Edouard Philippe lors de son discours à l'Assemblée |
La déclaration de politique générale du Gouvernement devant
l’Assemblée nationale par le Premier ministre Edouard Philippe, le 4 juillet, a
recueilli 370 voix pour contre seulement 70 contre (le nombre le plus bas
depuis les débuts de la V° République) sur 566 votants et 4387 suffrages
exprimés (voir
ici le détail complet du scrutin).
Voici, la déclaration de politique générale d’Edouard
Philippe suivi des réactions des groupes centristes de l’Assemblée nationale ?
Discours d’Edouard
Philippe
«Malgré un destin
difficile, je suis, je reste toujours optimiste. La vie m’a appris qu’avec le
temps, le progrès l’emportait toujours. C’est long, c’est lent, mais en
définitive, je fais confiance.» Ces mots sont de Simone Veil. Ils ont été
prononcés en 1995 mais ils sont en vérité éternels et ils sont ceux de la
France. Ils disent ce qu’il faut d’efforts et de courage pour que le progrès
advienne. Ils disent aussi combien confiance et progrès ont partie liée.
Je veux, alors que je m’exprime depuis cette tribune devant
la représentation nationale et après avoir cité Simone Veil, vous parler d’une
autre femme, d’une femme qui, à la fin de l’été 2003, poussait les lourdes
portes d’une grande école parisienne, une jeune femme que rien ne prédestinait
à entrer dans ce lieu, une jeune femme qui a grandi en Seine-Saint-Denis, suivi
une scolarité dans des établissements situés en quartiers d’éducation
prioritaire à Villetaneuse et à Saint-Ouen, une jeune femme dont les parents,
chauffeur-bagagiste et aide-soignante, ne s’attendaient pas à ce qu’elle accède
à cette grande école parisienne puis devienne avocate, puis travaille dans les
cabinets les plus prestigieux, puis fonde son propre cabinet.
Cette jeune femme siège aujourd’hui sur vos bancs. Sa
réussite est le produit de son travail, de son engagement, de sa ténacité. Elle
la doit aussi à la décision d’un responsable public – en l’occurrence, le
directeur de Sciences Po – qui avait, quelques années auparavant, bousculé
son institution pour l’ouvrir à des formes d’excellence peut-être un peu moins
classiques.
Une politique publique critiquée lorsqu’elle a été adoptée,
copiée depuis et qui apparaît quelques années après, grâce au travail et à
l’effort de ceux qui en bénéficient, comme un modèle, comme un progrès. C’est
long, c’est difficile, mais ça marche et pas seulement pour cette jeune fille.
Au moins deux d’entre vous ont bénéficié de cette politique publique audacieuse
dont un jeune homme de Saint-Laurent-du-Maroni, un de ces benjamins de cette
Assemblée qui sera peut-être une de ces grandes figures que la Guyane offre
parfois à notre pays.
Des parcours individuels, certes, mais rendus possibles par
une politique publique. Ainsi va la République ou plutôt ainsi devrait-elle
aller. Je regarde cette Assemblée, je regarde ces bancs où je siégeais il y a
quelques semaines encore, je vois un éleveur de la Creuse, agriculteur comme l’étaient
son père, son grand-père et tellement d’autres avant lui, enraciné dans sa
terre au point que le lieu-dit où il vit porte le nom de sa famille. Il s’est
battu pour continuer à y vivre, pour défendre l’excellence de l’agriculture
française.
Je vois une jeune femme officier qui a participé à deux
opérations extérieures et a commandé une des compagnies de la brigade
franco-allemande.
Je vois un autre de vos benjamins né au Rwanda quatre ans
avant le génocide et recueilli par la République qui lui a offert son meilleur
visage et qui peut être fière de le voir aujourd’hui représenter la nation.
Je vois des sportifs de haut niveau, des entrepreneurs, des scientifiques, des militants du monde associatif.
Je vois des sportifs de haut niveau, des entrepreneurs, des scientifiques, des militants du monde associatif.
Je vois même des matheux, des matheux qui, par leur talent
et leur travail, constituent à la fois une fierté pour votre Assemblée et une
fierté pour la France.
Je vois une Assemblée rajeunie, féminisée et largement
renouvelée puisque 430 d’entre vous font leurs premiers pas dans cette
enceinte. Une Assemblée qui porte l’héritage républicain et qui ressemble à la
France.
Et c’est devant cette Assemblée renouvelée, Mesdames et
Messieurs les Députés, que se présente un gouvernement paritaire, lui aussi
profondément renouvelé par la diversité de ses origines – professionnelles
et politiques – et que le président de la République m’a demandé de
diriger.
Je mesure cet honneur. Je mesure la responsabilité aussi de
la tâche qui est la mienne et je l’aborde avec beaucoup d’humilité, avec une
humilité d’autant plus grande que pour préparer cette déclaration de politique
générale, j’ai relu toutes celles de mes prédécesseurs. Je dis bien toutes,
depuis celle de Michel Debré le 15 janvier 1959 jusqu’à celle de
Bernard Cazeneuve le 14 décembre dernier.
Tous ces discours étaient inspirés par les convictions les
plus sincères, par un patriotisme digne d’éloges et par le sens de l’Etat le
plus élevé. Il faut avoir le courage de le dire, même si c’est à contrecourant
des idées reçues, la France n’a jamais manqué de responsables politiques
compétents et souvent d’une exceptionnelle qualité. Je sais d’ailleurs ce que
je dois à l’un d’entre eux, Alain Juppé, et je voudrais ici lui rendre hommage.
De toutes ces déclarations de politique générale, deux m’ont
particulièrement marqué. Je cite un extrait de la première : « De
cette société bloquée, je retiens trois éléments essentiels : la fragilité
de notre économie, le fonctionnement souvent défectueux de l’Etat, enfin
l’archaïsme et le conservatisme de nos structures sociales. » Ces mots
sont d’une actualité criante. Ils ont été prononcés le
16 septembre 1969 par Jacques Chaban-Delmas, il y a 48 ans.
Beaucoup d’entre nous n’étions pas nés.
Le second est un peu plus récent, je le cite encore :
« Nos priorités ne sont pas celles d’une moitié de la France contre
l’autre moitié mais celles de tous les Français. Défaire ce que les autres ont
fait, faire ce que d’autres déferont, voilà bien le type de politique dont les
électeurs ne veulent plus. Nous ne demanderons à personne de nous rejoindre par
intérêt ni de trahir ses convictions. » Il s’agit des mots de Michel Rocard
le 29 juin 1988, il y a quand même presque 30 ans.
Rocard, Chaban, deux personnalités éminentes, deux hommes
d’Etat qui ont incarné deux courants essentiels de notre vie politique, le
gaullisme et la social-démocratie. Deux hommes qui s’accordaient donc sur un
constat et sur une méthode et pourtant, le diagnostic posé il y a 48 ans
reste hélas valable, la méthode proposée il y a 30 ans demeure toujours une
exigence mais trop rarement une réalité.
Et la France, à la différence de beaucoup de nations du
monde, ne résout pas ses problèmes. En découle un sentiment mortifère où se
mêlent désarroi, découragement, désenchantement et colère. Nous connaissons ce
sentiment, nous le ressentons parfois nous-mêmes, nous connaissons sa
puissance. Nos compatriotes l’ont exprimé et fortement lors de l’élection
présidentielle par un réflexe d’abstention ou un vote d’exaspération.
Il faut comprendre ces angoisses, il faut entendre cette
colère. Mais nos compatriotes ont aussi exprimé un espoir formidable en portant
Emmanuel Macron à la présidence de la République. Tandis que de grandes
démocraties choisissaient le repli sur elles-mêmes, le dos tourné au monde, les
Français, avec le président de la République, ont préféré l’esprit d’ouverture
et de conquête. On leur proposait la nostalgie impuissante, ils ont préféré le
courage d’affronter l’avenir. Ils avaient à choisir entre la colère et la
confiance, ils ont exprimé leur colère mais ils ont choisi l’optimisme et le
rassemblement.
Durant la campagne, depuis son élection et hier encore
devant le Parlement réuni en Congrès, le président de la République nous a
montré le cap. J’en suis heureux. C’est bien souvent d’un cap que nous avons
manqué. Il nous a également indiqué la méthode pour y parvenir. Elle tient en
trois points : dire la vérité, travailler avec toutes les femmes et tous
les hommes de bonne volonté, obtenir des résultats concrets le plus rapidement
possible. Ce cap est clair, il doit être tenu.
Les Français ont d’ailleurs, dans un souci de cohérence
évident, donné au président et au gouvernement les moyens de suivre ce cap en
désignant une majorité claire et incontestable. Cette majorité claire, nul ne
la prend pour un blanc-seing. Elle implique au moins autant de devoirs que de
droits. Que le gouvernement puisse fonder son action sur une majorité forte est
une bonne chose, qu’il ait toujours à l’esprit que l’intérêt général ne se
réduit jamais à aucune fraction du peuple français, fût-elle majoritaire, en
est une bien meilleure encore.
Mais la France doit avancer. Il y a dans notre cher et vieux
pays une envie, une énergie, un espoir qui transcendent les courants politiques
et voilà bien qui ne devrait surprendre personne. Les Français nous ont
habitués à travers les âges à ces sursauts collectifs et à ces retours de
confiance alors même que tout semblait bloqué, voire perdu. En 2017, les
Français nous ont dit qu’ils voulaient que la France redevienne enfin
elle-même, confiante, courageuse et conquérante.
Pour redevenir elle-même, la France doit rétablir la
confiance et d’abord la confiance des Français en l’action publique. Je parle
bien de confiance et pas de morale. Je ne serai pas l’arbitre des élégances et
je n’aime pas le mélange des genres.
Je ne suis pas non plus un inconditionnel de l’absolue
transparence qui tourne vite au voyeurisme et à l’hypocrisie. Je crois au vieux
mot romain de « vertu » qui recouvre à la fois l’honnêteté, la
rectitude et le courage.
Nous avons fait des progrès en la matière depuis trente ans.
Sous la pression souvent mais de façon très nette, les règles de financement
des partis politiques et des campagnes électorales sont aujourd’hui bien plus
strictes et bien plus saines qu’il y a trente ans.
Assumons ces progrès, ils ne comptent pas pour rien.
Je veux le dire clairement nous ne devons jamais laisser
discréditer ceux qui ont fait le choix honorable de consacrer une partie de
leur vie au service de leurs concitoyens et à la chose publique. Mais dans leur
intérêt même il faut encore agir, car il y a à l’évidence mesdames et messieurs
les députés des pratiques qui ont été longtemps tolérées et que le peuple
français n’accepte plus.
Il s’agit de fixer le cadre qui permettra d’assainir notre
vie publique et de rétablir la confiance des Français tout en posant des règles
claires pour les élus.
C’est l’objet du premier projet de loi qui vous a été
soumis ; comme le président de la République l’a indiqué hier nous
lancerons également dans l’année les réformes institutionnelles indispensables
à la modernisation de notre démocratie.
J’insisterai en particulier sur la réforme de la Justice.
Dans un Etat de droit rien n’est possible sans une justice forte. Si elle est
lente, lointaine ou inégalitaire, ou même seulement trop complexe, la confiance
se trouve fragilisée.
La réforme constitutionnelle renforcera l’indépendance des
magistrats. Dès 2018 une loi quinquennale de programmation des moyens de la
justice sera présentée au Parlement. Cette loi permettra à la Garde des Sceaux
d’engager un vaste mouvement de dématérialisation, de simplification et de
réorganisation. Avoir confiance dans la justice c’est pouvoir y recourir
simplement et savoir qu’elle tranchera rapidement, en particulier sur les infractions
les plus graves : lutter contre le terrorisme, la grande criminalité, la
fraude organisée, les violences et notamment celles faites aux plus fragiles.
Les peines seront renforcées, tandis que d’autres
incivilités pourront faire l’objet de contraventions plutôt que de procédures
plus lourdes mais trop souvent dépourvues des faits.
La construction de 15 000 places de prison est un
engagement fort du président de la République, il sera tenu. Parce que ne pas
pouvoir incarcérer ceux qui doivent l’être est inadmissible. Mais aussi parce
qu’il nous faut traiter dignement les détenus. C’est essentiel pour ne pas
transformer les prisons en incubateur des violences de demain, mais c’est
essentiel pour nous car c’est aussi notre dignité qui est en jeu.
