parti de droite radicale
n’ayant plus en son sein qu’une poignée de personnalités de centre-droit.
Le problème avec toutes les
initiatives «centristes» comme le Centrist project, c’est qu’elles renvoient
les démocrates et les républicains dos à dos alors même que les premiers sont
beaucoup plus proches du Centre que les seconds.
Dès lors, leurs initiatives
penchent le plus souvent à droite et non plus au centre de l’échiquier
politique.
Quant à savoir si les Américains
sont prêts à se passer des deux grands partis, la réponse n’est pas aussi
simple qu’un autre pourcentage révélé par le sondage Gallup le laisserait
croire où 57% d’entre eux affirment qu’il faut une alternative à ceux-ci au pouvoir.
Car, aujourd’hui, seuls deux
sénateurs se revendiquent «independents», dont le socialiste Bernie Sanders et
aucun représentant.
Même si ce constat doit être
tempéré par le fait que les candidatures «independents» sont nettement plus
rares lors d’un scrutin et ont souvent plus de mal à avoir une exposition
médiatique suffisante, les électeurs ont plus tendance à voter pour les
candidats des deux grands partis et donc à leur faire confiance au moment du
vote et à avoir une bonne opinion d’eux.
Ainsi, il y a une grande
différence entre les candidats démocrates et républicains qui, au niveau local de
leurs circonscriptions, sont généralement appréciés de leurs électeurs – ce qui
permet à une large majorité d’entre eux d’être facilement réélus – et la défiance
exprimée au niveau national pour les deux formations qu’ils représentent…
Reste que des organisations comme
le Centrist project ont raison de pointer du doigt la paralysie actuelle du
système où les deux partis se neutralisent au lieu de trouver des consensus pour
gouverner ce qui était jusqu’à la fin du XX° siècle une pratique courante aux
Etats-Unis.
Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC