François Bayrou |
Alors que l’il vient d’être annoncé l’ouverture d’une
information judiciaire et la désignation de trois juges pour s’occuper de l’affaire
des faux attachés parlementaires européens du Mouvement démocrate et que l’enquête
va se focaliser sur des soupçons d’abus de confiance et d’escroqueries, on peut
se demander quel peut être l’avenir de François Bayrou.
Alors que celui-ci avait été enterré lors de l’élection
présidentielle de 2012 au cours de laquelle il n’avait pas réussi à dépasser la
barre des 10% des voix (une défaite puisqu’en 2007 il avait atteint 18,57%) et
qu’il avait perdu, dans la foulée, son siège de député, il avait réussi un
improbable retour grâce à l’aide d’Alain Juppé qui lui permettait de devenir
maire de Pau mais aussi de cette sorte de fidélité des médias qui ont continué
de l’inviter sur les plateaux de télévision et les studios de radio ou de lui
ouvrir leurs colonnes.
Car François Bayrou, médiatiquement parlant, était un bon
client, un opposant systématique au pouvoir en place, que ce soit Chirac puis
Sarkozy puis Hollande, tout en ayant un discours modéré et de bon père de
famille.
Ce retour a connu néanmoins son premier accroc avec l’enterrement
de son ambition présidentielle pour 2017.
De mauvais sondages et une incapacité à trouver un espace
politique face à Juppé puis face à Macron, lui ont fait renoncer à se
présenter.
Mais, dans un coup de maître, cette défaite s’est
transformée en une nouvelle dynamique (nonobstant son désir d’être à l’Elysée)
quand il a décidé d’apporter son soutien à Emmanuel Macron sous forme d’une
alliance entre les deux hommes.
A l’époque, celle-ci était présentée comme un deal où le
président du MoDem soutenait le candidat d’En marche! qui promettait, en
retour, de faire voter une loi sur la «moralisation» de la vie politique.
Ayant parié sur le bon cheval, c’est tout naturellement que
François Bayrou a réclamé son dû après la victoire de Macron à la
présidentielle.
Et celui-ci n’était pas seulement une loi mais bien des
postes au gouvernement et des députés à l’Assemblée nationale.
Une alliance «à l’ancienne» et dans la bonne vieille tradition
politicienne que, pourtant, Macron et Bayrou n’ont cessé de fustiger avant,
pendant et même après la campagne électorale…
Toujours est-il que François Bayrou est apparu comme le
co-vainqueur de cette présidentielle.
Et s’il n’a pas été nommé premier ministre à son grand dam,
il a récupéré le poste de ministre de la Justice et de troisième homme du
gouvernement en étant, en plus, ministre d’Etat.
Dans le même temps, sa fidèle collaboratrice, Marielle de
Sarnez, devenait ministre des Affaires européennes.
Dans la foulée et après quelques bisbilles avec les
dirigeants de La République en marche, il récupérait de nombreuses
circonscriptions et parvenait à faire élire une quarantaine de députés alors
que le MoDem n’en avait plus aucun.
Mais, ce tableau presqu’idyllique s’est fracassé en quelques
jours sur l’affaire des assistants parlementaires européens évoqué plus haut.
Non seulement il est apparu que François Bayrou avait fait
de la «vieille» politique avec Macron mais que porteur d’une loi sur la
moralisation politique et en tant que garde des Sceaux, il n’avait absolument
pas respecté ce pourquoi il prétendait se battre depuis des années où il
fustigeait sans relâche les comportements de ses adversaires qui étaient
également les siens.
Comme des amants trompés, les journalistes se sont alors
retournés avec hargne excessive contre le président du MoDem, obligé de quitter
le gouvernement avec Marielle de Sarnez.
Néanmoins, cette affaire n’aura que peu impacté le résultat
des législatives pour le Mouvement démocrate qui a fait une entrée remarquée à
l’Assemblée nationale.
Il faut tout de même souligné que les députés du parti
centriste ont été élus surtout comme soutiens d’Emmanuel Macron et avant tout
membres de la coalition dirigée par La République en marche.
Aujourd’hui, François Bayrou est totalement muet, réfugié dans
sa bonne ville de Pau et sa dernière intervention médiatique date du 21 juin
lorsqu’il a expliqué son absence du nouveau gouvernement Macron, une éternité
pour lui.
Si l’on se gardera bien d’être catégorique sur le futur du
président du MoDem au vu des épisodes précédents, on peut tout de même se
demander s’il peut revenir d’un tel enchaînement d’évènements où de rien, il
est presque devenu tout puis où il est revenu à presque rien.
Ironiquement, alors que le Mouvement démocrate devait être
une simple machine à lui permettre d’atteindre l’Elysée, c’est peut être lui
qui va prendre son envol alors que son chef va rentrer dans le rang…
Car l’affaire des attachés parlementaires européens est plus
qu’un abus de confiance ou une escroquerie pour l’image de François Bayrou chez
les Français.
De même que son comportement après la victoire d’Emmanuel
Macron.
D’une part, cela a montré que la posture qu’il a adoptée
comme une sorte d’incorruptible était, pour le moins, très excessive.
D’autre part, que celui qui prétendait lutter contre toutes
les dérives politiciennes, agissait pourtant de même dans les coulisses.
En outre, la presse ne semble plus vouloir lui faire de
quelconques cadeaux.
Or c’est bien elle qui lui a permis de garder une visibilité
médiatique beaucoup plus importante que son poids politique réel pendant des
années.
Tout ceci semble indiquer que l’avenir politique de François
Bayrou va être difficile et ce, même si le MoDem est innocenté dans l’affaire
des attachés parlementaires européens.
En revanche, rien ne permet de dire que sa carrière
politique est définitivement derrière lui.
Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC
À vous lire, cette affaire contiendrait déjà assez d'éléments pour accabler le MoDem et son président.
RépondreSupprimerC'est loin d'être le cas.