L’année 2016 sera peut-être celle qui a annoncé la
disparition des partis centristes ou celle qui, au contraire, a amorcé le début
du renouveau centriste dans une sphère
plus large – espace ou axe central –, selon que l’on soit pessimiste ou
optimiste.
Devant le comportement mesquin, puéril et médiocre de la plupart
des leaders centristes, plus occupés à se chamailler de manière ridicule, à se
disputer un leadership de pacotille et à lorgner vers des gratifications que la
Droite leur fait miroiter, le tout sur fond d’absence de candidature à la
présidentielle pour défendre avec courage sinon avec chance de succès le
Centrisme, devoir d’un courant politique engagé dans les joutes électorales, on
peut craindre que la spirale de l’autodestruction les emporte avec leurs partis
respectifs.
Certains diront que le renouveau centriste doit en passer
par là.
Néanmoins, les sympathisants et les militants centristes ont
encore l’espoir qu’enfin le Centre soit dignement représenté et qu’il pèse sur
la vie politique française de par sa pensée et ses propositions, de par son
projet plutôt qu’en étant le simple supplétif de la Droite.
Si quelques uns croient encore en les Bayrou, Lagarde, Morin
et consorts, d’autres, désormais, de plus en plus nombreux, se sont tournés vers
Emmanuel Macron.
Car l’avenir du Centre pourrait bien être dans les mains du
leader d’En marche qui, s’il n’est pas centriste et ne se revendique pas comme
tel, semble totalement centro-compatible, à la fois, par sa vision de la
société que par les mesures que l’on connait de son programme électoral en vue
des présidentielles.
Rappelons aux esprits chagrins que Macron a simplement
bénéficié de l’incapacité des leaders centristes à occuper le terrain.
Il n’a eu qu’à se baisser pour ramasser un fruit mûr.
Bien entendu, la possible mainmise du Centre par un homme
venu de l’extérieur montrera, si elle se réalise, que les centristes français
sont incapables de prendre leur destinée en main depuis fort longtemps.
On se rappelle leur ralliement à Valéry Giscard d’Estaing
dans les années 1970, celui à Edouard Balladur dans les années 1990.
On se rappelle aussi qu’ils furent sauvés du désastre
électoral et de la disparition par Jean-Louis Borloo après 2012 alors même que
ce dernier se présentait comme un républicain social et non un centriste.
Cependant, rien n’est joué, surtout en ces temps où les
électeurs semblent capables assez insaisissables dans leur désir de changement
à tout crin du personnel politique et dans une vision très poujadiste du «tous
pourris».
De ce point de vue, Emmanuel Macron pourrait n’être, au
grand bonheur des dirigeants centristes, qu’une étoile filante.
Il n’est pas parti pour n’être que cela mais qui peut en
être absolument sûr?
Lire aussi:
► Primaire LR ou la faiblesse de centristes qui ont perdu leur âme
La primaire LR que certains ont rebaptisé faussement celle «de
la Droite et du Centre» -- dont les leaders de l’UDI – a démontré toute la
faiblesse des partis centristes.
Incapables de présenter un candidat indépendant, l’UDI ou ce
qu’il en reste, s’est déchirée entre les différents candidats de droite à une
primaire qui n’était pas la leur alors que ses dirigeants avaient fait voter
les militants contre une participation à celle-ci (aucun candidat du parti n’y
a participé) et même à aucun soutien officiel alors que l’énorme majorité de l’UDI
a soutenu Alain Juppé.
La situation était quelque peu différente au MoDem puisqu’aucune
discussion n’a eu lieu, la décision de soutenir Alain Juppé a été prise, comme
d’habitude, seul par le chef, François Bayrou.
Celui-ci se devait de retourner l’ascenseur au maire de
Bordeaux qui lui a permis de sortir du fond du puits où il s’était lui-même
fourré après les élections de 2012, perdant son siège député et donc toute
fonction d’élu, et n’ayant pas été capable de franchir la barre des 10% de voix.
En lui permettant de devenir maire de Pau, Juppé a
ressuscité politiquement Bayrou.
