L’omniprésence d’Emmanuel Macron dans le débat politique
actuel et sa possible candidature à la présidentielle – avec une déclaration en
ce sens avant la fin novembre selon le quotidien Le Parisien –, a obligé
François Bayrou, contre son grès et qui a tenté de l’ignorer le plus longtemps
possible, à se positionner vis-à-vis du leader d’En marche.
Jusqu’à présent, il s’agissait pour lui d’une critique
acerbe, voire d’insultes, et d’un refus de l’accepter dans l’espace centriste.
Or, lors de son discours de bienvenue aux militants du MoDem
à l’«université de rentrée» du parti à Guidel (Morbihan), Bayrou semble avoir
mis de l’eau dans son vin en l’incluant dans la majorité centrale qu’il a
évoquée et dont il espère l’éclosion à l’occasion de l’élection présidentielle.
En affirmant que «tout le monde se met à parler de
recomposition», il prend en exemple Alain Juppé qui «’est exprimé plusieurs
fois sur ce sujet en disant qu’il allait falloir que des courants qui jusqu’à
maintenant étaient étrangers, se rassemblent» ainsi que Manuel Valls qui «a
évoqué cette idée».
Mais, plus surprenant, il indique qu’«Emmanuel Macron évoque
cette idée» en l’incluant de facto dans cette majorité centrale qui appelle de
ses vœux.
En revanche, pas un mot sur Jean-Christophe Lagarde, le
président de l’UDI, ni de Laurent Hénart, le président du Parti radical ou d’Hervé
Morin, le président du Nouveau centre, qui militent également pour cette
perspective.
C’est-à-dire tous les leaders du Centre – et parmi eux ses
anciens lieutenants – dont il se veut pourtant le rassembleur légitime…
Derrière cette recomposition «un mot que nous avons porté
souvent seuls devant l’opinion, (…) un choix que nous avons depuis longtemps
présenté aux Français comme inéluctable», le président du MoDem estime que «c’est
la création d’un paysage politique nouveau et d’une pratique politique nouvelle
en France. Cela n’est pas la reprise des anciennes formes politiques même
changées même cosmétiquement modifiées par un maquillage habile».
Il s’agit même de «la proposition d’un changement profond (…).
Donc c’est une rupture franche avec ce qui s’est fait. C’est la volonté de voir
notre vie démocratique et civique suivre un chemin nouveau. Cela veut dire
aussi qu’on reconnaît l’échec de ce qui s’est passé avant».
Une recomposition qui, même si elle demeure floue pour l’instant
dans son programme, doit permettre pour Bayrou au Centre, et donc à lui qui s’en
estime le leader «naturel» de gouverner la France:
«Et le deuxième élément pour lequel je plaide dans cette
recomposition au centre de la vie politique française, c’est l’unité et
l’indépendance. On a besoin des deux. Si le Centre ne s’était pas divisé, s’il
n’avait pas cédé aux sirènes du soi-disant parti unique de la Droite et du Centre
avec des traits d’union entre chacun de ces mots, s’il était resté ce qu’il
devait être, confiant dans ses forces, fier de ses idées, il aurait gouverné la
France. Et je suis persuadé que sur l’agenda qui est celui des responsables
politiques, il faut que l’unité soit au premier rang. Plus vite nous
retrouverons cette unité en passant sur tout: sur les vanités, sur les
agacements qui sont hélas la trame de la vie politique classique, plus vite la
vie politique de ce pays retrouvera son équilibre».
Quant au soutien à Alain Juppé, François Bayrou a voulu
rappeler tout ce que le maire de Bordeaux devra au Mouvement démocrate s’il
gagne la primaire puis la présidentielle grâce à son sacrifice et à celui des
militants de son parti:
«Je veux rappeler qu’il y a une enquête qui dit que
l’électorat qui est le plus actif et volontaire dans le soutien à Alain Juppé,
à 75%, c’est l’électorat du MoDem».
Et d’ajouter: «Parfois, on nous a demandé: ‘Pourquoi
avez-vous fait ce choix?’. Parce que nous pensons que le temps est au
rassemblement à condition que les valeurs portées devant les Français justifient
le rassemblement. Et c’est ce qu’Alain Juppé est en train de faire».
Avant de lui faire un gros compliment: «L’attitude qu’Alain
Juppé a choisi honore la vie politique et justifie le soutien que nous lui
apportons».
Pas sûr que ces propos soient bien reçus dans le camp Juppé
où l’on veut absolument se démarquer d’un soutien trop ostentatoire de Bayrou
pour ne pas apparaître trop «centriste» aux yeux de l’électorat de LR qui ne
goûte guère un Bayrou qui a voté pour Hollande en 2012.
Alexandre Vatimbella
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