L’année 2017 a été particulièrement riche pour les
centristes qui ont connu sinon un véritable miracle tout au moins un formidable
renouveau si l’on reprend leur situation voici juste un an.
Souvenons-nous.
A cette époque, en décembre 2016, Emmanuel Macron,
social-libéral progressiste proche du Centre (c’était son image alors) mais
revendiquant son passé de gauche, était en troisième position dans les sondages
pour la présidentielle derrière Alain Juppé et Marine Le Pen mais devant un
François Bayrou qui ne décollait pas et face à une UDI qui avait fait la choix
de ne pas en faire avec la majorité de ses membres qui soutenait Juppé, le
maire de Bordeaux semblant être l’évident prochain président de la république, un
homme de droite assumé, certes, néanmoins centro-compatible sur moult sujets,
ce qui pouvait consoler les centristes de leur faiblesse.
L’après-présidentielle et législatives s’annonçait morose
avec quelques députés En marche! (et encore, si Macron ne faisait pas un flop)
voire quelques MoDem et un groupe un peu renforcé à l’UDI.
Rien de très extraordinaire pour les centristes et leurs
partis.
Et puis tout s’est emballé.
Juppé s’est effondré lors de la primaire LR et c’est
François Fillon qui l’a emporté grâce à sa radicalisation à droite toute.
Mais alors qu’il était en tête des sondages, il s’est
retrouvé dans une affaire d’emplois fictifs envers sa famille et de cadeaux
somptueux reçus, démontrant son évidente cupidité aux yeux de ses électeurs
(pas de ses proches qui connaissaient de longue date son goût pour le luxe).
Macron a, en contrepartie de la chute de Fillon, commencé à
monter inexorablement dans les sondages et a été rejoint dans son combat «ni
droite, ni gauche» et «et de droite, et de gauche» par François Bayrou.
Celui venait enfin de comprendre qu’il n’avait aucune chance
d’emporter la présidentielle malgré un moment centriste qui devenait évident et
qu’il pourrait être, en s’obstinant dans une démarche de critiques virulentes
envers Macron, celui qui empêcherait un centro-compatible voire un centristes
tout court d’accéder à l’Elysée par simple jalousie et contrariété pour son
ambition strictement personnelle.
De quoi détruire définitivement sa carrière politique.
Si l’on exagère souvent «l’effet Bayrou» sur la candidature
d’Emmanuel Macron en termes d’intentions de vote dans les sondages, celui-ci
exista néanmoins et fut certainement un boost dans les rangs du Centre et de la
droite modérée en termes d’image pour le candidat d’En marche!.
Le reste est de l’Histoire puisque Macron dépassa Le Pen et
Fillon, s’installa en tête des sondages pour ne plus la quitter et, in fine,
gagna la présidentielle et les législatives sur un programme très centriste.
► Macron à l’Elysée
C’est évidemment l’événement principal de l’année 2017 pour
le Centre en France.
L’installation d’un centriste à l’Elysée est réellement une
première sous la V° République car, malgré les dires de certains médias,
Emmanuel Macron n’est pas sur la même ligne politique qu’un Valéry Giscard
d’Estaing en 1974, ni même un clone de ce dernier.
Car si Giscard était un centro-compatible et qu’il a réuni
la quasi-totalité des centristes derrière lui dans l’UDF, on doit néanmoins préciser,
et son parcours après sa défaite à la présidentielle de 1981 face à François
Mitterrand le démontre sans consteste, qu’il était avant tout un homme de la
droite libérale.
Ses volontés de réforme et de gouverner au centre en voulant
rassembler deux Français sur trois, faisait de lui certainement un homme proche
sur nombre de points du Centre mais qui jamais n’a partagé les valeurs
centristes.
Toujours est-il que, pour en revenir à Emmanuel Macron, sa
défense de la démocratie républicaine, son progressisme, sa vision d’un juste
équilibre, sont des points essentiels du Centrisme.
Cela en fait, incontestablement Le Centriste de l’année 2017
(voir
l’article ici).
Libre à lui de ne pas se définir comme centriste et de
vouloir se situer ailleurs mais l’analyse et l’étude de ses dires et, surtout,
de ses actes permettent, en dehors de toute volonté de récupération ou de biais
partisan, d’affirmer son appartenance à ce Centrisme moderne du XXI° siècle tel
un Barack Obama pendant les huit ans de sa présidence aux Etats-Unis.
Lire aussi:
► L’axe central, une réalité
Une des nouvelles les plus importantes de l’année est la
traduction dans la réalité de l’axe central qui n’était alors qu’une promesse d’un
futur plus ou moins proche.
Rappelons que l’axe central s’est formé naturellement en
réponse à la montée des extrémismes de droite et de gauche ainsi que des
populismes démagogiques dans les pays démocratiques ainsi que par les menaces
extérieures avec la présence d’autocrates voire de dictateurs dans de nombreux
pays dont la Russie et la Chine.
Cet axe central réunit tous les défenseurs d’une démocratie
républicaine libérale (et pro-Union européenne en Europe) qui sont des
humanistes progressistes et réformistes, c’est-à-dire regroupant dans un espace
central, souvent majoritaire, les courants de droite et de gauche libérales et
réformistes ainsi que le Centre.
En France, ce courant était composé début 2017 de la droite
libérale de LR, de la gauche social-libérale et réformiste du PS, de toutes les
formations du Centre (UDI, MoDem, Alliance centriste, PRG, etc.) ainsi que de
certains mouvements écologiques.
Au niveau des personnalités, on pouvait y inclure, entre
autres, Emmanuel Macron, Alain Juppé, François Bayrou, Jean-Louis Borloo,
Manuel Valls, Jean-Christophe Lagarde, François de Rugy.
Si, en cette fin de 2017, tous ces courants travaillent plus
ou moins ensemble, tous ces gens ne sont pas forcément alliés (encore qu’il ne
manque que Juppé pour que cela soit le cas et que le premier ministre de Macon,
Edouard Philippe est un juppéiste).
Mais, comme la proposition d’Alain Juppé de créer pour les
prochaines élections européennes un mouvement central en est la preuve
éclatante, l’axe central existe dans les faits.
Et il est autant une conséquence qu’une cause de la
recomposition politique qui est en cours et que, contrairement à ce que l’on
dit, l’élection d’Emmanuel Macron en a été plus le révélateur que l’origine
unique.
Reste que tout le talent et le génie d’un Macron a été de
faire vivre concrètement cet axe central et d’emballer l’Histoire.
Lire aussi:
► LREM majoritaire à l’Assemblée
nationale
La première prouesse d’Emmanuel Macron fut de se faire élire
à l’Elysée.
La deuxième fut de permettre à son mouvement politique, En
marche! devenu La république en marche (LREM), de gagner, non seulement, les
élections législatives mais d’avoir la majorité absolue à l’Assemblée nationale
avec plus de 310 députés dont la plupart étaient des inconnus et n’avaient
aucune expérience politique.
D’un certain côté, la victoire de LREM est encore plus
étonnante que celle de Macron.
Sauf à dire, comme le prétendait François Bayrou pendant des
années lorsqu’on lui demandait avec qui il gouvernerait s’il remportait la
présidentielle – vu que le MoDem n’avait même pas un nombre de députés égal à
ceux des doigts d’une main – que la dynamique créée par une telle victoire lui
donnerait une majorité à l’Assemblée nationale, les électeurs ne pouvant
choisir un président sans lui donner ensuite les moyens de gouverner.
Cette thèse dont beaucoup se sont moqués s’est avérée, en
l’espèce, vraie…
Evidemment, LREM n’est pas que centriste mais est
essentiellement centriste.
Et les votes à l’Assemblée nationale sont là pour le prouver
ainsi que ses prises de position politiques.
Lire aussi:
► MoDem, la résurrection
Personne n’aurait parié un kopeck sur un François Bayrou,
garde des Sceaux et ministre d’Etat, numéro trois du gouvernement, et d’un
groupe MoDem à l’Assemblée nationale avec plus de quarante députés.
Cela semblait plus improbable encore que de gagner au loto!
Et bien, tout autant les circonstances que l’intelligence de
Bayrou ont permis que ce miracle – et c’en est un! – se produise.
Comme nous l’avons vu plus haut, le ralliement du président
du MoDem au candidat d’En marche! que le premier nommé baptisa «alliance», le
permit.
Quel que soit les raisons pour lesquelles ces deux hommes
ont choisi de faire un accord politique (car celui-ci a bien existé, il suffit
de voir comment le Mouvement démocrate fut bien traité pour les législatives),
celui-ci a sans doute donné un surcroît de crédibilité à Macron et à Bayrou un
poids politique qu’il n’avait jamais eu auparavant – même après ses 18,57% à la
présidentielle de 2007.
S’il est trop tôt pour savoir quel sera l’avenir de Bayrou
et du MoDem, 2017 restera comme une année refondatrice pour l’homme et son
parti.
