Les partis centristes français ont souvent le syndrome du
petit parti adossé à un grand qui n’arrête pas de menacer, à chaque contrariété,
«retenez-moi, sinon…».
On voit bien en ce moment un tel comportement de la part de
l’UDI qui tente sans grand succès d’être un «partenaire» et non un faire-valoir
de LR pour les prochaines élections présidentielle et législatives ainsi que
pour les places dans un futur gouvernement si la Droite l’emporte en 2017.
Or, aucun des candidats à la primaire de LR n’a l’intention,
pour l’instant, d’obtempérer aux injonctions de l’UDI de s’assoir autour d’une
table, d’écrire un programme et de se partager les circonscriptions, le tout à
l’avantage de ce dernier parti qui voudrait bien rééditer le coup des
régionales lorsque Nicolas Sarkozy leur avait donné largement plus que ce qu’ils
représentent afin de les mettre dans sa poche, une opération qui a coûté cher
en termes politiques au président du parti de droite.
On connait bien en politique et, plus particulièrement en
matière électorale, le pouvoir de nuisance du petit face au gros qui, par des
menaces de ne pas être l’appoint nécessaire pour gouverner obtient de avantages
parfois totalement exorbitants.
Mais c’est de bonne guerre, le petit étant alors capable de
faire une place à ses intérêts – et parfois à ses idées! – alors même que sa seule
force électorale s’il décidait d’aller en solo à la bataille ne lui permettrait
par de réaliser.
Si le procédé peut ressembler à un chantage, la politique
dans une démocratie républicaine est bien de conquérir le pouvoir avec une
majorité et, pour cela, de réunir celle-ci autour d’un consensus qui oblige aux
compromis si un parti n’est pas lui-même hégémonique et majoritaire à la fois.
Mais, même alors, le consensus et les compromis se font à l’intérieur
du parti.
Or donc, l’UDI tente par tous les moyens de peser sur la
séquence électorale de l’année prochaine.
D’autant que cette petite confédération de partis encore
plus petits et dont moins de 4% des Français se revendiquent dans les sondages,
est minée de l’intérieur par des haines et d’incessants combats de petits coqs
qui font que chaque leader réel ou autoproclamé prend des «initiatives» pour s’entendre
avec LR.
Une telle cacophonie sur fond de fragilité et de friabilité –
personne ne sait combien de temps peut encore exister l’UDI – n’encourage pas
évidemment LR à négocier et à faire des concessions alors que cette formation
est déjà des plus réticentes à le faire.
Du côté de l’UDI, on sent bien que l’on commence à être
marginalisé et, pire, que l’on a très peu de munitions pour l’éviter.
Car, si l’on prend les sondages, on s’aperçoit, par exemple,
qu’Alain Juppé peut gagner la primaire LR sans les voix UDI (avec plus de difficultés
néanmoins) mais surtout qu’il peut être en tête du premier tour sans celles-ci
et devenir président de la république de même sans avoir ces votes.
Et cela semble le cas de tous les candidats potentiels de
LR.
En revanche, l’UDI ne pourra exister après 2017 que grâce à
LR et à un accord pour les législatives puis à un accord de gouvernement si
victoire de la Droite il y a.
Dans la situation où elle est, la confédération centriste
est donc obligée d’attendre le bon vouloir de son «partenaire» alors qu’elle
pensait pouvoir lui mettre la pression.
D’où les déclarations agressives pour tenter de montrer que
l’on existe et qu’il faudra compter avec soi.
C’est dans ce cadre que l’on peut analyser les derniers
propos de Jean-Christophe Lagarde.
Le président de l’UDI a, non seulement, confirmé que son
parti ne participerait pas à la primaire de LR (où il a tout à perdre) mais que
si les leaders du parti de droite ne voulaient pas d’un accord, alors il
pourrait bien y avoir une candidature de la formation centriste en 2017.
Et que ce candidat pourrait être Lagarde.
Evidemment, personne ne croit à cette menace chez LR et ce
scénario, pour l’instant, n’a aucune crédibilité puisque le président de l’UDI
plafonne à 1% des intentions de vote.
Une des raisons de la faiblesse de l’UDI est d’avoir mis la
charrue avant les bœufs.
Ainsi, du fait de son incapacité à s’unir, les différentes
composantes n’ont pas été capables de définir un programme et uns stratégie
commune pour la présidentielle qui auraient permis de développer l’originalité
du parti et de ses idées afin d’acquérir crédibilité et de bons sondages.
Dès lors, la seule chose dont il est capable c’est de «vendre»
son pouvoir de nuisance contre des circonscriptions et des strapontins
ministériels…
Tout autre est la position de François Bayrou.
Lui, il est seul mais ses intentions de vote à la
présidentielle représentent trois à quatre fois le pourcentage de Français qui
se disent sympathisants de l’UDI.
Voilà qui donne une certaine crédibilité acquise également
lors des deux dernières présidentielles.
Pour autant, afin de remercier Alain Juppé de lui avoir
permis de devenir maire de Pau alors qu’il était quasiment un politique en
déshérence, proche de la sortie, il le soutient pour 2017.
Cependant, le président du Mouvement démocrate sait que c’est
sa dernière chance de pouvoir occuper l’Elysée.
Alors, son soutien inconditionnel est devenu, petit à petit,
de plus en plus conditionnel et s’est transformé en un «intérêt» qui pourrait
bien se transformer en attentisme avant de finir par une candidature autonome.
Il s’agit du scénario possible si c’est Juppé qui est le
candidat de LR.
Car, sinon, François Bayrou sera sans nul doute candidat
face à son pire ennemi, Nicolas Sarkozy, et son second pire ennemi, François
Hollande (sans oublier son repoussoir ultime, le candidat du clan Le Pen).
Même si les sondages ne lui donnent jamais la possibilité d’être
qualifié pour le second tour jusqu’à présent, il croit en son étoile et brûle d’y
aller.
D’où tout un discours sur les risques qu’Alain Juppé soit
battu lors des primaires LR par Nicolas Sarkozy.
Alors, le rejet de Sarkozy couplé à celui de Hollande
ouvrirait une opportunité à Bayrou.
Cette éventualité n’est pas du tout un fantasme inventé par le
président du MoDem.
Actuellement, il n’est pas celui qui a le plus de chances de
se réaliser mais il peut le devenir et les raisons qu’il en soit ainsi
existent.
Si c’était le cas et si l’UDI ne parvenait pas à s’entendre
avec LR, on pourrait avoir deux candidats centristes, François Bayrou et
Jean-Christophe Lagarde.
Mais là on est beaucoup dans la politique fiction…
Alexandre Vatimbella
A lire aussi: