François Bayrou & Alain Juppé |
François Bayrou s’était attaché à parler le moins possible
dans les derniers jours de la campagne du premier tour de la primaire LR pour
ne pas porter préjudice au candidat qu’il soutenait, Alain Juppé.
Il faut dire que les attaques violentes de Nicolas Sarkozy à
son encontre et ses réponses tout aussi agressives semblaient mettre le maire
de Bordeaux en difficulté avec une baisse sensible dans les sondages.
Et les résultats du scrutin du 20 novembre ont confirmé que
l’image d’Alain Juppé auprès des sympathisants de droite et plus
particulièrement de LR avait fortement chuté, permettant à un autre
anti-sarkozyste, François Fillon, considéré comme plus «pur» par l’électorat de
droite, de faire une percée sans précédent pour se retrouver en tête et favori
du second tour.
Alors qu’Alain Juppé a durci son discours et ses critiques
envers Fillon, revoici François Bayrou qui vient réaffirmer son soutien sans
failles ou presque à celui-ci.
Les plus optimistes des juppéistes peuvent se dire qu’il s’agit
de remotiver l’électorat centriste qui semblait acquis à leur chef à près de
90% et dont les sondages montrent qu’un tiers pourrait se porter sur l’ancien
premier ministre de Sarkozy dimanche prochain.
Les plus pessimistes et sans doute les plus réalistes
doivent se dire que Bayrou a acté la défaite inéluctable de leur champion et qu’il
avance désormais ses pions en vue de sa propre candidature qu’il n’a pas écartée
face à Fillon.
L’intervention qu’il a faite aujourd’hui au micro de
Franceinfo le laisse en tout cas penser, puisqu’il a lâché, «si vous voulez
qu’on dise que François Fillon est favori, c’est vrai..».
Après avoir redit son soutien à Juppé et déclaré encore
croire en sa victoire, le président du Mouvement démocrate a laissé entendre
sans le dire qu’il serait candidat si le maire de Bordeaux perdait et que le
député de Paris était le candidat de LR.
Rien de nouveau, si ce n’est que Bayrou a critiqué très
vertement le programme de Fillon en le cataloguant très à droite et estimant
que sa volonté de «casser la baraque» était dangereuse tout en pointant son
éloignement d’avec lui: «Moi, ce qui me motive ou qui me trouble dans la
situation qui est créée, c’est le projet que porte François Fillon. Il se
trouve que j’ai connu François Fillon lorsqu’il était Séguiniste. A la fin des
années 80, nous avons ensemble fait les rénovateurs: il était du côté de la
fracture sociale, comme je le suis. Du point de vue du diagnostic sur la
société, de ce qui se passe, il est assez proche de moi. Mais
aujourd’hui il a choisi un projet d’une toute autre orientation et
c’est cette orientation qui est pour moi dangereuse, pour le pays et pour
l’alternance».
Puis il a réaffirmé qu’il ferait pression sur Juppé pour
changer les mesures de son programme avec lesquelles il était en désaccord.
Ainsi, à la question sur les similitudes entre les
programmes de Juppé et Fillon, il a répondu: C’est vrai, je ne peux pas dire le
contraire, mais l’esprit n’est pas le même. Si Alain Juppé est élu, je compte
bien aider à ce qu’il y ait des évolutions parce que je les crois
nécessaires.
Or, en donnant un certificat d’homme de droite en bonne et
due forme à Fillon, tout en parlant de faire pression pour amender le projet de
Juppé, il dit exactement ce que Nicolas Sarkozy prétendait lors du premier
tour, à savoir que le leader du MoDem luttait contre la Droite et ferait de
Juppé un otage, donc qu’il ne fallait pas voter pour le maire de Bordeaux.
Tout ce qui a précipité nombre de sympathisants de LR qui ne
voulaient plus de Sarkozy dans les bras de Fillon parce qu’ils craignent que
Juppé ne soit pas un vrai candidat de droite et redoutent que Bayrou deviennent
son éminence grise.
Et au cas où Juppé ne serait plus là, Bayrou a indiqué que, «à
partir de la semaine prochaine (…) je vais essayer d’en bâtir (un projet) un
autre».
Puis il a enchaîné: «je vais proposer les solutions
différentes, possibles, rassembleuses, pour qu’on puisse réfléchir autrement à
l’avenir de la France», en précisant que celles-ci étaient déjà écrites «en
grande partie».
Même s’il reprécise pour la énième fois qu’il n’est pas dans
une démarche de candidature, tous ses propos font penser l’inverse et que
Juppé, c’est désormais du passé.
Alexandre Vatimbella
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