Pour autant, le soi-disant soutien indéfectible de Bayrou a
sans doute été la cause de la défaite de Juppé…
D’autant qu’au fil des mois, ce soutien, s’il a toujours été
caractérisé comme total et indéfectible par l’intéressé, a été de plus en plus
critique, surtout de plus en plus un marchepied pour Bayrou de revenir sur le
devant de la scène politique et de jouer sa propre partition en vue d’une
possible candidature à la présidentielle de 2017.
Pendant un temps, le président du Mouvement démocrate a
démenti en public toute velléité en ce sens alors qu’il disait le contraire à
tous ses visiteurs, journalistes compris.
Et puis, la candidature de Nicolas Sarkozy, son ennemi
intime à la primaire LR, lui a permis de faire son coming out en expliquant que
si l’ancien président de la république était le candidat de la Droite à la
présidentielle, il reprendrait sa liberté et prendrait ses responsabilités,
sous-entendu qu’il se présenterait une quatrième fois à la reine des élections
françaises.
Une envie portée alors par quelques sondages qui sont allés
jusqu’à lui donner, pour l’un d’entre eux, 16% des intentions de vote.
Mais les plans de François Bayrou ont été balayés par la
victoire surprise de François Fillon à la primaire LR.
Si toute l’UDI s’est, à la fois, déchirée – avec cette
tentative piteuse d’Hervé Morin de détruire l’UDI et de prendre le leadership d’un
nouveau parti centriste totalement adossé à la candidature Fillon – et s’est
pressée comme un seul homme devant la porte du candidat officiel de LR pour se
vendre et tenter de récupérer tout ce qu’il y avait à récupérer dans un ballet
aussi indécent que minable, Bayrou s’est une nouvelle fois distingué.
On s’attendait à ce qu’il annonce sa candidature puisqu’il
avait caractérisé le programme de Fillon de dangereux.
Or, il ne l’a pas fait tout en refusant de soutenir ce
dernier pour l’instant, se donnant jusqu’à fin janvier-début février 2017 pour
annoncer sa décision.
Il faut dire que les données ont profondément changé ces
derniers mois.
D’abord, la montée en puissance d’Emmanuel Macron, candidat progressiste
du «ni gauche, ni droite», totalement centro-compatible, a relégué Bayrou à
6%-8% dans les intentions de vote à la présidentielle.
Ensuite, Fillon n’est pas Sarkozy et il a le soutien de
beaucoup de sympathisants du Centre et de la Droite modérée, privant le maire
de Pau d’une partie de son électorat potentiel de droite modérée allergique à
Sarkozy mais pas à Fillon, quand l’autre s’est déjà tourné vers Macron.
Quoi qu’il en soit et quelle que soit la décision du
président du MoDem, on le voit, la primaire de LR a été un moment très
difficile pour les centristes qui n’en sont pas ressortis indemnes et qui
pourraient, à terme, en payer le prix fort.
Lire aussi:
►L’UDI, un bateau à la dérive
La bonne nouvelle, c’est que l’UDI existe encore.
La mauvaise, c’est qu’elle existe encore…
Au cours de cette année 2016, la confédération centriste a
une nouvelle fois montré qu’elle n’était qu’un cartel de petites ambitions
personnelles et électoral et surtout pas un parti politique qui compte ou qui a
même l’embryon d’un projet à présenter aux Français.
Jean-Christophe Lagarde, son président officiel, a tenté de
jouer au chef de parti mais cela n’a guère été concluant tellement il manque de
lignes directrices et qu’il est contesté par beaucoup de militants.
Il a plutôt montré ses failles, son opportunisme et une
incapacité à réunir l’UDI derrière un projet politique cohérent et, surtout,
derrière lui.
Ses allers-retours vers Juppé, Macron, Fillon ont été
pathétiques.
Ainsi, après avoir encensé Emmanuel Macron et que son ami
Laurent Hénart a même évoqué un soutien de l’UDI pour lui, il en est devenu un
des principaux opposants tout en épousant les thèses de Fillon qui étaient
pourtant non compatibles, la veille, avec le Centre.
Du coup, toutes les chapelles qui minent l’UDI de l’intérieur
ont, non seulement, continué à exister mais ont en profiter pou se porter comme
un charme tout en participant à son autodestruction dans une irresponsabilité
fascinante au sens premier du mot.