Nous ferons donc ce qui doit être fait sans oublier jamais
que la prison n’est pas une fin en soi et qu’il est nécessaire d’utiliser
l’ensemble des sanctions prévues par le code pénal. Le recours à l’enfermement
ne doit pas traduire une paresse de l’esprit qui s’interdirait de réfléchir au
sens de la peine, à la nécessité d’empêcher la récidive, à l’obligation de
préparer la réinsertion.
Rétablir la confiance c’est aussi rassurer les Français sur
le futur de la Sécurité sociale. La Sécurité sociale est une partie de
nous-mêmes. Elle est comme le veut une belle formule « le patrimoine de ceux
qui n’en ont pas ». Mais alors si tel est le cas traitons-la comme un
véritable patrimoine, en l’entretenant, en la préservant, en la rénovant. C’est
vrai pour notre système de santé. Les Français y sont attachés parc que, à
juste titre, ils font confiance à leur médecin et aux professionnels de santé
et à l’hôpital qui reste un pole d’excellence française.
Mais ils constatent aussi que le système est mal coordonné,
que la répartition entre urgence et consultation, entre soins de ville et soins
hospitaliers n’est pas optimale, que l’on évite au fond ni l’exclusion des
soins, si l’accroissement des inégalités.
La prévention sera le pivot de la stratégie nationale de
santé discutée à l’automne.
Des maladies que l’on croyait éradiquées se développent à
nouveau sur notre territoire. Des enfants meurent de la rougeole aujourd’hui en
France. Dans la patrie de Pasteur ce n’est pas admissible. L’an prochain, les
vaccins pour la petite enfance, qui sont unanimement recommandés par les
autorités de santé, deviendront obligatoires.
En matière de lutte contre le tabac là encore il nous fait
assumer des choix courageux. Chaque année le tabac en France entraine plus de
80 000 décès. C’est la première cause de mortalité évitable et la
consommation quotidienne de tabac augmente chez les adolescents. Ne rien faire
est exclu, nous porterons progressivement le prix du paquet de cigarettes à 10
euros en luttant sans merci contre les trafics qui minent cette politique de
santé autant qu’ils fragilisent ceux qui respectent la loi.
Nous créerons un service sanitaire pour les étudiants des
filières de santé, pour leur permettre d’intervenir dans les écoles et les
entreprises pour des actions de prévention.
Mais prévenir ne suffit pas. Il nous faudra aussi revoir la
manière dont est organisé notre système de soins. Nos professionnels de santé
sont compétents et dévoués. Mais leur action est trop souvent entravée par les
rigidités de nos structures, les carcans administratifs, le fonctionnement en
silos.
Il faut donc bâtir des parcours de soin en favorisant
l’interconnexion des professionnels de santé et la circulation de l’information
au bénéfice du patient, en mettant en place de nouvelles incitations et de
nouveaux modes de rémunération, en mesurant la qualité des soins et en la
faisant connaitre. Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale
traduira cette ambition dès cette année.
Notre stratégie de santé devra aussi permettre de garantir un
égal accès aux soins. Pas seulement en droit mais surtout dans les faits.
La ministre de la Santé prépare, pour le mois de septembre
prochain, un plan de lutte contre les déserts médicaux en bonne intelligence
avec les collectivités territoriales et les acteurs du monde de la santé. En la
matière, la télémédecine offre des opportunités formidables, nous les
favoriserons.
Enfin notre stratégie de santé devra rompre le cercle
vicieux du renoncement aux soins. D’ici la fin du quinquennat tous les Français
auront accès à des offres sans aucun reste à charge pour les lunettes, les
soins dentaires et les aides auditives.
Rétablir la confiance c’est savoir que nous serons tous ici,
tous, jugés sur la façon dont nous nous comportons avec les plus faibles. Pas seulement
pour changer le regard que la société porte sur eux, sur le handicap, sur les
personnes âgées, sur les plus pauvres, mais aussi pour reconnaître tout ce que
nous pouvons recevoir d’eux.
Nous revalorisons dès 2018 l'Allocation adulte handicapé et
le minimum vieillesse ; nous simplifions les procédures pour les
titulaires de droits sociaux qui souvent, par désespoir ou par ignorance, ne
les réclament plus. Nous renforcerons notre action en matière de lutte contre
la pauvreté en insistant particulièrement sur les familles comprenant de jeunes
enfants. Ces efforts financiers sont nécessaires et ils ne seront pas
suffisants. Il nous faut aussi reconnaître et soutenir les solidarités
familiales affectives et financières.
Les familles sont de plus en plus diverses, mais leur rôle
reste central. La génération de mes grands-parents a été la première à
bénéficier de la retraite ; la génération des mes parents est la première à
bénéficier de la retraite tout en ayant assumé une partie de l'aide à ses propres
parents.
Le changement de civilisation et majeur, il ne me paraît pas
suffisamment pris en compte ; la baisse de la natalité de son côté, réelle
depuis deux ans, doit nous alerter.
Nous cesserons donc de considérer les familles comme de
simples variables d'ajustement fiscal. La ministre de la Santé et des
Solidarités présentera des mesures améliorant le congé maternité et les
solutions de garde d'enfant ; c’est aussi une mesure qui s'inscrit dans la
grande cause nationale de l'égalité entre les femmes et les hommes.
L’inclusion des personnes en situation de handicap
constituera une des priorités du quinquennat. C'est à une mobilisation
nationale que j'appelle sous l'impulsion du président de la République et sous
la conduite de la secrétaire d'Etat. Les personnes en situation de handicap et
celles qui les accompagnent ont droit à la solidarité nationale. Elles ont
besoin de bien plus encore, et elles peuvent nous apporter davantage.
Un enfant handicapé scolarisé ce n’est pas simplement une
histoire d'argent ni même de justice, c'est une chance pour l'ensemble de ses
camarades. Une entreprise ou une collectivité territoriale qui embauche plutôt
que de payer une taxe c'est une communauté de travail plus forte et plus
motivée.
Les moyens ne pourront pas être illimités, mais l'énergie
que nous y mettrons ne sera pas comptée.
Rétablir la confiance est aussi affermir le lien entre
l'Etat et les territoires. Nous ne sommes plus à l'époque où la République,
encore mal affirmée, n'imaginait son unité qu’au prix de l'uniformité. Les
jardins à la française ont leur charme mais ils se prêtent assez peu au
foisonnement d'initiatives dont le pays a besoin et auxquels les collectivités
sont prêtes.
Comme l'a réaffirmé le président de la République hier, nous
voulons donner aux libertés locales toutes leurs forces. La liberté de
s'organiser d'abord en développant les communes nouvelles ou les regroupements
de départements dès lors que les fusions ne sont pas contraires à l'intérêt
général.
La liberté d'exercer ses compétences ensuite, osons les
expérimentations, ne décrétons pas depuis Paris la fin du millefeuille
territorial, mais incitons les territoires à adapter localement leur
organisation pour que partout où c'est possible nous puissions tendre vers deux
niveaux seulement d'administration locale en-dessous du niveau régional.
Pourquoi ne pas permettre non plus sur la base du
volontariat à certaines collectivités d'exercer des compétences pour le compte
d'un autre niveau comme par délégation.
En matière de finances locales, nous engageons avec les
collectivités territoriales des discussions indispensables car si chacun bien
sûr doit contribuer à l'effort de redressement de nos comptes publics, cela
doit se faire dans le dialogue et le respect et avec la prévisibilité
nécessaire à toute bonne gestion.
C'est dans ce cadre que nous engagerons la concertation sur
la réforme de la taxe d'habitation qui doit contribuer d'ici la fin du
quinquennat à rendre du pouvoir d'achat à l'immense majorité de nos
concitoyens.
Je sais cette réforme attendue par les contribuables mais
redoutée par les élus. La taxe d'habitation est aussi nécessaire aux budgets
locaux qu'elle est injuste dans son calcul et son évolution pour les
contribuables ; et qui ne peut dire le contraire !
Améliorer le dispositif pour les collectivités tout en
redonnant du pouvoir d'achat pour les citoyens est un objectif qui devrait nous
réunir ; rétablir la confiance c'est aussi éviter de creuser un fossé
entre deux France que certains voudraient opposer mais qui ne peuvent ni vivre,
ni réussir l'une sans l'autre : la France des métropoles mondialisées et
la France périphérique.
C’est tout l'objectif de la conférence nationale des
territoires dont la première réunion se tiendra à mi-juillet. Nous y proposerons
un pacte pour les collectivités pour les accompagner dans la transition
écologique et pour les accompagner dans la transition numérique notamment en
garantissant un accès au très haut débit au plus tard d'ici 2022 partout en
France.
Mais notre gouvernement n'est pas celui des machines, il est
d'abord celui des hommes. Il y a des Français qui n'ont pas de GPS, pas de box
connectée, dont le téléphone sert à téléphoner et c'est tout. Il y a des
citoyens qui sont broyés et ignorés par ce monde technique.
Le fossé s'agrandit, et il n'est pas que générationnel, il
est social et il est parfois géographique. Nos services publics, le monde
associatif doivent accompagner ces évolutions et ces révolutions
numériques ; nous les y aiderons.
De même il y a des votes protestataires qui se sont exprimés en métropole comme en Outre-mer. Il faut les entendre. Il y a aussi un vote identitaire qui s'est notamment exprimé en Corse ; on peut être comme je le suis intransigeant sur les principes républicains sans être pour autant Ignorant des diversités et des aspirations à la reconnaissance.
De même il y a des votes protestataires qui se sont exprimés en métropole comme en Outre-mer. Il faut les entendre. Il y a aussi un vote identitaire qui s'est notamment exprimé en Corse ; on peut être comme je le suis intransigeant sur les principes républicains sans être pour autant Ignorant des diversités et des aspirations à la reconnaissance.
La France est partout dans le monde grâce à ses Outre-mer,
sur tous les continents et dans tous les océans du globe. Voilà une richesse,
voilà une chance, voilà aussi un défi. Les assises de l’Outre-mer seront
l’occasion pour l’ensemble du gouvernement d’être à l’écoute des attentes de
chaque territoire, et de concevoir ensemble les plans de convergence prévus par
la loi pour l’égalité réelle des Outre-mer. Pour ce qui concerne l’avenir de la
Nouvelle Calédonie, cette mandature sera celle de l’aboutissement de l’accord
de Nouméa signé il y a vingt ans.
S’il n’est pas saisi d’ici mai prochain par le Congrès le
gouvernement comme le prévoit la Constitution organisera la consultation pour
l’accession à la souveraineté au plus tard en novembre 2018. L’Etat jouera
pleinement son rôle d’acteur et de garant de ce processus pour conforter le
destin commun inscrit dans le préambule de l’accord. C’est un engagement
personnel que je prends ici, honoré de reprendre le flambeau de Michel Rocard
et de quelques autres après lui.
La confiance enfin c’est tout ce qui nous rassemble, la
France est une nation et une nation n’est ni une juxtaposition de territoires
ni une addition de communautés ni encore moins une somme d’individus. Une
nation est une adhésion à des valeurs, à une histoire, à une géographie, c’est
une culture qui s’assume et qui se transmet. Etre Français c’est reconnaître
des valeurs et partager une culture. C’est reconnaître que la laïcité est une
exigence pour la puissance publique, celle de la neutralité absolue à l’égard
des cultes. C’est aussi rappeler qu’elle est surtout pour chacun sur le
territoire de la République une liberté, la liberté de conscience individuelle,
la liberté de croire ou de ne pas croire, la liberté de pratiquer un culte ou
de n’en suivre aucun. Le gouvernement n’acceptera pas que ce principe fondateur
soit attaqué, remis en cause ou instrumentalisé. Il le fera respecter sans
outrance en se gardant de provoquer mais avec une fermeté qui repose sur l’idée
simple que la laïcité est au fond une condition de ce que nous sommes, la
France.
Ce qui nous rassemble c’est aussi la culture, c’est notre
langue, c’set notre patrimoine, c’est ce que nous partageons, c’set ce qui fait
que la France est admirée et aimée dans le monde, c’est ce que déteste les
porteurs de haine qui à plusieurs reprises ont attaqué notre pays. Et s’ils
détestent autant cette culture et ce mode de vie, s’ils haïssent les dessins,
les livres, la musique et les spectacles c’est qu’ils savent que ceux-ci sont
une source inépuisable de réflexion, d’émancipation et de bonheur, ils savent
qu’ils sont libérateurs. Ne nous y trompons pas, la formation dès le plus jeune
âge à la culture et à la création rend libre et en les familiarisant avec la
longue histoire des arts, en leur faisant découvrir les lieux de culture, en
leur apprenant à décrypter l’époque et à découvrir notre héritage nous élevons
l’âme de nos enfants et nous renforçons la cohésion de notre pays. De concert
les ministres de l’Education nationale et de la Culture feront de ce chantier
une priorité commune.
