Le groupe Les constructifs à l'Assemblée nationale |
Lors d’une récente interview au JDD, à la question «Que représente Laurent Wauquiez pour vous?»,
Jean-Christophe Lagarde répondit, «La ligne Buisson, celle de tous les excès,
de tous les échecs».
Et à la question «Excluez-vous
de travailler demain avec Laurent Wauquiez?», le président de l’UDI
affirma, «Ce que je veux construire à partir de l'UDI, c'est une force politique
qui ne sera plus jamais supplétive des Les républicains», tout en précisant que
«Cette page avec LR est tournée».
Si l’on revient maintenant en 2015 et au temps des élections
régionales, le même Lagarde, qui avait fait alliance partout avec LR, disait de
Wauquiez, qu’«Il sera tête de liste en région Rhône-Alpes Auvergne» d’une
coalition avec l’UDI car, ajoutait-il, «J'observe que ces dernières semaines,
ces derniers mois, y compris dans sa région, il a plus pris en considération
les centristes. Il a dû changer puisqu'il explique que le centre est nécessaire
à la majorité dans cette région et je m'en réjouis».
Après l’échec à la présidentielle et la création d’un groupe
Les constructifs à l’Assemblée nationale, Jean-Christophe Lagarde déclarait
qu’il voulait créer «un grand mouvement de centre et de droite progressiste» et
que «Notre objectif est de construire un mouvement politique» avec les députés
LR en rupture de banc avec leur parti.
Aujourd’hui, le président de l’UDI n’a pas de mots assez
durs pour ses «amis» de droite de Les constructifs estimant que leurs onze
députés «sont pas tous sur la même
ligne entre ceux qui rêvent d'être ministres et ceux qui pensent à retourner
chez Les Républicains»…
Et les membres de
son parti d’enfoncer le clou come le député Yannick Favennec:
«Thierry Solère, je l'aime bien, mais il est très personnel.
On les a accueillis, on avait le groupe, le financement. Ce sont des SDF (sic!)
et on leur a ouvert la porte. On est avec les LR, des gens sympathiques, mais
je ne m'y retrouve pas. Regardez le vote du budget: les dix-neuf anciens UDI se
sont abstenus et les votes pour sont les anciens LR. Ils applaudissent quand
nous on n'applaudit pas».
Tout ceci pose deux questions principales.
La première est pourquoi avoir travaillé avec Wauquiez,
clone radical de Nicolas Sarkozy, l’avoir adoubé (comme le MoDem et François
Bayrou) pour les régionales et ne plus vouloir travailler avec lui aujourd’hui
en le diabolisant et en en faisant le cas emblématique pour une rupture avec LR?
La deuxième est pourquoi chercher des noises à Les
constructifs de LR en les accusant de desseins secrets pour vous abattre alors
qu’ils partagent vos idées politiques et que vous êtes soi-disant alliés avec
eux?
Avec ces questions on peut résumer les rapports ambigus et
paradoxaux que l’UDI entretient avec la Droite et, plus généralement, cette
branche du centre-droit représentée actuellement par le parti dirigé par
Jean-Christophe Lagarde (mais aussi par les ralliés centristes à l’UMP et qui
sont demeurés dans LR).
Depuis le début de la V° République, lorsque les centristes
s’allient avec la Droite ou se rallient à elle, leurs rapports demeurent souvent
conflictuels avec des épisodes de crise (comme avec Les constructifs
actuellement) et d’autres où, rentrant dans le rang, ces mêmes centristes sont
alors totalement serviles (comme lorsqu’il ont soutenu Wauquiez aux régionales).
Bien évidemment, cela s’explique par l’obligation pour le
centre-droit de s’allier avec la Droite pour avoir des élus mais avec ce
sentiment de n’être utile que lors des élections afin de faire voter leurs
électeurs pour les candidats de droite puis d’être totalement ignorés par la
suite.
Mais cette explication n’est pas recevable comme
justification d’une alliance et d’une servilité.
Si le centre-droit doit nouer des alliances même avec plus
fort que lui, personne ne lui demande de perdre son âme ou, tout au moins, ses
valeurs.
Le cas Wauquiez est emblématique de ce centre-droit qui se
perd uniquement pour avoir des élus.
Il l’est d’autant plus que le personnage s’est fait passer
pour un «centro-compatible» afin de récupérer le siège de député du centriste
Jacques Barrot en 2012 et se faire adoubé par ce dernier alors que son
positionnement est souvent plus à droite que celui de Marine Le Pen.
Mais, à l’inverse, quand le centre-droit peut nouer des
alliances équilibrées comme c’est le cas avec Les constructifs, voir des complots
partout est une attitude paranoïaque qui en dit beaucoup sur sa psychologie qui
est de sentir constamment rabaissé par les droitistes alors même que c’est
souvent avec leur complet consentement qu’ils se couchent…
Dès lors, le centre-droit estime qu’il doit instaurer une
sorte de guérilla avec la Droite pour demeurer en vie.
Cela passe par des propos récurrents sur ce qui le distingue
de la Droite tout en déclarant qu’il est son allié (voire même «naturel» comme
l’a dit l’UDI pendant des années après que le Nouveau centre ait dit la même
chose).
La problématique est aujourd’hui encore plus compliquée avec
l’émergence de La république en marche, dont ce centre-droit est beaucoup plus
proche qu’il ne l’est de LR.
Pour autant, cette séquence politique et historique peut ne
rien changer de fondamental dans ce centre-droit qui s’adosse constamment à la
Droite.
Ainsi, à la prochaine alternance qui ferait revenir cette
dernière au pouvoir, rien ne dit que les vieux comportements opportunistes et
électoralistes ne reviendraient pas.
De ce que l’on a vu dans les pratiques passées ou actuelles,
on peut, en effet, être, au moins, dubitatif…
Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC
Jean-Louis Pommery
Directeur des études du CREC
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