Nicolas Sarkozy & François Bayrou |
François Bayrou a décidé de riposter aux attaques constantes
du camp de Nicolas Sarkozy et de ce dernier à son encontre.
Dans un long texte, il justifie son opposition sans
concession à l’ancien président de la république et justifie son choix de ne
pas avoir voté pour lui en 2012, lui préférant au second tour François
Hollande, ainsi que celui de soutenir Alain Juppé à la primaire de LR.
La violence du texte de François Bayrou montre que l’homme a
été touché par ce flots d’insultes et de récriminations de la part de l’équipe
Sarkozy mais aussi des militants de LR, pas tous sarkozystes pour autant.
D’autant que cette offensive contre sa personne pourrait faire
du tort à Alain Juppé même si celui-ci est nettement en avance dans les
sondages pour devenir le candidat de LR à la présidentielle.
Mais on peut aussi se poser la question de savoir si
François Bayrou a intérêt à entrer dans cette controverse et s’il ne va pas y
perdre beaucoup, politiquement parlant.
Son avenir semble ainsi un peu plus fragilisé car cette
histoire va laisser des traces chez les sympathisants de droite et du
centre-droit même chez ceux qui ne sont pas des fans de Nicolas Sarkozy, voire
qui sont contre sa candidature.
Comment Alain Juppé, s’il est désigné candidat de LR, pourra
faire passer une alliance avec François Bayrou et un accord électoral lui
donnant de nombreux sièges de députés?
Rappelons que si le président du Mouvement démocrate est
autour de 8%-13% dans les sondages, son parti ne représente plus rien et ses
électeurs sont autour de 5%-6%, c’est-à-dire qu’ils ne permettent pas à Bayrou
d’avoir beaucoup de poids dans une négociation.
Du coup, son soutien à Juppé pourrait bénéficier surtout à…
l’UDI!
Les centristes qui se sont regroupés derrière Jean-Louis
Borloo et désormais sont sous le leadership de Jean-Christophe Lagarde, même s’ils
ont montré une certaine défiance envers Nicolas Sarkozy, ne se sont pas affrontés
frontalement à lui, certains même le soutenant au premier tour de la primaire.
Dès lors, il sera nettement plus facile à Alain Juppé de
faire passer la pilule d’un accord électoral avec l’UDI que de donner de nombreuses
circonscriptions à Bayrou.
Mais ce dernier, tout autant qu’il puisse être naturellement
outragé d’être insulté, ne peut pas non plus faire l’impasse – ce qu’il fait
dans le long texte qu’il a publié pour répondre
Sarkozy – que, ces dernières années, il a navigué politiquement d’un
camp à l’autre, cherchant désespérément un positionnement qui pourrait lui
permettre d’être au second tour de la présidentielle et d’exister politiquement,
allant même jusqu’à prétendre après le premier tour de la présidentielle de
2007 que le mot «centre» ne faisait pas partie de son vocabulaire et expliquant
à certains de ses militants qu’il en cherchait un nouveau plus proche de sa
pensée.
On ne peut pas oublier son positionnement «gaulliste», son
vote en faveur de Hollande en 2012 puis son élection à la mairie de Pau avec
les voix de l’UMP (LR désormais) grâce à la volonté et la ténacité de Juppé.
On ne peut pas oublier qu’il continue souvent à naviguer, n’ayant
pas hésité à faire alliance avec LR pour les régionales et les départementales,
parti alors dirigé par des personnalités qu’il critique depuis longtemps et qu’il
a appelé lui-même à un accord avec l’extrémiste de droite radicale et actuel
président de LR, Laurent Wauquiez en Auvergne-Rhône-Alpes pour les régionales.
De ce point de vue, François Bayrou a tendu lui-même le
bâton pour se faire battre et il ne peut invoquer une quelconque ingénuité
politique pour découvrir le retour de ce même bâton…
Bien entendu, cela n’enlève pas les différences évidentes de
convictions politiques entre François Bayrou et Nicolas Sarkozy, entre le MoDem
et LR.
Dans son texte, Bayrou les rappelle fort à propos.
Mais on peut alors se poser la question de savoir pourquoi
il s’est allié avec un parti qui est majoritairement plus proche des positions
de Nicolas Sarkozy que des siennes.
Ici, on retombe dans la cuisine politique – qui n’est pas
forcément politicienne – et si Bayrou veut la pratiquer, il faut qu’il en
accepte les règles sans s’en plaindre constamment ou, s’il les refuse, de ne
pas se plaindre de son choix de réelle indépendance.
Pour le Centre et le Centrisme, le texte de François Bayrou
montre bien la différence qui existe avec la Droite.
Mais il ne répond pas à la question de savoir pourquoi, dès
lors, il fallait s’allier de manière si évidente avec celle-ci tout en la
critiquant, envoyant un message bien embrouillé qui, lui, n’est pas une bonne
chose pour ces mêmes Centre et Centrisme
Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC
Jean-Louis Pommery
Directeur des études du CREC