De même, lire rend libre, plus encore que sous les ors des
palais la République vit dans ses bibliothèques, nous voulons rester, redevenir
peut-être même une nation de lecteurs en nous inspirant des initiatives
remarquables menées par de nombreuses associations ou de nombreuses
collectivités territoriales. Accéder aux œuvres et à la création rend libre,
notre époque bouleverse les modes de diffusion des œuvres, c’est à la fois une
chance et un défi. Profitons-en pour faciliter le plus large accès possible aux
biens culturels avec notamment la création d’un « pass culture » pour
les jeunes comme l'a proposé le président. Mais ouvrons aussi le débat avec les
acteurs géants du numérique dans le cadre européen pour assurer aux artistes
les moyens de vivre de leurs créations et pour participer au financement de cet
accès aux œuvres.
Mesdames et Messieurs les Députés, la France peut renouer
avec la confiance, elle en a, j'en suis certain, les moyens, elle en a, j'en
suis convaincu, l'envie, elle doit aussi en avoir le courage, le courage, voilà
le deuxième grand axe qui organise le travail du gouvernement. Entendons-nous
bien, il ne s'agit pas du courage du gouvernement, de la majorité ou du
Parlement, il s'agit du courage dont nous devons collectivement nous Français
faire preuve pour être à la hauteur des enjeux. Les Français sont courageux,
ils l’ont été face au terrorisme, pas seulement les policiers, les gendarmes,
les militaires ou les douaniers qui luttent contre cette menace et qui en sont
trop souvent les cibles, tous les Français. Face au danger ils n'ont pas voulu
changer leurs habitudes, encore moins renoncer à leurs valeurs. Il y a dans notre
pays une forme de courage tranquille mais réel dont nous pouvons être fiers.
La menace est partout, diffuse, pas un mois ne passe sans
que des projets ne soient éventés ou des actes empêchés. Ayons en cet instant
une pensée pour les victimes, plus de 200 tués sur notre sol, des centaines de
blessés, pour leurs proches qui doivent apprendre à vivre avec la douleur, avec
la peine et avec l'absence. Je veux rendre hommage à tous ceux que nous voyons,
policiers, gendarmes, militaires de l'opération Sentinelle veiller chaque jour
sur notre sécurité, à ceux qui combattent sur les théâtres d'opérations
extérieures, au Sahel ou au Levant, et à tous ceux que nous ne voyons pas et
que nous ne connaîtrons jamais, nos soldats de l'ombre dont nous pouvons être
fiers, beaucoup sont tombés au service de notre liberté.
Je veux leur dire à tous que nous leur donnerons les moyens
de nous défendre, comme s'y est engagé le président de la République une loi de
programmation militaire sera adoptée dès 2018, elle portera l'effort de
dépenses à 2 % du PIB d'ici 2025 et permettra à la France de se battre sur tous
les fronts. Mais je tiens à vous le dire sans détour, il y aura d'autres
attaques, d'autres drames, d'autres vies innocentes fauchées, nous ne nous y
habituerons jamais et nous ne baisserons pas la garde, à l'image des Français
nous affronterons cette menace avec une calme et une froide détermination. Nous
lutterons contre le terrorisme avec la plus extrême dureté sans renier ce que
nous sommes, un Etat de droit et qui plus est la République française.
Une République, Mesdames et Messieurs les Députés, qui ne
peut pas vivre dans un état d'urgence permanent, c'est pourquoi le président de
la République nous a demandé de préparer la sortie de l'état d'urgence au plus
tard le 1er novembre prochain avec un projet de loi renforçant l'efficacité de
notre arsenal législatif contre le terrorisme sous le contrôle rigoureux du
juge. En parallèle, le ministre de l'Intérieur et la garde des Sceaux
travailleront ensemble pour faire reculer l'insécurité. Au printemps 2018,
après des expérimentations, ils porteront ensemble un projet de réforme
reposant sur des procédures simplifiées afin que les forces de sécurité soient
libérées de la complexité administrative, établir une véritable police de
sécurité au quotidien, c'est aussi une condition pour rétablir la confiance.
Le courage c'est aussi de regarder en face le défi
migratoire, la pression qui s'exerce aux frontières, dans les Alpes-Maritimes,
dans le Calaisis, à Mayotte, en Guyane, qui s'exerce aussi au cœur même du
territoire national comme à Paris crée des tensions considérables et lourdes de
dangers pour l'ordre public. Cette pression ne faiblira pas, les conflits et
l'insécurité économique au Moyen-Orient et en Afrique, les risques liés au
climat, les réseaux qui prospèrent en exploitant le malheur et la misère, tout
contribue à l'alimenter. Face à cette situation, la France s'est révélée
incapable de remplir ses obligations juridiques ou morales, les demandeurs
d'asile relevant effectivement de la convention de Genève attendent l'octroi
d'un statut durant de longs mois et dans des conditions parfois honteuses, les
autres qui sont en réalité des migrants économiques sont rarement éloignés
quand ils sont déboutés. La semaine prochaine, le gouvernement présentera des
mesures qui répondront à trois exigences : une exigence de dignité pour que la
France honore sa tradition d'accueil des réfugiés, une exigence d'efficacité
pour réduire les délais moyens d'instruction des demandes d'asile de 14 à six
mois et obtenir l'éloignement effectif des déboutés du droit d'asile, une
exigence de solidarité et de responsabilité, avec nos partenaires européens
nous ferons aboutir la réforme du régime européen de l'asile et mènerons une
action en direction des pays d'origine et de transit. Il s’agit, Mesdames et
Messieurs les Députés, comme je l'ai dit il y a quelques jours aux préfets que
j'ai réunis avec monsieur le ministre d'Etat, ministre de l'Intérieur, de voir
le monde tel qu'il est sans renoncer à ce que nous sommes. Accueillir, oui,
bien sûr, aider, oui, évidemment, subir, non, jamais.
Le courage c'est aussi de regarder les choses en face et de
préparer l'avenir, parlons donc de l'école. Je suis par mon histoire
personnelle un pur produit de l'école publique, deux fois fil de profs, je dois
une bonne partie de ce que je suis à mes maîtres, à leur attention, à leur
persévérance et à leur capacité à m'inspirer. Nous connaissons tous le
dévouement des enseignants, la passion qui les anime et le rôle qu'ils jouent
pour nos enfants. Et pourtant, et pourtant toutes les études le démontrent,
nous formons très bien les très bons mais nous creusons les inégalités et le
niveau moyen de nos élèves n'est pas à la mesure de notre grand pays. Notre
système laisse sortir chaque année encore près de 100.000 jeunes sans
qualification, nous dépensons bien moins que nos voisins dans le primaire où
pourtant tout se joue, nous dépensons bien plus que les autres pays pour le
lycée notamment parce que notre système est rigide et conçu autour du
baccalauréat. Mais nous conduisons 60 % 60 %, Mesdames et Messieurs les
Députés, de bacheliers à l'échec en licence. Enfin, scandale absolu, scandale
absolu, des bacheliers y compris parmi les plus méritants se retrouvent exclus
par tirage au sort des filières universitaires qu'ils ont choisies. Où est
l'égalité ? Où est le mérite ? Où est la République ? Nous ne
pouvons plus accepter.
Je ne reviendrai pas sur les mesures déjà annoncées par le
ministre de l'Education pour l'école et pour le collège, elles se concentrent
sur l'acquisition des savoirs fondamentaux, le soutien aux élèves et
l'autonomie des établissements et elles seront en vigueur dès la rentrée
prochaine. Quant au baccalauréat, nous le ferons profondément évoluer, une
concertation sera lancée dès la rentrée prochaine pour resserrer les épreuves
finales autour d'un petit nombre de matières et définir ce qui relève du
contrôle continu. Nous aboutirons avant septembre 2018 pour une mise en œuvre
complète de cette réforme pour le bac 2021.
Notre ambition est forte aussi pour la filière
professionnelle, le lien entre le lycée professionnel et le monde de
l'entreprise par l'alternance ou par l'apprentissage doit être resserré. Le
lycée professionnel doit aussi être mieux intégré avec les filières post-bac
courtes que sont le BTS et les licences professionnelles. Des diplômes de
qualification à bac+1 pourront également être proposés après le baccalauréat
professionnel.
Nos grandes universités doivent également continuer à se
transformer avec l'appui des organismes de recherche, elles doivent continuer à
gagner en autonomie, travailler en réseaux et se rapprocher du monde
économique. C'est dans leurs laboratoires que se construisent l'intelligence
collective et la croissance économique de demain. Les efforts d'investissements
ne seront pas relâchés, nous avons besoin d'universités fortes ou formation,
recherche et innovation irriguent notre culture et notre économie. Nos
universités vont connaître un choc démographique dont nous devons tous nous
réjouir mais qui n'est pas neutre, chaque année ce sont 40.000 étudiants
supplémentaires qu’il nous faudra accueillir mais nous n'avons pas le droit
d'orienter des générations entières dans des formations inadaptées et sans
débouchés. Il est temps d'offrir à nos lycéens des contrats de réussite
étudiante qui leur indiquent les pré-requis pour réussir dans la filière visée,
nous le ferons dès la rentrée 2018. Il faut aussi garantir un réel droit au
retour à l'université tout au long de sa carrière pour compléter et validé en
milieu académique les acquis de l'expérience.
Notre jeunesse a soif de cause, on n’y répondra pas par des
taux de croissance ou par des procédures, la jeunesse veut s'élever, au siècle
dernier elle a eu trop d'occasions de verser son sang. Le front aujourd'hui est
social, environnemental et mondial, il appelle la mobilisation de la jeunesse
non pour combattre mais pour construire, partager, déverser le fruit de ses
connaissances et de son enthousiasme. C'est aussi pour préparer nos enfants à
ce monde qui vient, à cette France que nous voulons grande et belle, juste et
forte que le gouvernement mettra en place un nouveau service national
conformément aux engagements du président de la République. La réflexion sur
les formes qu'il prendra sera conduite avant la fin de l'année 2017.
Le courage c'est aussi de rénover enfin notre modèle social.
Nous sommes dans notre pays fortement et légitimement attachés à l'égalité,
égalité devant la loi, égalité des droits. Pourtant, nous sentons bien
aujourd'hui que cette égalité est malmenée, le code du travail est le même pour
tous mais le niveau de protection n’est pas le même dans les grands groupes,
dans les PME ou pour celui qui accumule des CDD. Et nous savons aussi que
chacun aspire à notre époque à plus de libertés, liberté de choisir sa carrière
professionnelle, de changer de métier, liberté de créer, liberté
d’entreprendre, liberté de concilier sa vie professionnelle et sa vie
personnelle.
Les catégories traditionnelles qui ont structuré notre vie
sociale s’effritent. Frontière entre salariat et travail indépendant, rôle de
la loi et du contrat, répartition de la valeur. Tout cela est profondément
bouleversé par l’impact conjugué de la mondialisation et de la révolution
numérique.
Voilà pourquoi nous voulons rénover notre modèle social,
pour qu’il crée des protections véritablement efficaces au lieu de les garantir
seulement sur le papier. Pour qu’il accompagne celui qui veut prendre un
risque, au lieu d’être seulement tourné vers celui qui est déjà installé.
Dès le 6 juin dernier, j’ai défini avec la ministre du
Travail et nous avons partagé avec les partenaires sociaux la feuille de route
de cette rénovation sociale. Elle tient en quatre points : Renforcer le
dialogue social dans l’entreprise et dans les branches, redonner du pouvoir
d’achat aux actifs, sécuriser les parcours professionnels, rendre notre système
de retraite plus juste et plus lisible.
Nous voulons avancer vite, car l’urgence sociale est forte.
Mais nous avançons sans précipitation. Nous sommes encore dans le temps de la
concertation avec les partenaires sociaux. Cette semaine, commencera le temps
du débat parlementaire avec l’examen du projet de loi d’habilitation pour le
renforcement du dialogue social. A la fin de l’été, viendra le temps de la
décision, lorsque les ordonnances seront publiées.
Dès octobre, nous engagerons les chantiers du renforcement
de la formation professionnelle, de l’ouverture de l’assurance chômage aux
démissionnaires et aux travailleurs indépendants et de la refonte de
l’apprentissage. Nous aurons, là aussi, de vraies discussions avec les
partenaires sociaux et nous présenterons un projet de loi et un plan d’actions
au printemps 2018.
