François Bayrou, qui a avoué n’avoir pas lu le livre d’Alain
Juppé «Pour un Etat fort», est pourtant venu à sa rescousse sur le plateau d’iTélé
à propos du supposé virage à droite de l’ancien premier ministre de Jacques
Chirac et candidat à la candidature de LR pour les présidentielles.
Selon le président du Mouvement démocrate, «Je ne sais pas
ce que vous appelez de droite. Je vous ai dit que j’étais pour la fermeté. Pour
moi, la sécurité est la première des libertés. Si on se met dans la tête que
l’on a besoin de sécurité pour que la liberté s’exerce, alors on ne voit aucune
difficulté à un positionnement de fermeté. Deuxièmement, il y a des
propositions – celles que j’ai lues dans la presse – qui sont tout à fait intéressantes
et tout à fait justes: par exemple l’idée que l’on puisse mettre en place une
police à l’intérieur des prisons pour savoir quels sont les réseaux qui agissent.
Une autre question se pose: pourquoi y a-t-il autant de téléphones portables
dans les prisons? C’est une question que l’on a le droit de se poser et de
regarder. De ce point de vue, j’approuve ce que dit Alain Juppé et je le
soutiens. Et l’idée que nous avons défendue depuis longtemps qu’il fallait décharger
les policiers et les gendarmes de tâches administratives est très bonne. Pour
moi les idées justes ne sont ni de droite, ni de gauche, ni du centre. Elles
sont des idées fédératrices. C’est autour d’elles que l’on peut bâtir l’unité
nationale dont on a si profondément besoin. J’ai vu cette affirmation de
droitisation. Moi en tout cas, je ne vois pas cela comme un esprit partisan, je
vois cela comme un esprit de sécurité et de justice».
On constatera que dans sa défense d’Alain Juppé, François
Bayrou n’a pas soutenu les mesures les plus à droite prônées par le maire de
Bordeaux concernant la rétention administrative des mineurs immigrés illégaux,
le rétablissement des peines planchers ou la suppression des allocations
familiales pour les familles dont les enfants ne vont plus à l’école.
Par ailleurs, on avait déjà constaté que les présidents du
Mouvement démocrate et de l’UDI avaient de nombreuses divergences lors de l’année
2015 et que leurs vœux respectifs pour 2016 ne les rapprochaient guère, voici
une nouvelle illustration de leurs différences à propos de la mesure ô combien
difficile de la déchéance de nationalité pour les terroristes condamnés par la
justice.
Jean-Christophe Lagarde (UDI) est pour la déchéance de
nationalité pour tous les terroristes français qu’ils soient binationaux ou
non: «Qu'ils soient nés Français ou qu'ils ne le soient pas, qu'ils soient
binationaux ou mononationaux, a-t-il déclaré sur Public Sénat, ces gens-là
doivent pouvoir être déchus de la nationalité française. En tout cas, nous
Français, nous n'avons pas à nous voir imposer des gens qui ne veulent plus de
nous et qui combattent tout ce que nous sommes, tout ce à quoi nous croyons,
tout ce que nous représentons».
François Bayrou, lui, toujours sur iTélé, s’est déclaré pour
la déchéance de nationalité pour les binationaux mais s’abrite derrière le
droit international pour refuser la déchéance pour ceux qui n’ont que la
nationalité française: «J’ai l’impression, sur ce sujet, que la vie politique
française marche sur la tête. Il y a des jours et des jours que l'on a bâti une
polémique sur un sujet qui, à mon avis, est un sujet de bon sens: qu'un
ressortissant français binational qui attaque son pays se voit privé de sa
carte d’identité, franchement, je ne vois pas quelle polémique on peut nourrir
sur ce sujet. Ou alors c’est que l’on veut défendre les droits, les privilèges
ou les acquis, de ceux qui tuent nos concitoyens. Moi, en tout cas, je n’ai pas
l’intention d’avoir ce genre de faiblesse. Mais vous voyez bien que là aussi on
marche sur la tête! (ndlr: pour la déchéance des mononationaux) Pour que le
gouvernement échappe au piège de la gauche, qu’il s’est tendu à lui-même en
mettant la déchéance de la nationalité sur la table, alors on envisage
maintenant la déchéance de la nationalité pour tous les Français. C'est une
absurdité complète parce qu’il y a une règle juridique internationale absolue –
et juridique française –, on ne peut pas expulser quelqu’un qui n’a plus de
nationalité s’il n’y a pas un pays pour l’accueillir. Donc, on envisage de
fabriquer des sans-papiers.»