François Bayrou |
François Bayrou a toujours été un homme politique
difficilement gérable, surtout depuis son score de 18,57% au premier tour de la
présidentielle de 2007.
Sa volte-face pour la présidentielle de 2017 où, après avoir
soutenu Alain Juppé tout en ayant voulu se présenter, il s’est allié à Emmanuel
Macron qu’il avait très durement critiqué voire insulté, montre, à la fois, sa
souplesse et sa volonté d’être toujours au centre de la scène
politico-médiatique.
Déçu de n’être pas nommé premier ministre alors qu’il est
convaincu d’avoir été le principal responsable de la victoire de Macron (qui,
selon le président du MoDem, lui a «volé» son positionnement central et son
«ni, ni» ainsi que son idée d’un mouvement politique issu de la société civile),
il s’est senti floué lors du dévoilement de la première liste des investitures
de La République en marche pour les législatives.
Ayant réussi à la faire évoluer dans son sens et son intérêt
puis ayant été nommé ministre de la Justice mais, surtout, ministre d’Etat et
troisième figure du gouvernement, il a estimé que le rapport de force qu’il
avait instauré lors de cet épisode avait totalement payé.
De plus, en analysant les résultats du premier tour des
législatives, il a compris que ne pouvant peser numériquement sur la prochaine
majorité présidentielle – LREM aura une majorité sans besoin de l’apport des
députés élus sous la bannière MoDem –, il ne pourrait peser et survivre sur le
moyen et long terme que dans une sorte d’autonomie agressive vis-à-vis
d’Emmanuel Macron et d’Edouard Philippe, le tout en revendiquant une «liberté
de parole» au mépris d’une discipline gouvernementale.
Cependant, s’il estime que de pouvoir dire ce qu’il veut,
quand il veut et sans l’autorisation de quiconque est l’attribut d’un homme
politique «libre», il sait très bien aussi que c’est la manière de se bâtir une
sorte de baronnie indépendante voire frondeuse à l’intérieur même du royaume de
la majorité présidentielle et d’être, ou indéboulonnable de par la crise
politique que son éviction susciterait, ou prêt à jouer sa propre carte avec
ses nombreux députés qui auront été acquis uniquement grâce à… La République en
marche!
Sans doute que les attaques concernant les assistants
parlementaires des députés européens du Mouvement démocrate l’ont raidit dans
cette posture mais celle-ci lui permet également de jouer de sa nouvelle stature
pour pratiquer ce rapport de force dont il pense sortir vainqueur dans tous les
cas de figure.
C’est un pari que fait François Bayrou comme il en a fait
beaucoup au cours de sa carrière politique, parfois gagnants, souvent perdants.
Cependant, il va devoir jouer serrer parce que, pour les
Français et depuis longtemps comme en témoignent les sondages, il n’est pas
perçu comme un représentant de la «nouvelle» politique mais plutôt comme celui
de la «vieille» classe politicienne.
De ce point de vue, si Emmanuel Macron, lassé et énervé de
son comportement, lui appliquait le «dégagisme» tellement à la mode
actuellement, il est fort probable que cela ne serait pas mal reçu par
l’opinion publique.
Pas sûr, non plus, que toutes ses troupes le suivent dans ce
qui serait une nouvelle traversée du désert, comme celle qu’il a vécu après la
présidentielle de 2012.
Nous n’en sommes pas encore là et il est possible que des
arrangements soient trouvés pour éviter ce cas de figure.
Quoi qu’il en soit, tout ce que fait François Bayrou ne doit
pas être analysé comme des «couacs» mais certainement comme un agir mûrement
réfléchi à défaut d’être sûrement payant.
Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC
Jean-Louis Pommery
Directeur des études du CREC
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