Nous appliquerons la même méthode à la rénovation de notre
système de retraite pour le rendre plus juste et plus transparent, pour qu’un
euro cotisé ouvre les mêmes droits pour tous. Nous prendrons le temps du
diagnostic, de la concertation et de la négociation et nous fixerons le cadre
de la réforme fin 2018.
Entre temps, nous aurons rendu du pouvoir d’achat aux
salariés, la suppression des cotisations salariales sur l’assurance maladie et
l’assurance chômage, financée par un transfert sur la CSG, redonnera, dès 2018,
du pouvoir d’achat à plus de 20 millions d’actifs. Cela représente, Mesdames et
Messieurs, 250 euros par an au niveau du SMIC, 250 euros par an au niveau du
SMIC. Nous augmenterons aussi la prime d’activité, car le message aux Français
est clair : le travail doit payer.
Le courage, enfin, c’est de faire face à la vérité sur notre
situation financière. Dès ma prise de fonction, j’ai voulu disposer d’une
vision nette de la situation de nos comptes publics. Le constat est
grave : 8 milliards d’euros de dépenses non financées, notre dette atteint
un niveau insupportable, 2 147 milliards d’euros. Chaque année, Mesdames
et Messieurs, chaque année, la France dépense 42 milliards d’euros pour
rembourser ses intérêts. 42 milliards, c’est plus que l’intégralité du budget
que nous consacrons à notre Défense nationale, c’est cinq fois le budget de la
Justice.
Cette dette nous met à la merci des marchés financiers, ce
qui a l’air de ne poser de problèmes à personne, dont les fluctuations décident
de plus en plus de notre avenir. Si une nouvelle crise survenait, nous
n’aurions plus de marges de manœuvre. Si les taux d’intérêts augmentaient d’un
point – ils augmenteront un jour – c’est l’équivalent du budget de
l’Enseignement supérieur qui partirait en fumée.
Pourtant, nous continuons à dépenser plus que nos recettes.
Je n’aime pas raisonner en pourcentage du PIB, 2,8-3,2, nous avons anesthésié
nos compatriotes à force de parler comme des comptables. Mais la vérité, c’est
que quand nos voisins Allemands prélèvent 100 euros en impôts et en dépensent
98, nous en prélevons 117 et en dépensons 125. Qui peut penser que cette
situation est durable ?
Mesdames et Messieurs, sous le regard inquiet des Français,
nous dansons sur un volcan qui gronde de plus en plus fort. Certains continuent
pourtant à nier l’évidence. « Combien de fois un homme peut-il tourner la
tête en prétendant qu’il ne voit pas ? » Aurait demandé le Prix Nobel
de Littérature de l’année 2017.
Il y a une addiction française à la dépense publique. Comme
toute addiction, elle ne règle rien du problème qu’elle est censée soulager.
Comme toute addiction, elle nécessitera de la volonté et du courage pour s’en
désintoxiquer.
*Mesdames et Messieurs les Députés, les Français ne croient
pas aux solutions simplistes. Qu’il s’agisse de la sortie de l’euro ou de l’annulation
de la dette. Ils voient bien que tous nos partenaires européens ont fait
l’effort de réduire leurs dépenses après la crise financière. Tous sauf nous.
Ils savent qu’il est indigne de demander à leurs enfants de rembourser demain
ce qu’eux-mêmes ne peuvent pas se payer aujourd’hui.
Mon objectif est de ramener le déficit sous la barre des 3 %
dès 2017 et de conduire notre stratégie de finances publiques autour de trois
règles simples : faire baisser la pression fiscale d’un point de PIB sur
cinq ans, faire baisser la dépense publique de 3 points de PIB sur la même
période, agir en donnant de la visibilité aux acteurs.
Je veux d’abord rassurer nos concitoyens : les
contribuables ne seront pas la variable d’ajustement du budget. Au contraire.
Au contraire. Au contraire, les prélèvements obligatoires baisseront de 20
milliards d’euros d’ici 2022. La France ne peut demeurer à la fois la
championne de la dépense publique et la championne des impôts.
S’agissant de la dépense publique, l’objectif du Gouvernement
est ambitieux, c’est de faire en sorte qu’elle soit stable, hors inflation en
2018 par rapport à 2017. Stable : on ne dépensera pas plus en 18 qu’en 17.
Tous les autres Etats l’ont fait. Depuis longtemps. Tous les autres Etats l’ont
fait depuis longtemps, voire ont baissé leurs dépenses. Mais cela n’a été fait
qu’une seule fois en France, et encore, il s’agissait de supprimer les
mécanismes conjoncturels de soutien qui avaient été institués pendant la crise.
Disons la vérité aux Français : pour atteindre ces
objectifs sur la dépense publique, il va falloir agir sur trois leviers.
D’abord, stopper l’inflation de la masse salariale du secteur public qui
représente le quart de nos dépenses publiques. Ensuite, si nous voulons
financer nos priorités et ne pas continuer à paupériser l’Etat, nous devrons
choisir et remettre en cause certaines missions, faire bien ce que nous devons
faire, arrêter de faire ce que d’autres font mieux que nous. Aucun ministère,
aucun opérateur, aucune niche fiscale ne sera sanctuarisé. Partout, nous
chasserons la dépense inefficace et le saupoudrage de crédits.
Enfin, repenser les politiques publiques qui pèsent sur nos
actifs, sans suffisamment de résultats. Nous dépensons deux fois plus que nos
voisins Européens dans l’aide au logement et les Français éprouvent toujours
autant de difficultés à se loger. Cet écart entre le niveau de dépenses et la
faiblesse des résultats, les Français le constatent également dans la politique
de l’emploi et de la formation professionnelle.
Mesdames et Messieurs, la France est dans les cordes et
aucune esquive ne nous sauvera. J’ai conscience d’appeler à l’effort et au
courage. Pour être entendu, il faudra agir de manière juste, transparente et
dans la durée, en donnant de la visibilité aux gestionnaires publics et aux
Français.
Dès cette semaine, le ministre de l’Action et des Comptes
publics réunira l’ensemble des administrations publiques, pour dessiner une
trajectoire et une méthode globale de redressement financier. La Conférence des
territoires permettra, pour sa part, d’approfondir la concertation avec les
collectivités territoriales.
Dès la rentrée, le Gouvernement présentera à la fois le
budget 2018 et une loi de programmation des finances publiques qui portera sur
la durée complète du quinquennat.
Cette trajectoire devra remettre la Sécurité sociale à
l’équilibre à l’horizon 2020. Nous devrons, d’ici là, définir de nouvelles
règles permettant de proscrire dans la durée le déficit de nos comptes sociaux.
Enfin, nous devrons préserver les équilibres de notre
système de retraite, tout en le rendant plus juste et plus lisible. Les
nouvelles prévisions du Conseil d’orientation des retraites nous y invitent
avec insistance, puisqu’elles indiquent que le retour à l’équilibre, un temps
prévu pour 2025, ne pourrait finalement intervenir qu’en 2040.
Pour atteindre ces objectifs, nous devons engager une
véritable transformation de l’Etat et de nos services publics.
Elle sera progressivement déclinée par ministère, en
plusieurs vagues, d’ici le printemps 2018, en associant les usagers, les agents
et, évidemment, les Parlementaires.
Nous mettrons évidemment le paquet sur la transformation
numérique. Fixons-nous un objectif simple : avoir des services publics
numériques de même qualité que ceux du secteur marchand. Pour ce faire, nous
mettrons en place une plateforme numérique et demanderons à chaque
administration d’y loger ses applications. Un « compte citoyen en ligne » sera
le nouveau lien entre les Français et leurs administrations. Certains diront
que c’est trop compliqué, trop ambitieux. J’étais, avec un certain nombre de
membres du Gouvernement, en Estonie la semaine dernière, eux l’ont fait. Il ne
me parait pas qu’il soit beaucoup plus agiles ou que nous soyons beaucoup moins
adroits.
Cette transformation de l’action passera aussi par une
confiance accrue accordée aux fonctionnaires et une modernisation de leur cadre
d’action. Je veux leur dire ma fierté de les diriger, mon respect et ma
reconnaissance.
Restaurer la confiance, prendre courageusement les décisions
que la situation impose, tout cela est nécessaire pour retrouver l’esprit de
conquête auquel nous appelle le Président de la République.
La France, Mesdames et Messieurs les Députés, la France doit
être à nouveau conquérante.
Dans le domaine économique d’abord. Depuis trop d’années,
nous nous résignons à ce que la France tourne au ralenti. Nous nous résignons
au chômage de masse. Notre économie ne produit pas assez de revenus, elle ne
crée pas assez d’emplois, elle ne donne pas assez de chances à nos enfants.
Au cours des années 2000, nous étions le premier pays
d’accueil des investissements étrangers en Europe continentale. Depuis 2010,
nous sommes derrière l’Allemagne. En termes d’exportations, nous sommes le seul
des grands pays de la Zone Euro à avoir une balance du commerce extérieur
déficitaire en 2016, alors qu’elle était bénéficiaire jusqu’au début des années
2000.
Surtout, l’économie française croît désormais
structurellement moins vite que la moyenne de la Zone Euro. Cela n’est pas
acceptable. Avec les réformes que nous vous proposons, nous voulons redevenir
les premiers, en termes d’attractivité, de croissance et de créations
d’emplois.
Une économie attractive, c’est une économie où les charges
ne viennent pas freiner le dynamisme de ceux qui créent de la richesse. Les
entreprises doivent retrouver l’envie de s’installer et de se développer sur
notre sol plutôt qu’ailleurs. J’annoncerai dans les tous prochains jours, avec
la maire de Paris et la présidente de la région Ile-de-France, des mesures
fortes pour améliorer l’attractivité de la place de Paris.
Pour favoriser l’embauche, nous baisserons le coût des
charges qui pèsent sur le travail, en particulier pour les salaires proches du
SMIC. Le CICE sera transformé en un allègement de charges qui seront nulles au
niveau du SMIC.
La réforme entrera en vigueur au 1er janvier 2019.
Le taux de l’impôt sur les sociétés sera réduit par étapes
de 33,3 % aujourd’hui à 25 % d’ici 2022. Il convergera ainsi vers la moyenne
européenne. La loi de finances pour 2018 précisera sa trajectoire de baisse
justement pour donner de la visibilité aux entreprises.
Nous voulons aussi alléger les contraintes qui pèsent sur
nos entrepreneurs, en particulier sur les indépendants et les TPE-PME. Des
mesures de simplification réglementaire seront prises et nous engagerons en
2018 la suppression du régime social des indépendants que nous adosserons au
régime général.
Une économie conquérante, c’est également une économie qui
investit dans l’avenir. Il faut donc réorienter l’épargne des Français vers
l’investissement productif. L’impôt de solidarité sur la fortune sera resserré
autour du seul patrimoine immobilier, afin d’encourager l’investissement dans
la croissance des entreprises. La réforme sera votée dès cette année, dans la
loi de finances pour 2018 et entrera en vigueur en 2019.
La réforme de la fiscalité du patrimoine sera complétée par
la mise en place d’un taux de prélèvement unique d’environ 30 % sur les revenus
de l’épargne. C’est simple, efficace et compétitif. La France se rapprochera
ainsi de la moyenne européenne.
Au final, Mesdames et Messieurs les Députés, vous le voyez,
l’ensemble de ces mesures fiscales sera voté dès cette année et engagé dans les
deux années qui viennent.
Une fiscalité au service de l’activité, c’est important,
mais investir dans les secteurs d’avenir, c’est encore plus décisif. C’est
pourquoi nous lancerons un grand plan d’investissement de 50 milliards
d’euros dans les domaines de la transition écologique, du développement, des
compétences, de la santé, des transports, de l’agriculture et de la
modernisation de l’Etat.
J’ai missionné Monsieur Pisani-Ferry pour le concevoir et
prévoir et préparer son déploiement. Une partie de cet investissement viendra
financer des réformes structurelles de notre économie et de la sphère publique.
On économise durablement d’un côté, on investit dans l’avenir de l’autre.
Investir dans l’avenir, c’est aussi soutenir notre industrie.
Je n’ai jamais été impressionné par ceux qui rêvaient d’une
industrie sans usines et jamais convaincu par ceux qui envisageaient une France
sans industrie mais la réalité est sombre. Derrière les succès réels de
certains, la désindustrialisation de notre tissu productif s’accélère. Pour
redresser la tête et redevenir conquérants, nous devons nous renforcer.
