L'axe central avec Valls, Macron, Bayrou, Lagarde & Juppé |
Alors qu’ils devraient se féliciter de l’émergence d’un axe
central où les réformistes de droite et les libéraux de gauche les rejoignent
sur leurs positions, on constate que les partis centristes ressentent plutôt
une grande peur que ces nouveaux venus ne les phagocytent avant de les avaler
et de les faire disparaître dans une grande mouvance «centrale».
Car, oui, l’axe central devient de jour en jour une réalité
même si elle ne l’est pour l’instant qu’au niveau d’une ligne politique et non de
celui d’un regroupement dans une coalition ou dans un parti prêts à se
présenter aux élections puis à gouverner ensemble.
Mais cette réalité profite surtout aux réformistes de droite
avec Alain Juppé et aux libéraux et réformistes de gauche avec Emmanuel Macron
et Manuel Valls.
Les voilà qui envahissent les Unes des quotidiens et des
magazines, qui squattent les plateaux télé et les studios radio, sans parler aux
multiples reportages audiovisuels qu’ils leur sont consacrés.
Surtout, ils caracolent en tête dans tous les sondages.
Alain Juppé avec sa «centralité» a, non seulement, séduit
une majorité de Français en s’installant en tête de toutes les enquêtes
d’opinion mais il fait un véritable tabac chez les sympathisants centristes,
qu’ils soient du Mouvement démocrate ou de l’UDI.
Quant à Emmanuel Macron, avec son «ni gauche, ni droite», il
suit de près le maire de Bordeaux dans le cœur de l’opinion publique.
Ainsi, dans le dernier sondage Odoxa pour BFMTV et Le
Parisien, Juppé et Macron sont les deux seules personnalités politiques dont
les Français estiment majoritairement qu’ils seraient de «bons» présidents de
la république.
Seul centriste à tirer un peu son épingle du jeu dans les
sondages, François Bayrou est constamment devancé par le duo, voire par Valls
qui s’installent sans vergogne dans son espace politique en le marginalisant,
pire, en le ringardisant.
Dès lors, il n’est pas étonnant de voir les leaders
centristes monter au créneau, un peu tard, pour confier leurs doutes sur Juppé
et Macron.
Comme Hervé Morin qui explique qu’Alain Juppé ne peut être
le candidat du Centre à la présidentielle sinon à le faire disparaître.
Comme François Bayrou qui, se voyant piquer sa «centralité»
par Juppé et son «ni gauche ni droite» par Macron, tout doucement éjecté de son
rôle pivot du Centre par cette vague juppéiste-macronesque, se veut particulièrement
critique sur l’initiative «En-marche» du ministre de l’Economie tout en
rappelant constamment ses différences avec le maire de Bordeaux même s’il le
soutient pour la primaire de LR.
Comme Jean-Christophe Lagarde qui, à chaque fois qu’il parle
de Macron, c’est pour l’inviter à rejoindre l’UDI et non à lui proposer une
alliance et qui se garde bien, dans le même temps, de dire s’il soutiendra
Juppé en 2017.
Eh oui, les partis centristes et leurs dirigeants ont peur
d’être délogés de l’espace au centre, voire de leur propre espace centriste par
un Juppé qui leur rappelle pas forcément avec plaisir un Balladur ou un Macron
et un Valls qui leur rappellent un Rocard…
Très concrètement l’axe central est capable de porter du tort
aux partis centristes voire même un coup fatal, même si cette dernière
hypothèse demeure encore largement fictionnelle.
La raison principale est que l’axe central, d’opportunité
fantastique est devenu un danger terrible pour eux.
Et c’est majoritairement de leur faute.
Pourquoi?
Tout simplement parce que les partis centristes ont renoncé
à occuper le terrain.
Ni l’UDI, ni le Mouvement démocrate n’ont décidé de
présenter un candidat à la prochaine présidentielle, la reine des élections, la
seule qui offre une exposition médiatico-politique aussi importante dans la
durée et dans l’intensité.
Du coup, Juppé, Macron, Valls et pourquoi pas d’autres, ont
pu investir l’espace au centre sans aucune difficulté
Le plus funeste étant que cela s’est fait avec l’aide des
partis centristes qui n’ont pas vu venir le coup, mettant eux-mêmes le ver à
l’intérieur du fruit en adoubant Juppé, en félicitant Macron et en encourageant
Valls.
Disparation des partis centristes (évidemment pas du Centre
comme pensée politique) ou renouveau de ceux-ci, de quel côté l’histoire
penchera in fine, si elle doit pencher au cas l’axe central devienne pérenne et
pas simplement un feu de paille, il est certes trop tôt pour le dire même si la
dynamique ne semble guère être de leur côté.
Quoi de plus terrible serait que les partis centristes
n’aient déjà plus leur destin en main avec comme seule alternative, soit de
rallier un mouvement dont ils ne sont pas les initiateurs et encore moins les
leaders, soit de disparaître du paysage politique.
Si l’axe central, d’opportunité fantastique se transformait
pour eux en fossoyeur, voilà qui serait d’une ironie tragique, sachant qu’ils seraient
un des instigateurs de leur propre ruine et que celle-ci proviendrait de leurs
idées….
Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC