Comme nous l’avons dit à de multiples reprises, Emmanuel
Macron s’il ne se présente pas comme centriste en est quasiment un et que le
macronisme est un centrisme.
Et que même s’il l’on veut discuter ces termes, il est d’une
évidence flagrante que Macron, son projet et son programme sont
centro-compatibles.
Dès lors, poser la question de savoir si la victoire à la
présidentielle d’Emmanuel Macron est une victoire qui profite aux partis
centristes semble paradoxale.
En réalité, elle ne l’est pas autant que cela.
D’abord parce que les centristes sont divisés entre ceux qui
soutiennent le nouveau président de la république et ceux qui le combattent.
Ainsi, on trouve dans la nouvelle majorité présidentielle,
le Mouvement démocrate et l’Alliance centriste (ex-membre de la confédération
UDI) de même qu’un certain nombre de centristes qui viennent en partie de
l’UDI, en partie de LR et en partie du PRG, en partie de la mouvance
écologiste, en partie du PS, sans oublier des centristes indépendants.
A l’opposé, on trouve dans les adversaires de cette
majorité, l’UDI ainsi que la majorité des centristes encore à LR et des
centristes présents dans le PS et au PRG.
Ensuite, parce qu’Emmanuel Macron n’était pas le candidat
des partis centristes mais d’un mouvement, En marche! qui, même s’il est
largement centriste ne se présente pas comme tel et ne se confond pas avec les
formations qui se situent déjà au centre.
Mais puisque l’évidence, à laquelle les médias se sont
ralliés, est que la victoire de Macron est une victoire centriste alors il est
intéressant de voir si les partis qui sont situés au centre de l’échiquier
politique peuvent directement (MoDem et Alliance centriste) ou par ricochet
(UDI), en profiter.
Voyons ce qu’il en est.
- Cotes de popularité
des partis centristes:
Deux sondages qui viennent d’être publiés nous disent que les
Français demeurent assez circonspects à propos des partis centristes.
Selon celui de l’institut BVA pour Orange et La Tribune, le
MoDem et l’UDI, sont bien placés puisque le premier nommé est en seconde
position et de le deuxième se retrouve en quatrième position.
Mais si le Mouvement démocrate obtient 38% de bonnes
opinions, il y a tout de même 59% des Français qui ont une mauvaise opinion de
la formation de François Bayrou.
Concernant l’UDI, si 34% des Français ont une bonne opinion
de la confédération centriste, ils sont 63% à en avoir une mauvaise.
Quant à celui de Kantar-Sofres pour Le Figaro magazine, il
indique des gains pour le MoDem et l’UDI mais pas de réel changement d’opinion
des Français.
Ainsi, alors que le Mouvement démocrate était en deuxième
position pour BVA, pour Kantar-Sofres, il n’est qu’en quatrième position avec
30% de bonnes opinions contre 48% de mauvaises opinions (22% de «sans opinion»).
Et l’UDI n’est plus en quatrième position mais en septième
avec seulement 20% de bonnes opinions comme le FN et Debout la France et 46% de
mauvaises opinions (34% de «sans opinion»).
A noter que La République en marche est en première position
pour BVA et Kantar-Sofres et est la seule formation a recueillir plus de bonnes
opinions de que mauvaises dans les deux sondages.
- Cotes de popularité
des leaders des partis centristes:
Si la cote de popularité des partis centristes n’est que peu
impactée par la victoire d’Emmanuel Macron, il semble, en revanche, que celle
des leaders de ces partis en bénéficient nettement plus.
Ainsi, dans le baromètre Kantar-Sofres, François Bayrou
gagne 9 points et se retrouve en 3° position (à 35%), Hervé Morin et
Jean-Christophe Lagarde gagnent 3 points et se retrouvent 32° et 39° positions
(à 11% et 8%).
Cependant, il faut minimiser cette embellie car si l’on
prend les nouveaux sondés centristes, Sylvie Goulard et Marielle de Sarnez,
elles ne se classent que respectivement 32° et 36° (à 11% et 10%) alors que
Nicolas Hulot entre directement à la première place à 62%!
- Potentiels
électoraux des partis centristes:
Le sondage Ispos pour le Cevipof (centre d’étude de la vie
politique de Sciences Po Paris) et Le Monde indique un potentiel électoral pour
les différents partis calculés sur la probabilité de pouvoir voter pour un de
leurs candidats.
Concernant les partis centristes, le MoDem se place en
septième position (avec 12% de sondés qui pourraient voter pour un de ses
candidats) et l’UDI en neuvième et avant-dernière position devant le PC (avec
9% de sondés qui pourraient voter pour un de ses candidats).
C’est le potentiel de La République en marche qui est le plus
haut (32%), seule formation qui est en-dessous de 50% dans la catégorie «par
probable» (37%) alors que le MoDem y obtient 55% et l’UDI 61%.
Bien sûr, il faut relativiser ce potentiel pour ces
législatives puisque les partis centristes se présentent dans des coalitions où
l’autodiscipline des électeurs veut qu’ils votent pour le candidat de cette
coalition même s’il n’est pas de leur parti préféré.
Reste que les chiffres des partis centristes montrent le peu
d’appétence des Français pour leurs candidats.
- Nombre d’élus dans
la prochaine Assemblée nationale
Si le Mouvement démocrate devrait avoir sans difficulté plus
de députés dans la prochaine assemblée que dans la précédente où elle en avait
à la fin de la mandature zéro (!), il est assez difficile de faire des
projections.
Selon certains analystes, et le MoDem, et l’UDI devraient
pouvoir former un groupe parlementaire à l’Assemblée nationale (15 députés) ce
qui ne sera pas le cas pour l’Alliance centriste qui devrait avoir qu’entre un
et cinq députés.
Mais il se pourrait que les grands espoirs des partis
centristes soient déçus.
Ce sera certainement le cas de l’UDI qui pensait, lors de
son alliance avec LR, pouvoir faire élire une quarantaine de députés et qui
devra sans doute se contenter d’une vingtaine.
Mais cela pourrait aussi être le cas du Mouvement démocrate
qui se voyait déjà pourvu d’une trentaine de députés et qui pourrait n’en avoir
qu’autour de vingt, voire moins.
Pour conclure, on peut estimer que la victoire d’Emmanuel
Macron a eu un petit effet sur les partis centristes (on n’inclut évidemment
pas ici la présence des cinq ministres centristes dans le gouvernement dirigé
par Edouard Philippe) mais qu’il s’agit avant tout de la victoire d’un homme et
de son mouvement, En marche!
On pourrait à cet effet dire que c’est sans doute la
victoire d’un «nouveau» Centre que Macron et La République en marche incarnent
ce qui, par contrecoup, ne donne que peu de gains à l’«ancien» Centre.
Mais ces observations devront être complétées dans les
semaines qui viennent au vu des résultats des élections législatives et des
sondages sur les cotes de popularité.
Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC
Jean-Louis Pommery
Directeur des études du CREC
(Sondage BVA réalisé les 22 et 23 mai 2017 par internet
auprès d’un échantillon de 1011 personnes âgées de plus de 18 ans et
représentatives de la population française / méthode des quotas / marge
d’erreur de 3 points // Sondage Ipsos réalisé du 27 au 30 mai 2017 par internet
auprès d’un échantillon de 14958 personnes âgées de plus de 18 ans et
représentatives de la population française / méthode des quotas / marge
d’erreur de 3 points // Sondage Kantar-Sofres réalisé du 24 au 29 mai 2017 par
internet auprès d’un échantillon de 1000 personnes âgées de plus de 18 ans et
représentatives de la population française / méthode des quotas / marge
d’erreur de 3 points)