Hillary Clinton est sûrement la seule personnalité politique
qui a perdu deux élections en les gagnant!
Ainsi, en 2008, la centriste avait remporté le plus grand
nombre de suffrages lors de la primaire démocrate face à Barack Obama qui, de
son côté, avait réussi à obtenir le plus grand nombre de délégués et à devenir
le candidat démocrate puis le président des Etats-Unis.
Rebelote pour cette élection présidentielle où, ce que l’on
pressentait déjà hier lors des premiers résultats, elle a obtenu le plus de
voix mais où Donald Trump comptabilise le plus grand nombre de grands électeurs
ce qui lui permettra de s’installer à la Maison blanche.
Les résultats de la primaire démocrate de 2008 et de
l’élection présidentielle sont bizarrement assez similaires avec Hillary
Clinton autour des 48% et ses deux opposants (Obama en 2008 et Trump en 2016) autour
des 47%.
Dans le cas de l’élection présidentielle de cette année,
Hillary Clinton a obtenu plus de 200.000 voix d’avance sur Donald Trump (avec un
peu moins de 60 millions de suffrages) qui, lui, aura près de 57% des grands
électeurs contre 43% à la candidate démocrate (306 contre 232 selon les
dernières estimations).
Bien entendu, Hillary Clinton connaissait les règles avant
de se lancer dans ces compétitions électorales et, d’ailleurs, elle ne les a
pas remises en cause, concédant immédiatement sa défaite face à Trump dans une
démarche démocratique qu’il faut saluer, tout comme celle de Barack Obama qui a
félicité le vainqueur et qui l’a invité à la Maison blanche pour préparer une
transition dans les meilleures conditions.
Tous deux ont prononcé des discours centristes d’une grande
dignité et d’une grande force politique où ils ont mis en avant la démocratie.
Reste que la légitimité de Donald Trump, comme celle de
George W Bush en 2000 où celui-ci avait obtenu moins de voix qu’Al Gore, se
retrouve entamée et pose la question de l’organisation des élections
américaines.
Si, après la victoire de Barack Obama en 2008 face à Hillary
Clinton, le Parti démocrate a décidé de revoir les modalités de désignation de
son candidat avec, désormais, un vainqueur qui est également majoritaire en
voix, ce n’est pas du tout le cas avec le système américain.
Celui-ci est fédéral, c’est-à-dire qu’il se passe Etat par Etat
et où «the winner takes all» pratiquement partout, c’est-à-dire où le vainqueur
de chacun des scrutins remporte la totalité des grands électeurs mis en jeu.
Exemple, Donald Trump a remporté les 29 super-délégués de la
Floride en obtenant 49,1% des suffrages contre 47,8% à Hillary Clinton…
Il faudra bien que les Etats-Unis trouvent une solution pour
faire coïncider majorité des voix au niveau national et majorité des grands
électeurs (ou de supprimer cet archaïsme).
Car les deux derniers présidents républicains élus à la
Maison blanche (George W Bush et Donald Trump), les plus à droite de l’histoire
du pays, l’ont été en étant minoritaires dans le pays, ce qui bafoue une des
règles essentielles de la démocratie.
Et si l’on fait le total, sur les sept dernières élections,
les démocrates ont été systématiquement majoritaires lors des présidentielles
(avec 5 candidats centristes) ainsi que dans nombre d’élections au Congrès qu’ils
ont perdues.
Ici, on parle de la pratique de «gerrymandering», c’est-à-dire
du découpage des circonscriptions pour avantager un parti.
Celui qui l’a le plus utilisé est le Parti républicain pour
permettre de faire élire des représentants et des sénateurs de plus en plus
radicaux et en nombre.
Il y est parvenu en contrôlant la plupart des congrès des
Etats de la fédération car, dans les élections pour ceux-ci l’abstention est
très importante, en particulier chez les minorités ethniques et chez les jeunes
favorables majoritairement au Parti démocrate, alors que les personnes âgées,
favorables majoritairement au Parti républicain, se déplacent pour voter.
L’injustice ressentie sans aucun doute par Hillary Clinton
face à sa victoire en nombre de voix n’est cependant pas la seule et peut-être
pas la plus importante dans sa défaite face à un populiste démagogue qui rend
incertain le futur des Etats-Unis et du monde dont ils sont la première puissance.
Depuis trente ans, elle traîne comme un boulet une
détestation des journalistes et une série d’insinuations, propagées souvent
avec gourmandise par les médias, pour ternir son image, voire la discréditer
définitivement (criminelle, meurtrière, escroc, dissimulatrice, corrompue,
manipulatrice avec, pour faire peur aux bien-pensants, lesbienne, complice de
viols soi-disant commis par son mari, activiste d’extrême-gauche déguisée en
centriste, etc.).
Rappelons qu’elle n’a jamais été condamnée, mieux, elle n’a
jamais été accusée devant un tribunal et qu’aucune attaque n’a jamais été
prouvée (comme celle de la gestion de ses e-mails où elle n’a commis aucune
faute pénale mais qui lui a tout de même coûté son élection…) ce qui met en
lumière cette collusion improbable entre des journalistes majoritairement à
gauche et des propagateurs de boules puantes venus de la droite et de l’extrême-droite.
Car, ne soyons pas dupes des justifications des journalistes
américains – souvent pathétiques et irrecevables – et de la propagande de Trump
qui estime que les médias étaient tous du côté de Clinton, les faits disent le
contraire.
Tout juste, devant la menace Trump, la presse, surtout
écrite, a eu un sursaut démocrate et républicain, bien trop tardif et bien trop
mou, sauf quelques exceptions.
Cela confirme qu’être au centre vous expose à être la cible
sur votre droite et votre gauche.
Mais aussi qu’être une femme ne rend pas la tâche facile de
parvenir à la présidence de la plus grande puissance du monde.
On l’avait déjà constaté en 2008 avec des propos sexistes
dans les médias quand elle affrontait Barack Obama, alors chouchou au-delà de
toute décence de ses derniers.
Sans oublier que ses extraordinaires capacités
intellectuelles sont souvent antinomiques avec des campagnes où le raccourci et
la caricature donnent de meilleurs résultats, Trump étant emblématique jusqu’à
l’absurde de ce constat.
Ainsi, nous n’aurons pas la première femme présidente des
Etats-Unis, nous n’aurons pas deux centristes convaincus qui se succèderont à
la Maison blanche et, sans doute, la meilleure politique du pays comme le pense
avec justesse Barack Obama.
Dans son discours auprès de son équipe de campagne après sa
défaite, Hillary Clinton a exhorté ses sympathisants, notamment les jeunes, a
continué leur combat politique et à croire dans la démocratie et le progrès.
On ne sait pas de quoi sera fait son futur mais il ne faut
jamais oublié qu’elle n’a jamais baissé les bras même dans l’adversité.
On devrait la retrouver dans quelques temps dans des luttes
qui ont toujours été importantes pour elles, notamment celles concernant les droits
des enfants et au sein de la fondation Clinton qui a été très injustement
critiquée lors de la campagne alors même qu’elle a œuvré pour de multiples
causes humanitaires et démocratiques dans le monde avec succès pendant que la
fondation Trump était largement passée sou silence.
Il faut dire que sa principale activité était de payer des
portraits grandeur nature de son fondateur ou de payer les frais de justice des
procès qu’il perdait.
Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC
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