Déjeuner entre Alain Juppé et les centristes |
On se croirait de retour en 1995 lorsque les centristes
accordèrent très majoritairement leur soutien à Edouard Balladur face à Jacques
Chirac pour l’élection présidentielle avec le succès que l’on sait...
Ainsi, pour 2017, le gros des troupes centristes, que ce
soit ceux du Mouvement démocrate, de l’UDI ou de LR ont choisi de soutenir
Alain Juppé pour la primaire de cette dernière formation.
Et même si ce soutien connait quelques dispersions pour les
divers candidats en lice pour le premier tour de ce scrutin, il semble évident
qu’au second tour puis pour la présidentielle, évidemment, l’énorme majorité
des centristes se rangera derrière le maire de Bordeaux s’il gagne, ce que tous
les sondages affirment.
Ironie de l’histoire, Alain Juppé était en 1995 le fidèle d’entre
les fidèles de Jacques Chirac, celui qui fut alors abandonné par le gros des
troupes centristes.
Sans oublier qu’en 2002, Juppé fut aussi celui qui créa l’UMP
pour phagocyter les mêmes troupes dans un parti unique de la Droite et du Centre.
Il faut espérer, en la matière et pour les centristes, que l’histoire
ne soit pas un éternel recommencement…
Encore que celle-ci balbutie déjà.
Comme pour Edouard Balladur, gaulliste peu porté vers le Centrisme,
les centristes se sont jetés dans les bras d’un homme, Alain Juppé, qui ne fait
pas partie de leur famille et qui, bien qu’homme de droite «modéré» et «central»,
selon ses propres dires, n’est pas du Centre, loin de là, malgré les accusations
venues du camp de Nicolas Sarkozy et sensées le discréditer, démontrant une
nouvelle fois le peu de respect que l’ancien président de la république accorde
aux centristes…
Ce renoncement à porter leurs propres couleurs est
évidemment un nouvel échec pour les centristes après trois tentatives
infructueuses de François Bayrou et en dit long sur la faiblesse des partis
centristes alors même que beaucoup de Français inclinent vers le Centre et ses
valeurs sans qu’ils sachent les séduire.
De même, on voit bien qu’actuellement entre les différentes
chapelles centristes, le seul dénominateur commun s’appelle… Alain Juppé.
Si les troupes clairsemées du Mouvement démocrate n’ont pas
eu trop de mal à s’unir derrière le soutien de leur président derrière son
ancien premier ministre, la cacophonie entre le MoDem et l’UDI et, surtout, à l’intérieur
de ce dernier parti – où même les soutiens à un même candidat se sont faits
dans la division – démontre par l’absurde que l’union des centristes pour la
présidentielle se fera uniquement sur le nom d’un homme de droite!
Et si Alain Juppé n’était pas désigné comme le candidat de
LR, on assisterait sans nul doute à un chacun pour soi centriste avec François
Bayrou qui se présenterait, Jean-Christophe Lagarde, Laurent Hénart et Chantal
Jouanno qui se rapprocheraient d’Emmanuel Macron pendant qu’Hervé Morin et ses
amis soutiendraient le candidat officiel de LR même s’il s’appelle Nicolas
Sarkozy en rejoignant alors Maurice Leroy, tandis que les derniers centristes
de LR joueraient la loyauté au parti quel que soit son représentant pour 2017.
Juppé, dénominateur commun: CQFD.
Cette situation est à la fois consternante et pathétique –
risible et ridicule pour les adversaires du Centre –, même si Alain Juppé est
un homme compétent, intelligent, surtout, désormais largement centro-compatible.
Consternante parce qu’elle démontre que les partis
centristes ne représentent presque rien aujourd’hui et que leur seul moyen d’exister
politiquement et médiatiquement c’est dans leurs soutiens à une primaire d’un
parti de droite.
Là, ils parviennent à faire les (petits) gros titres et à
être invités sur les plateaux de télévision et les studios de radio.
Pathétique parce que cela montre aux yeux de tous les
Français que les centristes n’ont aucun projet et programme à leur proposer qui
nécessiteraient un des leurs pour le porter devant les électeurs.
Sans oublier, évidemment, ce manque de courage politique où
aucun centriste n’a osé se déclarer candidat potentiel simplement parce que les
sondages étaient plus ou moins catastrophiques.
C’est la triste démonstration que, pour eux, les petites
situations acquises sont plus importantes que le combat des idées qui
nécessitent de monter au front pour les défendre et les promouvoir même pour si
ensuite, en cas d’échec, on se rapproche de celui ou de ceux qui ont les
visions les plus proches du projet centriste.
Et là, c’est une faute politique qui enfonce un peu plus le
Centre et le Centrisme.
Mais ont-ils encore quelque chose à voir dans cette
histoire?
Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC
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