Les violentes attaques d’Hervé Morin, de François Sauvadet
et de Maurice Leroy contre Jean-Christophe Lagarde, les partitions
individuelles de Philippe Vigier, d’Yves Jégo et de François Zocchetto, le
soutien apporté par Jean Arthuis à Emmanuel Macron, tout cela démontre une
formation sans âme, sans leadership et sans aucun avenir si elle n’est pas
capable de se ressaisir le plus vite possible.
Lire aussi:
►Bayrou entre deux eaux
François Bayrou joue son avenir politique depuis plusieurs
mois et encore plus depuis le résultat de la primaire LR.
Soit il se présente à la présidentielle mais en cas de
mauvais score disparait des écrans radars des politiques qui comptent, soit il
renonce (pour éventuellement participer en 2022) et il s’enterre lui-même.
Difficile choix pour un homme qui croit dur comme fer à son
destin présidentiel.
Il faut dire, à la décharge de Bayrou, qu’il n’avait guère
le choix.
Il se devait de soutenir son «ami» Alain Juppé à la primaire
LR, ce qui lui a certainement coûté une image d’homme indépendant et défenseur
intransigeant du Centre, même si cela n’a jamais été le cas dans la réalité.
Et pendant qu’il soutenait le maire de Bordeaux, c’est
Macron qui s’est installé sur ses terres électorales.
Résultat, François Bayrou est très bas dans les sondages,
loin derrière Emmanuel Macron et il ne peut rallier François Fillon sans perdre
une partie de sa crédibilité.
De ce point de vue, 2016 qui aurait pu être une année faste
pour le président du Mouvement démocrate, a été celle où son avenir politique s’est
peut-être joué et pas pour le meilleur.
Lire aussi:
► Où en est l’axe central?
Avec la primaire de LR et la défaite d’Alain Juppé, la
montée en puissance d’Emmanuel Macron qui a obligé Manuel Valls à se déporter
un peu sur sa gauche et François Bayrou à semer la zizanie dans l’espace
central pour tenter de s’affirmer comme le seul leader du Centre, l’axe central
n’a pas vécu une bonne fin année du point de vue de ses leaders alors que le
début 2016 semblait tellement prometteur.
Cependant, les Français continuent à le plébisciter ainsi
que les sympathisants centristes.
Bien sûr, il n’aura pas comme leader en 2017 Alain Juppé qui
semblait, en plus, promis à occuper le fauteuil de l’Elysée, mais il pourra
compter sur Emmanuel Macron.
De même, François Bayrou et Manuel Valls n’ont pas dit leur
dernier mot.
Quoi qu’il en soit, les idées et les propositions véhiculées
par cet axe central qui va des gaullistes réformistes au sociaux-réformistes du
PS en passant par le social-libéralisme d’En marche et la libéralisme social
des partis centristes, séduisent encore une majorité de Français.
Lire aussi:
► Centriste de l’année: Emmanuel Macron
Ne soyons pas moins royaliste que le roi.
Non seulement les Français ont élu Emmanuel Macron, homme
politique de l’année, dans un sondage mais, en plus, il doit sa victoire au
fort pourcentage de sympathisants centristes qui l’ont choisi.
Dès lors, et pour la deuxième année consécutive, le leader d’En
marche est sacré le centriste de l’année alors même qu’il ne se revendique pas
centriste!
Mais il faut avouer qu’il ressemble fort à un centriste, dans
ses idées, ses propositions et sa philosophie politique.
Non pas un centriste opportuniste à la Lagarde ou Morin ou
un centriste conservateur à la Bayrou mais comme un centriste du XXI° siècle, réformiste et
progressiste, libéral et social.
Bien sûr, on peut être inquiet quand il entonne parfois des
couplets populistes contre la classe politique et quand il se lance dans une
glorification d’un peuple largement fantasmé.
Néanmoins, de ce point de vue, ceux-ci et celle-là sont
moins gênants que les accents d’un gaullisme du terroir d’un Bayrou ou que l’opportunisme
primaire et criant d’un Lagarde et d’un Morin.
Si l’on ne sait pas à quoi ressemblera exactement 2017 pour
Macron, il est sûr que 2016 a été une année faste pour lui, même ses
adversaires qui mettent au point des plans pour contrer sons ascension sont
obligés de le reconnaître avec un certain déplaisir.
Lire aussi:
Alexandre Vatimbella avec l’équipe du CREC
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