Certaines de nos filières, comme l’aéronautique, sont déjà
remarquablement intégrées à la pointe de la technologie mais nous avons
beaucoup d’entreprises industrielles, souvent de trop petite taille, souvent
trop isolées des groupes qui leur permettraient de s’épanouir. Nous devons donc
tisser un réseau industriel puissant de PME et d’ETI et accompagner son
développement à l’export.
Il nous reviendra aussi de tirer le plus grand parti
possible des opportunités ouvertes par la révolution numérique qui doit être
une chance pour tous : pour les entrepreneurs qui créent des start-up,
bien sûr, mais aussi pour les TPE-PME, pour ceux qui sont nés avec la
révolution digitale comme pour ceux qui en sont éloignés.
La révolution de l’intelligence artificielle est devant
nous, elle est en vérité déjà là et elle nous touchera tous, dans tous les
domaines de la production. Ceux qui font mine de l’ignorer seront les premiers
saisis par sa puissance. Nous devons nous y préparer pour faire une chance
disruptive et non la subir comme une fatalité destructive.
Le secrétaire d’Etat au Numérique me proposera dans les
trois mois une méthode permettant d’associer les meilleurs spécialistes de ce
domaine à la définition d’une stratégie nationale pour l’intelligence
artificielle.
Renouer avec l’esprit de conquête, c’est aussi embrasser
avec enthousiasme l’incroyable défi que posent les grandes transitions du
monde, au premier rang desquelles la transition écologique. Ceux qui, par
égoïsme ou inconscience, tournent le dos à l’Accord de Paris sur le climat
manifestent plus qu’une simple incompréhension du monde, ils montrent qu’au
fond, ils ont peur du futur.
L’autruche est sans doute un animal sympathique, Mesdames et
Messieurs les Députés, mais mettre sa tête dans le sable n’a jamais préparé
personne à affronter l’avenir. Il nous revient donc de préparer notre pays et
notre planète à cette nouvelle ère, de ne pas la subir mais de la façonner.
Tout a été écrit sur le sujet, depuis les remarquables livres de Jared Diamond
jusqu’au témoignage saisissant de ceux qui parcourent inlassablement la planète
pour éveiller les consciences.
Notre rapport aux ressources doit être profondément modifié.
Notre cap sera simple à formuler mais ambitieux et exigeant. Nous voulons
arriver à la neutralité carbone d’ici 2050. C’est pourquoi nous n’attribuerons
plus de nouveau permis d’exploration d’hydrocarbures. La convergence
diesel-essence sera atteinte avant la fin de la mandature. La montée en
puissance de la fiscalité carbone sera accélérée et nous diviserons par deux
les déchets mis en décharge et recyclerons 100 % des plastiques sur tout
le territoire d’ici 2025.
Nous partirons du principe simple qu’il est toujours
préférable de taxer la pollution plutôt que le travail et qu’avant de
sanctionner et d’interdire, il vaut mieux encourager et adapter.
Le temps des très grandes infrastructures de transport doit
céder la place à des politiques tournées vers de nouveaux modes de mobilité qui
associent les nouvelles technologies, le secteur public comme le secteur privé,
les micro-entreprises comme les champions nationaux. Les Assises de la mobilité
associeront dès la rentrée les usagers, les opérateurs, les collectivités, les
ONG pour orienter les investissements en faveur des déplacements quotidiens,
plus sûrs, qui désenclavent les territoires.
La loi d’orientation sur la mobilité préparera également
l’ouverture à la concurrence que nous ne devons pas redouter ni en France ni à
l’étranger. Nos opérateurs nationaux de transport sont déjà des champions à
l’international.
Autre domaine où une transition profonde s’impose, le
logement. Pour construire de nouveaux logements, une loi à l’automne
simplifiera les procédures, en particulier dans les bassins d’emplois les plus
dynamiques. Les procédures de permis de construire seront accélérées, les
recours abusifs sanctionnés. Au besoin et notamment dans les zones tendues, les
autorisations d’urbanisme seront transférées des communes aux intercommunalités
pour que les décisions de construire soient prises à l’échelle des bassins de
vie.
Dans les 10 ans, nous nous fixons aussi pour objectif
de supprimer les passoires thermiques, principales sources de gaspillage
énergétique, qui grèvent les budgets des ménages les plus modestes.
Etre conquérant face aux transformations du monde, voilà
bien enfin un principe qui s’applique à l’agriculture. La France a longtemps
été son agriculture. Par la puissance de sa production, par la marque sur notre
géographie, par l’importance qu’elle occupe dans notre imaginaire et dans notre
vie, l’agriculture française a fait bien plus que nourrir – et très bien
nourrir – les Français. Elle est aujourd’hui confrontée à de multiples
transformations : la pression sur le foncier agricole, la répartition
insatisfaisante de la valeur entre producteurs et distributeurs, la concurrence
étrangère, la multiplication des normes, la nécessité de préserver
l’environnement, la demande croissante de consommateurs pour des productions
nouvelles et de qualité.
Les agriculteurs français n’ont pas peur de s’adapter. Ils
veulent vivre de leur travail, de leur terre et de leurs compétences. Les Etats
généraux de l’alimentation reverront le partage de la valeur dans le modèle
agricole : il n’est pas admissible que des agriculteurs ne puissent pas se
verser un revenu décent et vivent sous le seuil de pauvreté. Ce n’est pas
admissible mais c’est courant. Ce doit aussi être notre combat pour la
Politique agricole commune de demain.
Ces Etats généraux devront conforter notre confiance en une
alimentation plus saine, penser et construire nos modèles futurs, notamment en
examinant sans faux-semblants la question des pesticides ou des perturbateurs
endocriniens.
Enfin vous permettrez à l’ancien maire du Havre que je suis
de rappeler que la France conquérante, celle que voulait François Ier au
début de la Renaissance française, était tournée vers la mer. La France
conquérante, ce doit être une France qui prend appui sur sa puissance maritime
pour créer de nouveaux emplois, notamment dans les filières des énergies
marines, et pour capter toujours plus de marchandises grâce à ses grands ports.
Une France conquérante, c’est enfin une France écoutée,
respectée et désirée. Je l’ai dit il y a quelques semaines, la France est de
retour et singulièrement en Europe. Nous le devons au président de la
République, et nous le devons aux Français qui ont adressé deux messages lors
des élections : ils sont attachés à la construction européenne et à
l’euro, ils veulent une Europe plus concrète, moins tatillonne et plus
protectrice.
L’agenda européen de ce gouvernement tient en trois idées.
D’abord, tout faire pour réconcilier les Français avec l’Union européenne.
Ensuite, œuvrer pour une Europe qui protège, une Europe qui pourra s’appuyer
sur une zone euro mieux gouvernée, qui saura faire progresser sa politique de
défense, la convergence sociale et notamment la réglementation des travailleurs
détachés, une politique commerciale de réciprocité, sans naïveté. Enfin
préparer les trois négociations cruciales pour l’avenir de l’Union : la
redéfinition de notre projet à 27 avec l’Allemagne et avec ceux de nos
partenaires qui voudront aller de l’avant, la conduite d’une négociation
ordonnée de sortie du Royaume-Uni comme préalable au cadre de la relation
future, les perspectives financières pour l’avenir des politiques de l’Union
après 2020.
Enfin le Président de la République a rappelé hier que nous
ne concevons pas le redressement de notre pays sans une politique
internationale qui rende à la France son statut de puissance d’influence
mondiale.
L’esprit de conquête, c’est aussi être capable d’attirer à
nous l’intelligence de demain en accueillant toujours plus d’étudiants du monde
entier pour enrichir et diffuser nos techniques, notre langue, notre
identité ; c’est attirer toujours plus de richesses grâce à notre offre
touristique qui constitue un atout économique majeur ; c’est montrer au
monde qui nous sommes en organisant les grands événements pendant lesquels la
planète nous regardera : la candidature de Paris aux Jeux
Olympiques 2024 a mobilisé la France entière autour du sport et de ses
valeurs, l’accueil de ces JO offrira, je l’espère, une chance unique de
renforcer la place de Paris et la place de la France au premier rang mondial.
Soyons conquérants ! L’évolution du monde donne toutes
ses chances à la France parce que ce nouveau monde a besoin de science et de
raison, d’ordre et de loi, de technologies et de culture, de dialogue et de
solidarité et que la France, c’est tout cela !
Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les Députés,
Je ne crois pas à l’omnipotence du politique mais je ne
crois certainement pas à son impuissance. Je vous l’ai dit au début de mon
propos, et votre Assemblée en est la preuve par sa composition, les bonnes
politiques publiques permettent de changer la vie des Français. C’est long,
c’est lent, c’est difficile, mais pour reprendre les mots de Simone VEIL, j’ai
confiance dans notre capacité à progresser.
Je sais ce que peut la volonté politique quand elle a le
soutien de la représentation nationale et de la majorité du peuple français.
J’ai cette volonté, l’ensemble de l’équipe gouvernementale
la partage. Elle travaille avec une méthode, celle de l’efficacité, du dialogue
et de la collégialité. Cette méthode de travail, le gouvernement la propose aux
législateurs que vous êtes en y ajoutant le respect et l’exigence de vérité.
J’ai siégé sur ces bancs, je l’ai dit, et je suis trop attaché au rôle et aux
prérogatives du Parlement pour qu’il en aille autrement.
Œuvrons ensemble pour qu’à la fin de ce quinquennat, la
France ait atteint le cap fixé par le président de la République et que la
France ne regrette pas d’avoir choisi l’optimisme et la confiance.
Travaillons pour que le chômage reflue, que les territoires
ruraux continuent à vivre, que les quartiers libèrent leurs énergies, notamment
grâce au dispositif des emplois francs, que les expatriés reviennent, que les
entrepreneurs innovent, investissent et créent des emplois. Travaillons pour
que le mérite soit récompensé. Travaillons pour que nos compatriotes vivent
mieux. Aucun des défis de la modernité ne doit nous effrayer. L’espoir qui
s’est levé fonde notre responsabilité. C’est à cet espoir, Mesdames et
Messieurs les Députés, que je vous demande d’accorder votre confiance et c’est
la raison pour laquelle, Monsieur le Président, conformément aux dispositions
de l’article 49-1 de notre Constitution, j’ai l’honneur d’engager la
responsabilité du gouvernement sur la déclaration présente de politique
générale.
Réactions des groupes
centristes au discours d’Edouard Philippe
- Richard Ferrand pour le groupe La République en marche.
Monsieur le président, monsieur le
Premier ministre, mesdames et messieurs les ministres, chers collègues,
citoyennes et citoyens qui assistez à ce débat, le Président de la République a réservé à la représentation
nationale sa première grande expression politique depuis son élection, dans le
droit fil de la Ve République. C’est pour nous, parlementaires, une
véritable marque de respect.
Le Président de la
République a fixé hier l’objectif de son quinquennat, développé les principes
de son action et indiqué la marche qu’il entendait suivre. Les récents résultats
électoraux nous ont bien démontré que les Français ne voulaient plus de la
façon de voir et de faire la politique qui avait prévalu jusqu’ici.
Le
Premier ministre a montré qu’il partageait ce diagnostic. C’est pourquoi
il nous appartient ici de développer nos principes d’action, de construire et
de faire vivre une manière plus efficace de travailler, ici même, à l’Assemblée
nationale.
Nous devons d’abord et avant tout rétablir le lien avec nos
concitoyens, qui nous ont donné un mandat de confiance et d’exigence, et
renforcer l’efficacité de l’action publique pour obtenir enfin les résultats
que les Français appellent de leurs vœux. C’est cette efficacité qui nous
incombe.
Le Président de la République a présenté hier les grands
traits des réformes institutionnelles que nous avons défendues lors de notre
campagne législative. Avec vous, monsieur le Premier ministre, et
avec votre gouvernement, nous devons sans délai nous atteler à la tâche.
Monsieur le Premier ministre, là où le Président a
dessiné, hier, les contours de l’action de l’exécutif, vous venez de remplir
les formes pour nous livrer une image plus complète. Vous venez de donner la
méthode pour porter le sens, dire la vérité, travailler avec toutes les femmes
et tous les hommes de bonne volonté et obtenir rapidement des résultats.
