François Bayrou |
François Bayrou a-t-il eu raison d’accepter d’entrer au
gouvernement ou cela risque-t-il de nuire à sa forte popularité qu’il a
développée pendant toutes les années où il en était écarté et donc à son
ambition politique?
Depuis sa nomination comme Garde des sceaux, les sondages
sont assez contradictoires entre eux et, en tout cas, ne dégagent pas une ligne
claire de compréhension sur l’opinion des Français à son encontre.
Ainsi, dans un sondage Harris-Interactive, s’il obtient bien
43% de confiance à son poste de ministre de la Justice, ce qui le classe en quatrième
position, il est, dans le même temps, l’un des deux seuls ministres avec Bruno
Le Maire, à avoir plus de sondés qui déclarent n’avoir pas confiance en lui
(44%).
Dans le dernier baromètre Odoxa, il se trouve en quatrième
position avec 34% d’opinions favorables(8% qui le soutiennent et 26% qui ont de
la sympathie pour lui) soit un gain de 5 points.
En revanche, dans le baromètre Elabe, il perd 3 points à
31%, se retrouvant en cinquième position.
De même, dans le baromètre Ifop, il perd 6 points passant de
55% à 49% et perd une place (pour se retrouver huitième).
Et dans le baromètre BVA il n’obtient que 32% d’opinions
favorables loin du premier (Nicolas Hulot) qui obtient 58% et se classe septième.
Evidemment, toute personnalité politique au pouvoir sauf
exceptions rarissimes perd des points en termes de popularité dans les
sondages.
Entre le ministère de la parole et de l’apparence que l’on
représente quand on n’est pas dans l’action mais dans l’observation et la
critique et le ministère de l’agir et du concret quand on passe du côté du
pouvoir, la règle est connue, on perd des points dans les enquêtes d’opinion.
L’on peut penser que ce sera le cas de François Bayrou comme
on l’a vu plus haut même si cette mécanique vient tout juste de s’enclencher et
n’est pas d’une visibilité absolue pour l’instant.
Mais ce qui menace le plus François Bayrou, c’est cette
perte de confiance et de crédibilité qui va généralement de pair avec
l’exercice du pouvoir.
Parce qu’il y a, dans ce que l’on avait promis de faire, ce
que l’on fait évidemment de manière imparfaite et ce que l’on ne fait pas.
Parce qu’il y a, dans ce dont on n’avait pas parlé, ce que
l’on fait et que l’on vous reproche de faire et ce que l’on vous reproche de ne
pas faire même si l’on avait rien promis à ce sujet.
Parce qu’il y a cette défiance pour le pouvoir et cette
attitude négative qui revient à dévaloriser tout ce qui vient de celui-ci.
Parce que l’on est beaucoup plus exposé face aux médias et
aux critiques venues de partout.
Ainsi, le nouveau ministre de la Justice a pu, depuis vingt
ans où il n’a plus exercé de fonctions gouvernementales et où il n’a guère brillé
à l’Assemblée nationale (d’autant que son parti n’avait qu’une poignée de
députés), bâtir sa stature d’homme politique et public de premier plan avec une
image rassurante et valorisante pour une grande partie de l’opinion, de sage,
d’homme tranquille aux racines terriennes profondes, de juge de paix de la politique,
voire d’oracle.
Celle-ci sera désormais écornée à chaque fois qu’il prendra
la parole ou qu’il agira, c’est la dure loi de l’exercice du pouvoir que ce
soit justifié ou non.
Dans une optique de destin national auquel il n’a absolument
pas renoncé, ce passage au pouvoir après l’alliance conclue avec le nouveau
président de la république avant son élection, peut le servir en démontrant ses
qualités de gestionnaire et de décideur à son pose de ministre.
Mais elle peut également provoquer, s’il commet des erreurs
ou s’il s’avère ne pas avoir le pouvoir d’agir, un jugement négatif dans
l’opinion qui ne lui permettra pas d’être en réserve de la république au cas
où.
D’autant que, dans son rôle de sage, il est souvent
intervenu pour pourfendre ceux qui n’obtenaient pas de résultats ou n’avaient
pas la stature de leur fonction.
Actuellement, il n’est guère possible de savoir où penchera
la balance.
En outre, il est tout à fait rebondir d’une expérience ministérielle
décevante voire mauvaise.
Tout au plus peut-on dire que François Bayrou a pris le plus
grand risque politique de sa carrière depuis son passage au ministère de l’Education
dans le gouvernement Juppé, parce qu’il est à nouveau directement confronté au
réel, donc aux résultats qu’il va obtenir et alors même que le pouvoir use.
S’il réussit, il pourra nourrir de grandes opinions malgré
son âge.
S’il échoue, il aura beaucoup de mal à rebondir.
Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC
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