Lire aussi:
► L’UDI en bout de course
Quoi qu’en dise Jean-Christophe Lagarde, l’UDI, c’est fini.
Car l’idée même de créer une confédération de centre-droit
et de droite libérale sur le modèle de l’UDF de 1978, portée par Jean-Louis
Borloo en 2012, est morte et enterrée.
Aujourd’hui, si l’UDI existe encore de nom après les départs
de l’Alliance centriste, du Parti radical et de Les centristes d’Hervé Morin,
ce n’est plus une confédération mais seulement l’autre nom de la FED (Force
européenne démocrate), le parti fondé par Lagarde en 2012.
Surtout, l’UDI aura été un échec complet si l’on se rappelle
quels étaient ses buts: s’affranchir de l’UMP (puis de LR), réunir tous les
centristes et tous les droitistes libéraux pour en faire, à terme, une
formation centrale capable d’être le poids lourd du paysage politique français.
Au lieu de cela, la confédération est vite devenue une arène
où les petits chefaillons se battaient pour un bout de pouvoir et un simple
cartel électoral.
Quand Jean-Louis Borloo s’en rendit compte, il envoya à ses
troupes un ultimatum dans lequel il leur demandait de la décence et de la
discipline.
Et, lorsqu’il s’aperçut que rien ne changerait, il
démissionna, laissant face à face, les deux ennemis jurés, Lagarde et Morin.
Dès ce moment et devant l’incompétence du nouveau président
du parti, Lagarde, on savait que l’UDI était constamment en sursis.
L’élection de Macron, l’absence de candidat UDI à la
présidentielle, le soutien tout azimut et sans ligne politique aux candidats
LR, le fourvoiement d’une alliance avec François Fillon, le renouveau du MoDem,
tout cela a joué dans la déliquescence de la confédération.
Celle-ci doit tenir son congrès en mars prochain… si elle
existe encore.
Pour autant, même si elle ne se saborde pas avant ou après
cet événement, qui s’intéresse encore à son avenir et à ce qu’elle dit?
Et ça, c’est sûrement le plus inquiétant pour ceux qui y
sont encore.
Lire aussi:
► Les radicaux réunifiés
Après quarante-cinq ans de brouille (suite à la signature du
Programme commun de la gauche) et de plusieurs tentatives de réconciliation
avortées, les radicaux se sont enfin réunifiés le 9 décembre dernier.
Le Mouvement radical social-libéral (nom choisi par le Parti
radical valoisien et le Parti radical de gauche) est donc né.
Mais il n’est encore rien puisqu’il faut maintenant le
structurer et lui donner une identité politique qui ne peut pas être seulement
celle d’être «le plus vieux parti de France» ou le défenseur intransigeant de
la laïcité.
Or, si Laurent Hénart (président du Parti radical) et Sylvia
Pinel (président du parti radical du gauche) ont minimisé les points de
désaccords, ceux-ci existent comme la position sur l’Impôt sur la fortune.
De même que les oppositions internes.
Certains militants et élus des deux partis ont d’ores et
déjà claqué la porte pour s’en aller créer d’autres structures ou s’affilier à
d’autres partis.
Si cette dissidence est, pour l’instant, marginale, il
faudra voir ce qu’il en sera alors que le processus d’intégration dans le
Mouvement radical évoluera dans les mois à venir.
Toujours est-il que le but de cette nouvelle formation
politique est de devenir une force centrale d’importance, voire de première
importance.
Lire aussi:
► La disparition de Simone Veil
Elle était la personnalité politique préférée des Français
et une des personnalités, tout court, la plus populaire auprès de ses
concitoyens.
Simone Veil a disparu le 30 juin 2017 juste après qu’Emmanuel
Macron se soit installé à l’Elysée.
Même si elle n’avait pas pris position en sa faveur, elle
aurait sans doute été séduite par ses premiers mois à la tête de la France.
Mais elle était surtout une femme qui a montré que le Centre
était affaire de conviction, de valeurs et de dignité.
Ce qui n’était pas une mince réussite quand on voit les
comportements minables et pathétiques de certains politiciens se réclamant de
ce même Centre…
Bien sûr, elle restera dans la mémoire collective pour son
combat en faveur de l’IVG (Interruption volontaire de grossesse) qui faisait
partie d’un combat plus large en faveur des femmes ainsi que pour sa force de
caractère, elle qui fut déportée par les nazis à Auschwitz à l’âge de 16 ans.
Lire aussi:
Alexandre Vatimbella avec l’équipe du CREC
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