A force de jouer contre Jean-Christophe Lagarde, de
distiller sans cesse des petites phrases, des fausses confidences et des
jugements péremptoires, Hervé Morin n’en finit pas de lézarder l’édifice UDI
qu’il n’a jamais aimé et qui le lui a bien rendu.
Aujourd’hui, il se sent assez fort et, en même temps,
marginalisé à l’intérieur de l’UDI pour ruer constamment dans les brancards
sans se soucier le moins du monde d’une discipline de parti ou, tout
simplement, d’un soutien même ad minima à la direction de la confédération
centriste.
Sa défaite à la direction de cette dernière a été évidemment
un coup rude mais un résultat normal tant une majorité de militants ne
voulaient pas de lui, notamment parce qu’il n’était pas le mieux placé pour
animer une formation indépendante de la Droite.
La suite leur a donné raison puisqu’Hervé Morin ne cesse de
demander le ralliement de l’UDI à LR (et, auparavant, à l’UMP) pour toutes les
élections et pour toutes les prises de position.
Son problème est qu’il en fait un peu trop.
Sans se préoccuper de la moindre cohérence de ses propos, il
a rejoint le discours du FN sur un certain nombre de questions sécuritaires
tout en se rabibochant avec Bayrou (pour embêter Lagarde) mais en faisant la
cour à Sarkozy pour pouvoir avoir la présidence de la région Normandie grâce aux
négociations menées par Lagarde à qui, pourtant, il dénie la légitimité de les
conduire seul parce que l’UDI serait une confédération.
On comprend bien qu’Hervé Morin veut exister par tous les
moyens pour ne pas disparaître politiquement parlant.
En 2012, sa candidature à la présidence de la république a
été un flop total qui démontrait sa quasi-inexistence tant auprès de
l’électorat en général mais aussi de l’électorat centriste en particulier.
De quoi vous faire réfléchir sur la gestion de votre
carrière…
Cette candidature venait après un livre où il s’en prenait
avec violence à Nicolas Sarkozy qui l’avait nommé ministre de la Défense et à
qui il est allé demander la présidence de la Normandie…
Quand à ses dernières sorties médiatiques, elles sont assez
pathétiques même si elles font un petit buzz chez les journalistes avides de
règlements de compte entre centristes.
Ainsi, il s’est fendu d’une analyse sur la primaire assez
fumeuse qu’il va répétant à qui lui tend un micro ou une caméra:
«Sarkozy n’apparaît plus aujourd’hui comme la garantie d’une
alternance en 2017. Juppé est tellement centro-compatible que le soutenir dès
le premier tour entraînerait notre disparition. Et Lagarde ne nous apportera
rien dans cette primaire. Sauf à rendre service à Sarko en affaiblissant Juppé
sans pour autant faire un bon score».
Mais elle devient un peu plus claire quand on sait qu’il prédit
désormais la victoire de François Fillon en 2017 (et donc à la primaire de LR)
– a-t-il déjà négocié un poste ministériel auprès de celui-ci contre son
soutien?!
Autre prédiction du nouveau voyant de la politique, le
retour de Jean-Louis Borloo à l’UDI et sa candidature à la primaire de LR!
Il faut évidemment se poser la question de savoir pourquoi
Hervé Morin n’a pas encore claqué la porte de l’UDI.
Peut-être espère-t-il encore pouvoir la diriger mais cet
espoir est mince et il le sait.
Plus sûrement, il ne veut pas apparaître comme un diviseur
du Centre aux yeux des Français mais également des militants du Nouveau centre
qui, peut-être, ne lui pardonneraient pas.
En tout cas, il serait le mauvais perdant qui s’en va, une
image publique pas très valorisante.
Surtout, à l’intérieur de l’UDI, il a plus de poids pour
négocier son avenir politique.
En dehors de la formation centriste, il ne pèserait pas
grand-chose dans le rapport de force face à LR.
De même, rejoindre le parti de droite serait un bel
enterrement de première qu’ont connu tous les centristes qui l’ont rejoint, de
Jean-Pierre Raffarin à Pierre Méhaignerie, de Jacques Barrot à Marc-Philippe
Daubresse.
Donc, il reste mais se comporte comme s’il était un opposant
à l’UDI.
Bien sûr, Morin pourrait dire qu’il n’est pas le seul à
jouer perso dans cette confédération centriste peu soudée.
C’est tellement vrai qu’on se demande si celle-ci a le
moindre avenir.
Néanmoins il met tellement de hargne à agir contre les intérêts
de son président mais aussi du parti lui-même qu’il semble évident qu’il n’y a
plus sa place.
Ce serait sans doute plus honnête, plus courageux et plus
responsable de sa part de s’en aller.
Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC