Les experts et autres journalistes du monde entier battent
leur coulpe.
Non pas d’avoir permis l’élection de Donald Trump en le
mettant constamment en scène, en propageant largement ses idées, en en faisant
in fine un candidat acceptable et en tapant sans cesse sur Hillary Clinton.
Non, ce n’est pas cela qu’ils se reprochent mais de ne pas
avoir compris le peuple américain, de ne pas avoir vu que ce peuple était en
colère et qu’il avait décidé de choisir un populiste démagogue.
Et ils ont encore tout faux!
Car le peuple américain a choisi majoritairement Hillary
Clinton.
En effet, celle-ci a gagné le vote populaire avec
actuellement plus d’un million trois cent mille voix soit plus d’1% de
différence en plus face à son adversaire (et ces chiffres devraient encore
augmenter dans les jours qui viennent).
Dans aucun pays démocratique au monde sauf aux Etats-Unis,
elle aurait perdu cette élection.
Et le pire, c’est que le système qui a été mis en place devait
éviter qu’un Donald Trump puisse un jour
s’assoir dans le Bureau ovale de la Maison blanche…
Car les Pères fondateurs du pays, rédacteurs de la
Constitution avaient une peur bleue que le peuple puisse élire un populiste
démagogue.
Pour ce faire, ils ont imaginé un système électoral à deux
étages et les fameux «checks and balances».
Ces derniers, en divisant le pouvoir entre le Président, le
Congrès et le Cour suprême devaient empêcher qu’une faction puisse diriger le
pays et n’en faire qu’à sa guise.
Sauf que, désormais, les républicains vont contrôler les
trois institutions avec nombre d’élus de droite radicale voire d’extrême-droite…
Le premier, lui, avec son organisation à deux niveaux, le
vote populaire qui désigne des grands électeurs qui, eux, élisent in fine le
président, a été mis en place pour que des «sages» puissent empêcher qu’un
personnage douteux et dangereux, excitant les bas instincts du peuple, dirige
le pays.
Or, c’est grâce à lui que Donald Trump, qui ressemble comme
deux gouttes d’eau au portrait-robot de ce personnage à éviter à tous prix, a
gagné face à une centriste, Hillary Clinton.
Voilà une défaite cuisante pour ces Pères fondateurs, hommes
modérés, voire centristes pour certains comme James Madison, qui voulaient une
démocratie républicaine consensuelle et adepte du compromis.
Ajoutons que l’organisation du vote Etat par Etat avec la
règle du «winner takes all», c’est-à-dire où le vainqueur gagne tous les grands
électeurs même s’il l’emporte d’une voix, a également joué en faveur de Trump.
Dans l’histoire des Etats-Unis, le cas de figure où un
président minoritaire a gouverné s’est réalisé trois fois.
La première a eu lieu en 1876 avec l’élection du républicain
Rutheford Hayes qui fut battu de plus de 250.000 voix par le démocrate Tidlen
(ce qui, à l’époque, équivalait à 51% contre 48% des voix pour le candidat
démocrate) suite à fraudes massives.
La deuxième a eu lieu en 2000 avec George W Bush, un autre
républicain, qui a battu Al Gore alors que ce dernier avait obtenu plus de
500.000 voix d’avance.
Résultat, on a eu un gouvernement très marqué à droite avec
les attentats du 11 septembre – Bush a refusé de croire en la menace d’un
attentat de grande envergure sur le sol du pays –, la guerre en Irak pour punir
un Saddam Hussein – qui n’avait aucune responsabilité dans ces attentats – et
la pire crise économique mondiale depuis 1929 à cause d’un refus de réguler les
activités financières débridées de Wall Street et des grandes banques.
La troisième, c’est aujourd’hui avec Trump, toujours un
républicain...
Et nous ne savons pas ce qui va se passer dans les quatre
ans qui viennent.
Tout juste, nous savons qu’il a nommé comme numéro deux de
son équipe à la Maison blanche un homme d’extrême-droite, raciste, sexiste et
adepte des théories du complot, nomination qui a été célébrée par le parti
néonazi et le Ku Klux Klan…
Une pétition qui a déjà recueilli des millions de
signatures, réclame aujourd’hui que les grands électeurs – qui ont la liberté
de vote – n’élisent pas Donald Trump.
Cela, malheureusement, semble impossible.
Non pas légalement mais politiquement.
En effet, depuis que le pays existe, les grands électeurs
ont toujours validé les résultats des élections et l’on voit mal qu’ils ne le
fassent pas aujourd’hui.
Il faudrait une menace réelle et concrète sur la démocratie
américaine.
Et si l’on peut craindre que cela puisse survenir dans les
quatre ans qui viennent, celle-ci demeure encore dans les propos plus que dans
les actes.
Alors, journalistes et experts qui promettent d’être plus en
phase avec la «colère» du peuple, soyez plutôt plus clairvoyants, regardez les
faits et mobilisez-vous pour protéger la démocratie républicaine et cette
majorité d’Américains qui ont dit qu’ils ne voulaient pas de Trump.
Ensuite, et seulement ensuite, occupez-vous de ces électeurs
en désarroi qui ont choisi de voter pour un démagogue populiste.
Mais les faits sont les faits: ils sont minoritaires.
Et c’est Hillary Clinton qui est l’élue du peuple.
Une élue battue, tout comme le peuple.
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