Dans cette rubrique, nous publions les
points de vue de personnalités centristes qui ne reflètent pas nécessairement
ceux du CREC. Ces points de vue ont pour but d’ouvrir le débat et de faire
progresser la pensée centriste.
Jean-François Borrou est le pseudonyme
d’un journaliste proche des idées centristes et qui collabore épisodiquement à
cette rubrique. Ses propos sont les siens et non ceux du CREC.
François Fillon |
Cette question est loin d’être une provocation ou une
quelconque invective gratuite.
Procédons par ordre.
Un minable, selon la définition donnée par le CNRTL (Centre
national de ressources textuelles et lexicales) du CNRS, est quelqu’un de «très
médiocre» dont le même centre nous indique qu’il s’agit d’un individu «qui manque de capacités intellectuelles, d'élévation de
pensée ou de sentiments; qui est au-dessous de la moyenne».
Un possible minable auquel l’envolée rageuse d’un Alfred de
Vigny pourrait bien s’appliquer: «Les hommes gorgés de pouvoir étaient
médiocres et étroits dans leurs conceptions, médiocres et faux dans leurs œuvres,
médiocres et bas dans leurs actions».
Dangereux, selon le CNRTL, est quelqu’un qui représente un
danger pour les autres, à qui on ne peut se fier, qui peut nuire, causer du
tort.
Voyons maintenant pourquoi je pose la question de sa grande
médiocrité avant de voir celle de sa dangerosité.
- Pendant cinq ans, comme premier ministre, il avale toutes
les couleuvres et accepte sans broncher de se faire qualifier de «collaborateur»
par le président de la république sans immédiatement démissionner de ses
fonctions.
- Il va essayer de torpiller le retour en politique de
Nicolas Sarkozy en demandant au gouvernement de François Hollande d’accélérer
les procédures judiciaires contre l’ancien président de la république puis en estimant
que celui-ci est responsable de «l’abaissement de la morale publique» et «du
niveau d’éthique dans la vie politique» ce qui ne l’empêchera pas de l’appeler
à la rescousse lors du dévoilement du Pénélope Gate et d’aller lui demander «conseil»
plusieurs fois tout en intégrant dans son équipe de campagne tous les
principaux de collaborateurs de celui-ci.
- A Matignon, sur les deniers publics, il fait refaire de
fond en comble l’appartement de fonction
pour une somme astronomique ce qu’aucun premier ministre avant lui n’avait fait.
- Il engrange des revenus très importants avec sa société 2F
dans une activité de conseil avec des entreprises dirigés par des amis (comme
Axa où l’ancien PDG, Henri de Castries est dans son cercle le plus proche) et
de «conférencier» dans des pays pas très reluisants (comme le Kazakhstan dont Amnesty
international dénonce les brutalités policières et la torture généralisée, pays
dirigé par l’autocrate Nazarbayev que Reporter sans frontières qualifie de
«prédateur» de la liberté de la presse) tout en étant un élu de la république.
- Il paye sa femme et ses enfants sur les deniers publics
alors que la première n’a jamais occupé l’emploi d’attachée parlementaire qui
lui assure un salaire élevé (puis il la fait employer par son successeur à l’Assemblée
nationale quand il devient premier ministre avec un salaire encore plus élevé)
et que les seconds n’ont pas réellement travaillé pour sa mission d’élu.
- Il demande à un de ses amis de faire semblant d’employer
sa femme comme journaliste contre un salaire indécent.
- Il affirme qu’aucune personne ne peut se présenter si elle
est mise en examen afin de contrer la candidature de Nicolas Sarkozy à la
primaire de LR et de gêner celle d’Alain Juppé puis déclare le contraire lorsqu’il
risque lui-même de l’être.
Il est important, ici, de rapporter les propos exacts de
Fillon et dans leur intégralité: «Avoir une haute idée de la politique signifie
que ceux qui briguent la confiance des Français doivent en être dignes. Ceux
qui ne respectent pas les lois de la république ne devraient pas pouvoir se
présenter devant les électeurs. Il ne sert à rien de parler d'autorité quand on
n'est pas soi-même irréprochable. Qui imagine un seul instant le général de
Gaulle mis en examen?».
- Il se fait prêter de l’argent (50.000 euros, trois ans de
smic) sans intérêt.
- Il se fait payer des costumes (au moins 15.000 euros) par
un «ami» et des vêtements pour près de 50.000 euros (toujours trois ans de
smic).
- Il passe d’un gaullisme social proche de la Gauche à un
thatchérisme libéral proche de l’extrême-droite afin de trouver une «niche»
pour la primaire de LR.
- Quand le Pénélope Gate est dévoilé, il utilise la
stratégie de Donald Trump pour salir la presse, la police et la justice ainsi
que tous ceux qui l’attaquent dans un mélange nauséabond et désormais bien connu
d’insultes, de théories du complot et de «faits alternatifs».
- Il affirme que son programme n’est pas amendable puis
l’amende constamment pour ne pas décrocher dans les sondages.
- Il prétend qu’l ne négociera pas avec le Centre comme l’a
fait Juppé et il offre à l’UDI tout ce qu’elle n’aurait pas obtenue avec Juppé
pour ne pas perdre la caution de centristes de l’UDI pourtant largement
discrédités.
- Enfin, avec tout cela, il affirme être le candidat de l’honnêteté
et de la morale…
Dangereux ensuite.
Quelqu’un qui a si peu le sens moral – sauf pour les autres
– pour arriver et se maintenir dans hautes sphères de la politique, c’est-à-dire
qui justifie tous les moyens pour parvenir à son but est, par définition, un
homme dangereux.
Dangereux parce qu’il donne une image désastreuse de la démocratie
qui va être utilisée jusqu’à plus soif par les extrémistes de tous bords.
Dangereux parce qu’il va décourager nombre de gens à s’investir
en politique, uniquement par son ambition personnelle et non par ambition pour
son pays.
Dangereux, enfin, parce que son programme, comme l'a bien dit François Bayrou, l'est pour le pays.
Dangereux, enfin, parce que son programme, comme l'a bien dit François Bayrou, l'est pour le pays.
Voyons maintenant pourquoi je réponds à la question par l’affirmative
alors même que la candidature de François Fillon est du pain béni pour Emmanuel
Macron et le Centre qui va peut-être avoir un président de la république qui
partage en très grande partie ses valeurs et sa vision politique.
Car, grâce à Fillon, Macron est devenu le favori de l’élection
présidentielle…
Reste qu’au niveau de la morale politique et de la vision
que je me fais de la politique, tout cela est vraiment lamentable.
Parce qu’être élu de la nation est déjà une fierté et un
privilège qui n’a pas besoin de gratifications matérielles pour rendre la
fonction honorable.
Mais, en plus, parvenir à être ministre puis le premier d’entre
eux, c’est la réalisation d’une ambition au sens noble du terme et qui n’a pas
pour but un quelconque enrichissement mais parle plutôt de devoir, voire de
gloire.
Et puis l’image de la France mérite mieux que ces minables
affaires.
Mais que Fillon se rassure (comme il le peut): il y a d’autres
minables dangereux dans la politique et beaucoup, malheureusement.
Et pour cette présidentielle, on en connait au moins deux:
lui et Marine Le Pen en attendant la liste définitive des candidats...
Jean-François Bourrou
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