Vous nous avez fait part des axes concrets qui mettront du
fil à notre ouvrage, ainsi que du rythme des réformes qui permettront au pays,
dans cinq ans, d’être plus prospère, plus solidaire et plus juste. Hier, je
disais au Congrès qu’il fallait nous mettre au travail sans attendre et dès
aujourd’hui, en chef d’orchestre, vous déclinez les missions qui répondront à
cette volonté collective de retour d’une France conquérante. Déjà au travail,
nous voilà bien inscrits dans le registre de cette efficacité que nous prônons.
Vous avez mis en exergue des mots d’ordre qui se traduisent
par des mesures tangibles : restaurer la confiance par une justice plus
indépendante, plus rapide et plus effective
et par une Sécurité sociale à nouveau viable, en faisant de la prévention
un pivot de la stratégie nationale de santé ; libérer les médecins des
charges administratives, construire avec eux un parcours de soins qui
garantisse un égal accès à tous, notamment en luttant contre les déserts
médicaux et le renoncement à se soigner.
Restaurer la confiance, c’est aussi réaffirmer le lien entre
l’État et les territoires en osant l’expérimentation qui permet d’adapter la
norme aux spécificités régionales ; c’est supprimer la taxe d’habitation,
aujourd’hui injuste et obsolète pour l’immense majorité des Français – en
discutant évidemment avec tous les territoires de métropole et d’outre-mer.
Monsieur le Premier ministre, vous avez aussi
parlé de courage. Il nous en faudra et vous en trouverez au sein de cette
Assemblée : courage pour lutter contre le terrorisme, pour faire face au
défi migratoire avec responsabilité et générosité, courage pour rénover notre
modèle social devenu inégalitaire, bouleversé par la mondialisation et la
révolution numérique, courage pour rétablir notre situation financière et ainsi
notre capacité d’investissement et donc notre indépendance !
Enfin, vous avez dit que vous vouliez une France conquérante
dans le domaine économique mais également écologique, agricole et numérique,
domaines où tant d’opportunités sont à saisir.
Ces orientations concrètes que vous avez proposées ont reçu
à l’instant un accueil extrêmement chaleureux qui s’accompagnera tout à
l’heure, je le sais, d’un soutien plein et entier. (Applaudissements sur les
bancs des groupes REM et MODEM). Car bien sûr, nous débattrons des moyens, nous
explorerons les solutions et les méthodes, nous les affinerons, les
enrichirons. Mais nous ne différons pas quant au but : faire renaître
l’espérance et le goût de l’avenir, ne jamais renoncer à la justice sociale et
redonner à tous nos concitoyens la fierté d’être Français.
C’est pourquoi la majorité travaillera de toutes ses forces
avec vous et avec votre gouvernement, monsieur le Premier ministre,
avec bienveillance et exigence, dans
une logique de co-construction, au service de la nation.
Co-construire, cela signifie que nous trouvions ensemble,
très en amont, les solutions les plus adaptées, sans présupposé et sans que les
propositions des parlementaires soient vécues comme une marque d’hostilité
– bien au contraire.
Les défis auxquels nous faisons face aujourd’hui sont
immenses et c’est pourquoi nous devons y répondre collectivement :
Gouvernement, élus mais également chaque citoyen et chaque citoyenne. Toutes
les forces vives de la nation doivent être à l’œuvre.
Les Françaises et les Français ont exprimé sans détour leur
lassitude envers une certaine manière de penser et de faire de la politique,
une politique qui se drape parfois dans de beaux principes et de hautes valeurs
mais qui ne produit pas assez de résultats. « Le kantisme a les mains
pures, mais il n’a pas de mains », disait Charles Péguy ! À ce
propos, nos concitoyens ont été clairs : il n’est plus question
d’obligation de moyens mais d’obligation de résultats, qu’ils veulent voir vite
et de manière tangible
Les Français ont aussi exprimé leur lassitude envers une
politique qui n’a pas su se réinventer et qui, depuis des générations,
reproduit un modèle qui ne les satisfait pas, voire même qui les détourne de la
vie publique, ce qui est une souffrance pour la démocratie. Nos concitoyens se
sont donc mobilisés pour nous dire leur soif de renouvellement mais aussi leur
envie de se voir proposer un autre paradigme : celui de l’avenir, du
possible, du projet, du mouvement. Sachons les écouter – et votre propos,
monsieur le Premier ministre, démontre que vous avez su le faire.
Comme mes collègues, j’ai la conviction que les
incantations, les débats stériles, les sièges vides, les joutes rhétoriques,
les pétitions de principe et autres pluies de truismes nuiront à la crédibilité
de ceux qui en usent. (Mêmes mouvements.) Il nous faudra retrouver ensemble la
valeur ajoutée du travail parlementaire : ceci vaut tout autant pour la
majorité que pour les oppositions. Les Français n’attendent pas de nous un
panurgisme majoritaire, pas plus qu’ils n’attendent de l’obstruction surjouée.
Par leur vote, les Français ont aussi témoigné qu’ils ne
veulent plus de demi-mesures, d’ajustements à la marge, de rafistolages, mais
qu’ils souhaitent une transformation réelle et profonde de notre système
économique et social pour reprendre ensemble le chemin du progrès. Cette
transformation, mes chers collègues, embrassons-la !
Enfin, au cours des derniers mois, nos concitoyens ont
témoigné de leur volonté de s’impliquer dans la construction des politiques
publiques qui les concernent directement et ont montré combien ils pouvaient
être force de proposition pour trouver collectivement des solutions aux
problèmes quotidiens. Alors, consultons-les !
Monsieur le Premier ministre, vous venez d’expliquer
comment vous comptiez mettre œuvre le projet du Président de la République et
conduire la politique de la nation. Agir concrètement, donner des inspirations
nouvelles aux projets de nos concitoyens est le seul antidote au
« dégagisme » comme aux conservatismes frileux. Ni l’un ni l’autre
n’offrent de perspective. Si j’en comprends les ressorts – tantôt
l’exaspération, tantôt la peur de l’avenir – c’est seulement la pertinence
et les effets de notre travail qui, demain, pourront être l’alternative à toutes
les impasses.
C’est pourquoi nous avons voulu en premier lieu, au sein
même de notre Assemblée, un renouvellement sans précédent des visages. Vous
l’avez remarqué, monsieur le Premier ministre, et je vous en
remercie : notre groupe donne enfin une juste place aux femmes, qui représentent
49 % de nos députés!
Notre groupe
accueille 91 % de nouveaux députés, dont la majorité commence leur tout
premier mandat électif. Avec 45 ans en moyenne, soit quatorze ans de moins
que la moyenne d’âge prévalant sous la précédente législature, nos députés
apportent un souffle nouveau, des idées neuves et la pratique d’un monde qui, en quelques décennies, a connu
des transformations radicales.
Mais être neuf, en politique, c’est d’abord avoir vécu des
parcours variés dont vous avez cité plusieurs parmi les plus singuliers et les
plus audacieux, monsieur le Premier ministre. C’est aussi bénéficier
d’une multitude de talents et d’expériences professionnelles qui dotent les
membres de notre majorité d’une connaissance réelle des attentes de nos
concitoyens
Mais, comme sur tous les bancs, les membres de notre
majorité sont par-dessus tout des citoyens engagés, partageant des valeurs et
forts d’un projet commun. Ils sont toutes et tous prêts à se retrousser les
manches pour faire avancer le pays, monsieur le Premier ministre.
Notre intelligence
collective doit permettre de remettre la France sur les rails du progrès pour
tous. Cette nouvelle énergie qui vous portera, monsieur le
Premier ministre, vous et votre gouvernement l’avez dans votre majorité et
vous pouvez compter sur elle. Garder le lien avec le « terrain »,
comme on dit, est au centre du projet de La République en marche et restera toujours
au cœur de notre action. Les députés de la majorité s’inscrivent dans cette
démarche de proximité en gardant un lien privilégié avec celles et ceux qui
leur ont confié leur mandat.
C’est pourquoi nos députés, au-delà du travail législatif au
sein de cette Assemblée, animeront et feront vivre régulièrement des ateliers
citoyens sur leur territoire, en lien avec l’activité législative.
Nous continuerons également à consulter régulièrement les
citoyens en usant de tous les outils à notre disposition. Cette démarche
permettra à la fois de recueillir les interrogations, les idées, les critiques et sera également le moyen de faire vivre
le débat public hors des échéances électorales car, pour citer Pierre Mendès
France, « la démocratie n’est efficace que si elle existe partout et en
tout temps »
Dans notre travail quotidien, cessons les postures et les
querelles de chapelle et mettons nos idées à l’épreuve de la réalité pour
s’assurer qu’elles produiront les résultats escomptés. Reprenons à notre compte
un certain nombre des principes qui ont été énoncés hier.
L’efficacité, tout d’abord : légiférons moins, pour
légiférer mieux et pouvoir ainsi consacrer davantage de temps aux textes
fondamentaux. Répartissons différemment notre temps pour en donner davantage au
contrôle et à l’évaluation des politiques publiques. Cette démarche est
fondatrice pour garantir un effet réel à notre action et éviter la
prolifération des textes.
La proposition du Président de la République de réduire d’un
tiers le nombre des membres des trois assemblées constitutionnelles s’inscrit
également dans cette logique, et l’enjeu est bien de rehausser le rôle de la
représentation nationale. D’autres mesures ont été avancées, mais ces
propositions, du fait de l’intérêt qu’elles présentent, devront être étudiées
avec une attention particulière. Nous accomplirons ce travail, mais sans nous
limiter à cela, car l’imagination aussi a sa place ici, à l’Assemblée
nationale !
L’instauration pour les élections législatives d’une dose de
proportionnelle, conjuguée avec une limitation dans le temps du cumul des
mandats, permettra à la pluralité des opinions d’être mieux représentée et
élargira l’accès aux fonctions électives. Mais le renouvellement n’est pas une
finalité en soi. L’enjeu est de répondre à la demande des Français d’une
transformation tangible de notre modèle. Et cette mission, c’est sans attendre
que nous devons commencer à la remplir. C’est ainsi que s’ouvre aujourd’hui une
session extraordinaire dont l’ordre du jour témoigne à la fois des changements
que nous voulons opérer et de notre volonté de réaliser dès à présent les
projets qui ont été portés par le Président de la République et déclinés par le
Premier ministre dans son programme du gouvernement.
Il s’agit tout d’abord de restaurer la confiance. Monsieur
le Premier ministre, vous en avez fait l’un des maîtres mots de votre discours,
et nous vous accompagnerons dans cette démarche. La réforme de la justice sera
primordiale, car une justice forte, fiable, efficace et indépendante est une
condition sine qua non de la confiance. La loi quinquennale de programmation
des moyens de la justice, qui nous sera présentée en 2018, devra nous permettre
de satisfaire cette nécessité.
Autre chantier : l’indispensable revitalisation de
notre économie.
Monsieur le Premier
ministre, vous nous avez exposé la manière dont le Gouvernement entend rétablir
notre situation financière, et la méthode qu’il compte adopter pour y
parvenir : réduire la pression fiscale qui pèse sur nos concitoyens, faire
baisser la dépense publique, qui est bien plus élevée chez nous que dans la
plupart des autres pays européens, et donner de la visibilité, à moyen terme, à
l’ensemble des acteurs.
Cet enjeu est absolument décisif pour la bonne marche de
notre économie. Il doit nous permettre de retrouver des marges de manœuvre pour
investir, développer et rénover nos infrastructures, accompagner celles et ceux
qui en ont le plus besoin et retrouver notre crédibilité vis-à-vis de nos
partenaires européens – condition absolument nécessaire à la relance du
projet européen. Pour cela, nous devons concentrer nos dépenses sur nos
priorités, là où l’action publique a une réelle valeur ajoutée, et repenser nos
politiques publiques. En tant que parlementaires, nous aurons un rôle majeur à
jouer dans cette démarche. Et cela commence dès maintenant.
L’examen du projet de loi de règlement, qui arrête le
montant définitif des dépenses et des recettes de l’État, sera l’occasion de
trouver toutes les sources d’efficience inexploitées et les économies
potentielles. Avec ses annexes, et notamment le rapport annuel de performance,
nous nous efforcerons de mesurer précisément la performance des dépenses
publiques, en évaluant l’utilisation des crédits budgétaires au regard des
objectifs fixés. Nous mènerons ensuite le débat d’orientation des finances
publiques au cours duquel votre gouvernement nous présentera un rapport sur
l’évolution de l’économie nationale et sur les orientations des finances
publiques. Cela nous permettra de préciser la stratégie du Gouvernement en
matière de réduction des dépenses et de préparer l’examen du projet de loi de
finances à l’automne. Enfin, nous inscrirons cette volonté de rétablissement de
la situation financière française dans le long terme, avec une loi de
programmation des finances publiques.
Pour assurer la sécurité des Françaises et des Français,
notre action se déroulera en plusieurs étapes. Le Gouvernement souhaite d’abord
prolonger une dernière fois, jusqu’au 1er novembre, l’état d’urgence mis
en place au soir des attentats du 13 novembre 2015. Nous partageons
cette décision. La loi de programmation militaire, qui nous sera soumise en
2018, devra, quant à elle, donner enfin à notre pays les moyens de se défendre parfaitement,
en portant à 2 % du PIB l’effort de défense.
La lutte contre le chômage et la rénovation de notre modèle
social constituent un autre axe fondamental. Incapable d’assurer l’égalité
entre les citoyens et entre les entreprises, notre modèle social est aujourd’hui
inadapté face aux bouleversements que connaît notre économie. Le projet de loi
d’habilitation à prendre par ordonnances les mesures pour le renforcement du
dialogue social posera la première pierre de ce chantier.
Durant la campagne présidentielle et celle des législatives,
nous avons été extrêmement clairs et transparents concernant l’utilisation
d’ordonnances. Depuis le début, nous avons expliqué que nous y aurions recours
afin de nous attaquer sans tarder au chômage de masse qui mine notre pays depuis
trente ans. Les ordonnances nous permettront de légiférer vite et efficacement,
tout en garantissant les concertations qui s’imposent avec les représentants
des salariés comme avec ceux du monde de l’entreprise.
Agir vite : c’est ce qu’attendent de nous les
Françaises et les Français. Nous examinerons donc ce texte pour permettre à
votre gouvernement, monsieur le Premier ministre, de prendre des ordonnances
visant à renforcer et simplifier le dialogue social, tant dans l’entreprise que
dans la branche, et à sécuriser les relations de travail, tant pour les
employeurs que pour les salariés.
Il permettra aussi
au Gouvernement de modifier le compte pénibilité pour le rendre plus adapté,
plus applicable et donc plus efficace.
Cette loi fait écho
au diptyque que nous portons depuis des mois : libérer et protéger. Libérer
les entreprises pour les soustraire à des contraintes qui pénalisent leur
activité, augmenter leur compétitivité en leur donnant plus de souplesse, et
leur permettre d’embaucher plus aisément
mais toujours en protégeant les salariés, en améliorant le fonctionnement du
dialogue social et leurs conditions de travail, ainsi qu’en renforçant leurs
droits. Nous devons construire de nouvelles solidarités collectives, ainsi que
de nouvelles sécurités individuelles, qui soient attachées aux parcours, et non
aux statuts.
Nous devrons aussi renforcer la formation professionnelle et
l’apprentissage et redonner du pouvoir d’achat aux salariés en baissant les
cotisations. Ces mesures devront être portées par le projet de loi à venir au
printemps 2018.
Un autre message clair que nous pouvons tirer, et que nous
devons entendre, des récentes élections est celui de l’existence d’une fracture
entre les territoires. Ne faisons pas abstraction de ces inégalités qui minent
la cohésion nationale. Les politiques du logement, de la ville et de
l’aménagement des territoires doivent obtenir des résultats tangibles, qui
démontrent à nos concitoyens qu’aucun territoire de la République n’est
délaissé. Nous devons discuter davantage avec nos collectivités, dans une
logique concertée, et leur permettre d’expérimenter ; nous devons
comprendre les spécificités de chacune d’entre elles. La conférence des
territoires comme les assises de l’outre-mer nous en fourniront collectivement
l’occasion.
Monsieur le Premier ministre, les Françaises et les Français
ont exprimé clairement leurs inquiétudes, leurs attentes et leurs espérances.
Il vous appartient maintenant, en première ligne, de répondre à leurs
aspirations. Je sais que vous le ferez à la tête d’un gouvernement compétent et
engagé, lui aussi paritaire, et divers par les origines professionnelles et
politiques de ses membres, symbole du dépassement des clivages que nous
appelons de nos vœux pour rassembler dans l’efficacité.
Sachez, monsieur le Premier ministre, que vous trouverez à
vos côtés le groupe majoritaire, que je suis fier de présider, pour donner vie
à ce programme et en construire, ensemble, l’application concrète.
Monsieur le Premier
ministre, vous êtes Normand, je suis Breton. Nous savons tous deux ce que naviguer
veut dire, que la mer soit calme, agitée ou que gronde la tempête. Notre cap
est clair, il a été fixé hier par le Président de la République. Vous venez,
devant nous, de tracer la route pour vous assurer du succès de notre engagement
au long cours. Votre équipage est prêt à faire face aux vents grossissants, et
peut-être aux courants contraires. Notre
espérance n’est pas celle d’un long fleuve tranquille ; notre espérance
rejoint celle des explorateurs d’un nouveau monde, que nous voulons conquérir
et aborder au service de notre pays.
Monsieur
le président, monsieur le Premier ministre, mesdames et messieurs les
ministres, chers collègues, « la France se sait un futur, mais elle ne se
voit pas d’avenir » disait Pierre Nora. À nous d’ouvrir les voies d’un
avenir meilleur pour notre pays. Monsieur le Premier ministre, c’est avec cette
volonté chevillée au corps que nous voterons la confiance à votre gouvernement.
- Marc Fesneau, pour
le groupe du Mouvement Démocrate et apparentés.
Monsieur le président, monsieur le
Premier ministre, mesdames et messieurs les ministres, mes chers collègues,
avec l’élection du Président de la République et de l’assemblée que nous
constituons, les Français ont fait le choix d’une alternance véritable et d’un
bouleversement du paysage politique que nous connaissions depuis des décennies.
Ce bouleversement n’est pas le fruit du hasard, mais la
conséquence directe d’années d’échecs, de promesses non tenues, d’incapacité à
conduire les réformes profondes que le pays attendait. Finalement, ce choix
nous oblige tous.
Monsieur le Premier ministre, le gouvernement que vous
conduisez s’inscrit pleinement dans cette volonté de recomposition de notre vie
politique à laquelle vous avez pris toute votre part en dépassant les clivages
stériles, artificiels et finalement inefficaces.
Nous siégeons ici avec la modestie de ceux qui
connaissent – pour en avoir été témoins – les échecs du passé,
et avec l’ambition ferme, monsieur le Premier ministre, de ceux qui entendent
rompre avec le mal français des alternances inutiles, des rendez-vous manqués
et des espoirs déçus.
Un mot, à ce stade, de la recomposition politique à
l’œuvre : j’entendais avec un peu d’étonnement hier, lors du Congrès,
certains de nos collègues parlementaires douter de son efficacité ou de sa
lisibilité. Dépasser les clivages anciens – ce ne sont pas là des mots creux –,
ce n’est pas renoncer aux différences ni affadir les débats. C’est rassembler
ceux qui, sur les grands enjeux essentiels, pensent, depuis bien longtemps, la
même chose et qu’une bipolarisation artificielle avait jusque-là séparés et
empêchés de travailler ensemble. C’est au contraire, en définitive, apporter de
la clarté et constituer la majorité et les oppositions autour des véritables
lignes de fracture qui existent entre nous.
Alors, monsieur le président Olivier Faure, je ne sais pas
si la politique qui va être menée sera de droite et de gauche : vous
l’appellerez comme vous voudrez, selon les schémas anciens que vous reprenez et
dans lesquels les Français ne reconnaissent plus.
Cette politique est en tout cas au service de la France et
de son redressement : c’est bien cela, et uniquement cela, qui compte. Il
y a un cap clair, tracé à partir d’un constat et d’ambitions partagées par la
majorité et par le gouvernement, il y a un contrat avec la nation. De ce point
de vue, si l’on se réfère à l’histoire politique récente, il s’agit d’une
nouveauté.
Monsieur le Premier ministre, la première tâche de votre
gouvernement et de cette nouvelle assemblée est de retrouver la confiance de
nos concitoyens. Cette confiance sera rétablie à deux conditions. La première
est de modifier nos pratiques et notre rapport à la démocratie. C’est tout le sens
de notre soutien au projet de loi pour la confiance dans notre vie démocratique
qui sera débattu prochainement et auquel nous sommes très attachés.
Cela va de pair avec la réforme institutionnelle évoquée
hier par le Président de la République : meilleure représentativité des
grands courants de la vie politique, réduction du nombre des parlementaires
avec, en corollaire, un renforcement de leurs moyens car il ne faudrait pas
céder à la démagogie et à l’ambiance inquisitoriale du moment, amélioration des
procédures. Tout cela va dans le bon sens.
La deuxième condition a trait à la méthode et à l’état
d’esprit tant de notre action parlementaire que de votre gouvernement, monsieur
le Premier ministre, avec une nouvelle alliance de la loi et du contrat, du dialogue
et du respect, le refus de l’anathème. En résumé, il s’agit d’une stratégie du
dépassement des antagonismes que nous connaissions.
Mais rétablir la confiance n’est pas seulement affaire
d’institutions ni de méthode. En effet, rétablir la confiance, c’est aussi
croire en notre économie, en nos entreprises et en leur faculté à assurer la
prospérité de notre pays et de nos concitoyens. C’est également réconcilier la
France avec ses entrepreneurs et porter sur eux un regard autre que convenu et,
disons le, tellement caricatural ; c’est conjuguer compétitivité et
justice sociale en soulignant l’indivisibilité des enjeux économiques et
sociaux. Il faut libérer l’activité en permettant à ceux qui peuvent et qui
veulent entreprendre de pouvoir le faire, leur donner de l’autonomie, de la
liberté et même la possibilité d’échouer car c’est à ce prix-là que l’on leur
offre aussi la possibilité de réussir. C’est pourquoi nous vous soutiendrons
lors de l’examen du projet loi sur le renforcement du dialogue social comme de
l’ensemble des réformes qui, dans les mois à venir, consolideront ce texte pour
lutter résolument contre le chômage.
Au-delà des postures d’appareil, essayons, sans dogmatisme
ni idéologie, de voir ce qui fonctionne, ce qui ne marche pas ou ne marche plus.
Rétablir la confiance, c’est aussi rétablir l’équilibre de
nos comptes publics. Il faut le faire vis-à-vis de nos financeurs bien sûr, de
nos partenaires européens bien évidemment, mais peut-être en premier lieu, et
sur le fond, vis-à-vis des générations futures car il y va de leur confiance.
Comment trouverions-nous en effet le moindre crédit politique auprès des jeunes
générations si on ne leur offre comme seule perspective que le remboursement de
dettes dont elles ne sont pas comptables ? Cette dette-là, comme la dette
écologique, est terrible parce que, si elle n’est pas apurée, elle privera ceux
qui nous succéderont de toute capacité à agir et, en définitive, de tout espoir
– la dette écologique les privant, elle, tout simplement de la possibilité
de vivre.
Régler la question de la dette n’est donc pas une question
comptable : c’est d’abord, et avant tout, une question morale vis-à-vis
des Français et en particulier des plus jeunes d’entre eux. Dans la droite
ligne de nos engagements anciens, nous soutiendrons donc toutes les initiatives
que vous avez, monsieur le Premier ministre, annoncées pour remettre de l’ordre
et de la cohérence dans nos finances publiques.
Nous devrons le faire tout en gardant le cap des engagements
pris devant les Français, notamment sur le pouvoir d’achat et les
investissements publics, par exemple dans le domaine de la transition
énergétique. Monsieur le Premier ministre, je vous remercie d’avoir tout à
l’heure réaffirmé le cap des réformes.
Rétablir la confiance, c’est aussi s’adresser aux Français
de tous les territoires. Élu, comme nombre d’entre nous, d’un territoire à la
fois urbain et rural, j’assume cette complémentarité et en suis fier. Je
n’oppose pas les deux et mets en garde contre la tentation de le faire.
Veillons à ce que ne se construisent pas deux France que leur fonctionnement
rendrait irréconciliables : une France pleinement partie prenante de la
mondialisation et une France rurale, mais aussi urbaine, qui se verrait
cantonnée au seul rôle de spectatrice du monde.
Pour ces territoires, la puissance publique, dans des formes
qu’il nous faudra renouveler, devra s’exercer pleinement. L’on n’imagine jamais
assez le sentiment terrible de déclassement que ressentent les habitants d’un
village ou d’un quartier lorsqu’ils voient leur dernier médecin partir, leur
école fermer ou leur dernier commerce disparaître.
