2016 sera une année cruciale pour l’UDI.
Toutes les options sont sur la table.
Personne, ainsi, ne sait, à l’heure actuelle, si la
confédération centriste qui soufflera bientôt ses quatre bougies, fera encore
partie du paysage politique à la fin de cette année et dans quel état ou
organisation, ni si elle aura implosé sous les attaques des les forces centrifuges
qui la tiraillent depuis sa création et qu’ils l’ont fragilisée de plus en plus
depuis le départ de son créateur, Jean-Louis Borloo, en 2014, lui qui avait
jeté l’éponge après une grave maladie mais aussi par l’impossibilité de gérer efficacement
la formation qu’il avait créé en 2012.
Car, comme le dit son président, Jean-Christophe Lagarde,
«Le travail ne manquera pas» mais peut-être pas dans le sens qu’il le pense.
Bien entendu, la participation ou non à la présidentielle
avec un candidat du parti va être un débat houleux dans les semaines à venir,
jusqu’au congrès du 20 mars qui décidera (définitivement?) de la question.
Ce qui est une situation inédite dans un parti qui se veut
indépendant, c’est que nombre de ses leaders ont déjà annoncé leur choix de défendre
un candidat extérieur à leur formation avant même que le principe ou non d’une
participation à la présidentielle soit prise.
Si Hervé Morin, François Sauvadet et Maurice Leroy ne
veulent pas d’un candidat UDI sans pour autant, pour l’instant, soutenir une
personnalité, ce n’est pas le cas de Jean-Guy de Courson et de quelques autres
qui affichent leur soutien à Alain Juppé ou d’Yves Jégo qui, lui, s’est rangé
derrière Bruno Le Maire.
Quant au président de l’UDI, Jean-Christophe Lagarde, il
refuse de dire ce qu’il pense après s’être fait élire à la tête du parti en
promettant que celui-ci aurait son candidat indépendant en 2017.
On comprend bien, dès lors, que la question présidentielle
(y aller seule ou participer d’une manière ou d’une autre à la primaire LR dont
le premier tour se tiendra le 20 novembre et qui sera alors pompeusement et
faussement rebaptisée «de la Droite et du Centre») recèle potentiellement
l’implosion et la disparition de la formation centriste qui, rappelons-le est
une confédération permettant à chacune de ses composantes de claquer la porte
quand elle le veut.
Mais au-delà des clivages réels sur cette participation ou
non, qu’ils soient politiques ou personnels, ils ne seront que la façade
publique de la possible séparation.
Car l’UDI est tout sauf unie.
La question des finances du parti en est la preuve
éclatante.
Alors que la confédération est exsangue, ses composantes,
dont la principale, le Nouveau centre dirigée par Hervé Morin, adversaire
acharné de Jean-Christophe Lagarde, refusent de renflouer les caisses, pire de
payer les sommes qu’elles doivent à l’UDI.
Ainsi, toute opposition de quelque nature et intensité
qu’elle soit, est un moyen de marquer ses différences, de s’attaquer et d’avoir
un prétexte de se quitter.
Ce qui est remarquable dans ce contexte n’est pas que l’UDI
fonctionne mal mais qu’elle existe encore.
Cela est sûrement du à l’incapacité d’Hervé Morin et de
quelques autres d’avoir pu claquer la porte après l’élection de Jean-Christophe
Lagarde à la présidence.
Car, dans leur stratégie, ils comptaient bien dénoncer les
irrégularités dans l’organisation du scrutin et dans le vote des militants,
notamment en Seine-Saint-Denis, département contrôlé par Lagarde, pour refuser
le verdict des urnes et faire scission.
Or, s’il y a bien eu quelques faits de tricherie, ils n’ont
pas remis en cause la légitimité de l’élection de Jean-Christophe Lagarde.
De même, aucun mouvement chez les militants n’a pu être pris
comme prétexte pour casser la confédération.
Hervé Morin ne pouvait donc s’en aller sauf à être le
mauvais joueur et risquer son crédit d’homme politique déjà écorné par sa
fausse candidature à la présidentielle de 2012 et son inexistence dans les
sondages.
Evidemment, ce n’est que partie remise et les débats internes
de 2016 porteront en eux-mêmes toutes les possibilités du passage à l’acte pour
Morin.
On le voit déjà avec ses déclaration tonitruantes à propos
de la présidentielle où, avec emphase, il a affirmé que «L'union de la droite
et du centre derrière un candidat au premier tour n'est pas simplement une
nécessité. C'est un devoir».
Déclaration qui est à rapprocher de ses propos révélés par
RTL, selon lesquels si Jean-Christophe Lagarde se présente à la primaire de LR,
il ne votera pas pour lui!
Dans le même temps, Le site internet de la radio publie une lettre
au ton solennel (lire
ici) qu’il a adressée à Lagarde en le vouvoyant dans lequel il lui «soumet»
un agenda pour négocier la présence de l’UDI à la primaire de LR avant même que
le congrès de la formation centriste qui doit déterminer sa position par un
vote démocratique de ses militants n’ait eu lieu…
Et, toujours selon RTL, un proche de Morin aurait déclaré «Si
Alain Juppé est candidat, il avale le centrisme. Il est tellement
centro-compatible qu'il n'y aurait plus d'intérêt à un parti centriste».
C’est dire si le Nouveau centre est prêt à faire ses bagages
pour quitter l’UDI, voire pour rejoindre LR si Juppé gagne la primaire.
Bien sûr, tous ces propos seront certainement démentis
officiellement mais ils sont tellement en phase avec le comportement d’Hervé
Morin et de ses amis que s’ils ne les ont pas prononcés, ils les pensent
fortement.
Pourtant, la logique milite pour, si ce n’est le
développement, au moins le maintien vie de l’UDI jusqu’à la présidentielle.
Principalement parce que si les centristes qui la composent
veulent peser d’une manière ou d’une autre sur cette échéance électorale
primordiale, il faut qu’ils soient unis pour avoir une force politique suffisante
pour pouvoir la négocier à un moment donné ou à un autre avec la Droite.
Si demain Hervé Morin claque la porte, il se retrouvera,
certes, en tant que président du Nouveau centre, libre de négocier son
ralliement avec Les républicains.
Mais il ne vaudra pas grand-chose en terme électoral et d’influence
vis-à-vis de l’électorat centriste.
Même chose pour toutes les autres composantes de l’UDI.
Dès lors, si la raison l’emporte (mais chez les centristes
ce n’est jamais écrit), tous les partis de la confédération devraient encore
faire un bout de chemin ensemble.
Pour autant, on imagine mal, à l’heure actuelle, nombre de
ses leaders cohabiter dans la même formation politique sur le long terme.
Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC
Jean-Louis Pommery
Directeur des études du CREC