Nous avons, parallèlement, besoin de redonner à chaque
territoire sa fierté en lui donnant un rôle, j’allais dire une vocation, dans
la production de richesses nationales. L’identité d’un territoire tient en
effet à son identité économique, aux savoir-faire de ses ouvriers, de tous ses
salariés et de tous ses entrepreneurs. Les potentialités offertes par les
technologies du futur, par les défis énergétiques et alimentaires ainsi que par
l’émergence d’une nouvelle économie sont autant d’opportunités à saisir pour
peu que nous ayons une véritable stratégie économique territoriale et une
politique cohérente d’aménagement du territoire.
Rétablir la confiance, c’est enfin retrouver et redonner du
sens à notre destin européen. Parler d’Europe c’est en effet, comme vous l’avez
rappelé, monsieur le Premier ministre, parler du destin de la France.
Nous ne sous-estimons pas les imperfections du système
européen, en particulier la question de sa légitimité démocratique, qui doit
être renforcée. Si elle veut retrouver son crédit auprès des peuples, l’Europe
doit se saisir principalement des sujets qui justifient d’une stratégie et
d’une politique européennes. Grandes politiques industrielles, sécurité
commune, climat, défense européenne, convergence économique et sociale :
tels sont les enjeux à inscrire d’urgence à l’agenda européen.
Monsieur le Premier ministre, j’aurais voulu vous parler
d’éducation et de culture, parce que la société que nous avons à construire
procède, en premier lieu, de cela. J’aurais également voulu vous parler de
santé et de solidarité, car il s’agit là à la fois d’un défi et d’un devoir
envers les plus fragiles. Nous aurons l’occasion, au cours des travaux
parlementaires, de nous retrouver sur ces sujets, mais sachez que notre groupe
sera pleinement actif et investi sur ces thématiques essentielles.
Monsieur le Premier ministre, la confiance que le groupe du
Mouvement Démocrate et apparentés s’apprête à voter à votre gouvernement est
forte. Elle est loyale, elle est exigeante, tant les défis sont nombreux. Elle
est forte de tous les espoirs que portent les Français pour que notre pays
retrouve fierté et optimisme : c’est aussi, d’une certaine façon, en leur
nom que nous allons voter en ce sens.
- Stéphane Demilly pour le groupe Les Constructifs-UDI
Monsieur le président, monsieur le Premier ministre,
mesdames et messieurs les membres du Gouvernement, chers collègues, je
souhaite, dans un premier temps, monsieur le Premier ministre, au nom de mon
groupe, vous adresser nos sincères félicitations pour votre nomination comme
Premier ministre de la France. Nous vous souhaitons, dans l’intérêt de notre
pays et de nos concitoyens, une pleine réussite.
Mon propos s’articulera autour des trois idées fortes qui
ont présidé à la création de notre groupe parlementaire composé d’élus de la
droite et du centre : d’abord, le souhait d’être constructif, ensuite, la
liberté de penser, enfin, le discours de la vérité.
De tous les actes politiques, le plus complet est
effectivement d’abord celui de construire. Le progrès ne peut pas être
hémiplégique : essayons, dès lors, de construire tous ensemble un présent
dont nous serons fiers demain.
Benjamin Disraeli disait : « Nul gouvernement ne
peut être longtemps solide sans une redoutable opposition ». Cette
opposition doit donc être respectée – ce que l’on oublie parfois quand il
y a une majorité très large – mais elle doit aussi, pour être profitable
au pays, être intelligente.
Je pense comme contre-exemple à ceux qui se sont toujours
opposés aux réformes des retraites. Où en serions-nous aujourd’hui si nous les
avions écoutés ? Je pense aussi, bien entendu, à ceux qui se sont opposés
avec une rare violence dans cet hémicycle à la loi Veil sur l’avortement.
Avec le recul, on voit bien que l’opposition systématique,
arrogante et ne se complaisant que dans des rapports de force, est absurde et
même dangereuse : rien n’est en effet plus rare que le discernement dans
la négation. Être toujours négatif, suspicieux et méprisant n’est pas et n’a
jamais été un moteur de progrès ! Les tenants d’une opposition de principe
devraient d’ailleurs méditer cette pensée selon laquelle toute vérité franchit
en général trois étapes : elle est d’abord ridiculisée, puis fait l’objet
d’une vive opposition, et, enfin, est considérée comme ayant toujours été une
évidence.
Dans notre groupe parlementaire, qui se veut un laboratoire
de la nouvelle politique, nous avons le privilège, particulièrement rare, de ne
pas, ou plutôt de ne plus, être enfermés dans des carcans partisans.
D’ailleurs, au-delà d’un groupe parlementaire, ce qui nous
réunit chez les Constructifs, c’est un état d’esprit : celui de ne pas
raisonner de façon archaïque dans un monde qui bouge vite. Nous ne sommes pas
des idéologues. Forts de nos expériences locales – denrées devenues plus
rares dans l’hémicycle –, nous sommes des pragmatiques, qui considérons
qu’une bonne idée, juste et efficace, d’où qu’elle vienne, n’a pas d’odeur, et
qu’elle doit tout simplement être mise en œuvre ! Nous assumerons donc
pleinement notre rôle de parlementaires, en toute indépendance, sans parti pris
et sans a priori. J’espère, mes chers collègues, que vous serez nombreux à nous
rejoindre dans cette voie vertueuse, qui participe à la modernisation et au
dynamisme de notre vie politique.
Le Parlement doit
être une lumière pour l’intelligence ; nous devons y réenchanter le débat
politique.
En liaison avec ce qui vient d’être dit, le deuxième trait
de caractère de notre groupe est la liberté de penser. Nous avons décidé de
nous affranchir des jeux politiciens partisans et stériles, et nous nous
prononcerons selon notre libre arbitre, notre conscience et les valeurs que
nous portons.
Un élu politique
doit être capable de s’élever au-dessus des facilités manichéennes pour définir
sa conduite en toute sérénité. Avec le recul, nous avons appris qu’il fallait
se méfier des professionnels de la vérité, la quantité de certitudes étant
souvent un bon indicateur du niveau d’ignorance.
Un enseignement que
nous devons tirer du message fort que nous ont adressé les Français est que trop
souvent les partis politiques sont en retard sur les idées.
Cette liberté de penser et de dire nous permettra
d’accompagner sans retenue votre volonté affichée d’accélérer la transition
écologique et énergétique. Nous prendrons part à ce débat essentiel en
formulant des propositions ambitieuses et crédibles, et en suivant de près la
réalisation de grandes infrastructures dont l’intérêt économique et
environnemental a été maintes fois démontré.
Vous pourrez aussi compter sur nous pour soutenir les réformes
de notre système éducatif et toutes les mesures visant à accroître l’égalité
des chances au sein de notre jeunesse.
Cette liberté de
penser et de dire nous fera porter un regard critique sur votre souhait de
réformer le droit du travail par ordonnances. Si nous pensons, nous aussi, que
le droit du travail doit être simplifié rapidement et que les accords
d’entreprise devraient être renforcés et la place des branches redéfinie, il
nous semble néanmoins difficilement acceptable que cela se fasse sans que la
représentation nationale puisse en débattre sereinement. C’est pourquoi nous
vous demandons d’associer les différents groupes parlementaires à l’élaboration
des ordonnances.
Cette liberté de
penser et de dire nous amènera à nous opposer nettement au projet
d’augmentation de la contribution sociale généralisée, qui, en l’état,
conduirait à pénaliser les retraités et les professions libérales. De même,
nous considérons que le projet de suppression de la taxe d’habitation risque
d’asphyxier davantage encore des milliers de communes déjà soumises par
l’ancien gouvernement à une diète budgétaire sans précédent.
Profondément
attachés à la décentralisation et à l’autonomie des collectivités
territoriales, nous ne pouvons accepter cette dépendance supplémentaire
vis-à-vis de l’État.
Nous serons donc libres de nos propos, libres de nos
positions, libres de nos votes. Cette liberté que nous revendiquons prendra
forme dès aujourd’hui, puisque, au sein de notre groupe, certains voteront la
confiance tandis que d’autres – la majorité – s’abstiendront. Entre
le panurgisme rabelaisien et la critique pavlovienne, notre groupe, comme
Jean-Louis Borloo l’avait dit à cette même place il y a cinq ans, sera la vigie
lucide, indépendante et exigeante de cette législature !
La volonté d’être
constructif ; la liberté de penser ; enfin, troisième valeur forte de
notre groupe parlementaire : la volonté de vérité.
L’exigence de vérité sous-tend une exigence de savoir. On ne
peut pas décider des lois de la République sans la connaissance nécessaire. Les
élus politiques ont le devoir de savoir, de comprendre et de dire la vérité à
leurs concitoyens, dans la mesure où ils ont été élus pour les représenter. La
clef du redressement sera d’abord un constat partagé.
Pierre Mendès France le disait très bien : « Le
citoyen doit comprendre qu’au-dessus des intérêts particuliers, même très
respectables, l’intérêt général doit toujours dominer : c’est le
civisme ». Pour notre groupe, cette exigence de vérité, et de vérité
partagée, est fondamentale.
Je pense tout particulièrement à la situation financière de
notre pays, dont la Cour des comptes vient de nous rappeler la triste réalité
– ou plutôt, pardonnez ce pléonasme, la vraie réalité ! Nous vous
invitons à prendre des mesures fortes afin de ramener notre déficit public sous
la barre des 3 %, conformément à nos engagements européens, et cela
dès 2017.
Notre dette est tellement astronomique qu’on finirait par
penser qu’elle n’est que théorique et virtuelle. Pourtant, il faut regarder la
vérité en face, car la cacher, la masquer ou la travestir, c’est prendre le
risque, si elle est découverte, d’un ressentiment violent dans la population,
qui aura eu le sentiment légitime d’avoir été infantilisée et trompée.
La vérité, c’est aussi rappeler que notre avenir sera
européen ou qu’il ne sera pas. Il faut réinventer l’Europe, refonder l’idéal
européen qui avait, pour reprendre ses propos, réconcilié Simone Veil avec le
XXe siècle – comment ne pas penser à cette grande dame aujourd’hui ?
Il faut faire de l’Europe un bouclier contre les menaces mondiales, et contre
la menace intérieure d’un nationalisme exacerbé qui mènerait au déclin
intellectuel et économique.
La vérité, c’est aussi nos quartiers délaissés, avec la
quasi-disparition de la politique de la ville, c’est une agriculture aux abois,
avec les inacceptables impayés de la politique agricole commune, c’est une ruralité méprisée, humiliée et abandonnée :
abandonnée financièrement, abandonnée médicalement, abandonnée par les services
publics, par les opérateurs du téléphone et de l’internet ; une ruralité
qui ne peut se faire entendre qu’en manifestant démocratiquement dans
l’extrême.
Écoutons ce coup de
colère et n’oublions pas, comme le rappelait Francisco de Goya, que le sommeil
de la raison engendre des monstres ! Et comme dénoncer sans proposer est sans
intérêt, nous vous soumettons une idée simple : la création d’une Agence
nationale de la rénovation rurale, afin de prendre à bras-le-corps le
problème !
La vérité, c’est la
nécessaire révolution numérique de notre société : il existe un réel
risque de perte de souveraineté économique, sécuritaire et sociétale face aux
géants étrangers, notamment américains.
La vérité, c’est notre magnifique outre-mer, qui renferme
80 % de notre biodiversité et représente 97 % de notre espace
maritime. Cet outre-mer sera confronté, dans les semaines qui viennent, à des
décisions lourdes de conséquences – je pense tout particulièrement à la
Nouvelle-Calédonie.
Quand on demandait à Kant si l’on vivait déjà dans l’époque
des lumières, une époque vraiment éclairée, il répondait : « Non,
mais dans une époque en voie d’éclairement. ». Telle doit être notre
vocation, à nous les parlementaires : recommencer tous les jours le
travail de construction d’une société meilleure, en préservant l’héritage du
passé, en faisant preuve d’innovation, de réalisme, d’écoute, de sens critique
et de discernement.
Le discernement : nous aimons ce mot en
politique ! Et c’est ce que nous appliquerons, avec notre groupe, dans
notre groupe ; ce sera un groupe d’opposition éclairée, à la plus-value
constructive, un groupe libre, attaché à la vérité, un groupe, enfin, qui
n’aura qu’un seul objectif : faire gagner la France !
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Les commentaires anonymes ne sont pas publiés ainsi que ceux qui seraient insultants ou qui ne concernent pas le Centre et le Centrisme.