On n’avait jamais vu cela.
Même si les médias audiovisuels continuent à jouer, pour la
plupart, la (fausse) carte de l’égalité et de l’équité entre les deux candidats
à la présidentielle, estimant, entre autres, que le mensonge est une arme
électorale (dans une ère de la «post-vérité»), d’où souvent une absence de
réactions aux énormités de Trump, un nombre très important de journaux et de
magazine se sont prononcés ces dernières semaines contre Donald Trump.
S’il était élu, le candidat républicain serait selon eux,
non seulement, le président le moins qualifié de toute l’histoire du pays mais,
en plus, il serait une menace majeure pour la démocratie.
Aux Etats-Unis, à chaque élection, une partie de la presse
écrite prend partie pour l’un ou l’autre candidat, c’est une tradition.
Ainsi, sans surprise, le New York Times s’est prononcé en
faveur d’Hillary Clinton.
Ce qui est totalement nouveau, en revanche, c’est le nombre
de journaux républicains qui ont choisi la candidate démocrate dans un
mouvement que l’on pourrait baptiser de «Tout sauf Trump».
Ce qui est également inhabituel, c’est de voir ceux qui
généralement ne prennent partie pour aucun candidat, devant la possibilité de
voir Trump s’installer dans le Bureau ovale, appellent à voter pour son
opposante.
Ainsi, le magazine The Atlantic, fondé en 1857, a décidé,
pour la troisième fois seulement de son histoire, de soutenir un candidat.
Après avoir choisi Abraham Lincoln (républicain) en 1860
parce qu’il était contre l’esclavage puis Lyndon Johnson (démocrate) en 1964
qui était face à l’extrémiste de droite Barry Goldwater, il a décidé d’appeler à
voter pour Hillary Clinton afin de faire barrage à Donald Trump.
Comme l’explique un éditorial du magazine, «nous sommes
impressionnés par beaucoup des qualités de la candidate démocrate pour la
présidentielle, même si nous sommes exaspérés par d’autres, mais nous sommes
particulièrement inquiets avec le candidat du Parti républicain, Donald J. Trump,
qui pourrait être le candidat d’un grand parti le plus ostentatoirement incapable
des 227 années d’histoire de la présidence américaine».
Une charge lourde qui est reprise par le seul quotidien à
diffusion nationale, USA Today.
Ce dernier qui n’avait jamais soutenu un candidat s’est
également prononcé en faveur de Clinton en déclarant: «Au cours des 34 ans de l’histoire
de USA Today, le comité éditorial n’avait jamais pris partie dans la course
présidentielle. Nous n’avions jamais eu une bonne raison de modifier notre
approche. Jusqu’à maintenant. Cette année, le choix n’est pas entre deux
candidats capables des deux grands partis qui ont des différences idéologiques
importantes. Cette année, un des candidats est, par un consensus unanime du
comité éditorial, inapte pour la présidence».
Du côté de la presse républicaine, on sonne la charge contre
le promoteur newyorkais.
Le New Hampshire Union Leader qui a appelé à voter pour le
candidat républicain depuis 1916, écrit que Trump est «un menteur, un
fanatique, un bouffon. Il a dénigré tous les individus ou les groupes qui lui
déplaisent. Il a déshonoré les vétérans de l’armée et leurs familles, s’est
moqué des problèmes physiques et a changé ses visions politiques aussi souvent
qu’il a changé de femmes».
L’Arizona Republic soutient un démocrate pour la première
fois depuis 1890 notamment parce que Trump, «au lieu d'offrir des solutions, accroche
des boucs émissaires aux arbres comme des piñatas en invitant les gens à se
défouler en les frappant».
Le Houston Chronicle, dans un Texas très majoritairement
républicain est dans le même cas et ne mâche pas ses mots: «N'importe laquelle
des qualités de Trump vaut moins que rien – son tempérament erratique, ses pratiques
douteuses dans les affaires, son racisme, ses inclinations d'homme fort
semblables à celles de Poutine et sa démagogie de faux populiste, son mépris
pour l'Etat de droit, son ignorance – sont suffisantes pour le disqualifier».
Tout comme le Dallas Morning News, qui n’avait pas soutenu
un démocrate depuis 1944 et son soutien à Franklin Roosevelt alors que la
Deuxième guerre mondiale faisait rage.
Le quotidien écrit que Trump «joue sur la crainte –
exploitant les bas instincts de xénophobie, de racisme et de misogynie – pour
révéler le pire dans nous tous, plutôt que le meilleur. Ses changements en
série dans des questions fondamentales révèlent une absence étonnante de
préparation. Et ses insultes improvisées ainsi que ses tweets de minuit montrent
un dangereux manque de jugement et de contrôle de ses pulsions.»
Le San Diego Union-Tribune qui, en 143 ans d’existence,
avait toujours soutenu le candidat républicain, a annoncé choisir Clinton parce
que Trump est «vindicatif, malhonnête et impulsif».
Pour le Cincinnati Enquirer, qui n’avait pas choisi un
démocrate depuis 1916, «Trump est un danger immédiat et évident pour notre pays».
Même une membre du pourtant très conservateur et très
républicain Wall Street Journal, propriété du très à droite Rupert Murdoch,
Dorothy Rabinowitz, s’est aussi prononcée en faveur d’Hillary Clinton en
écrivant que «son élection est la seule chose qui sépare la nation américaine
du règne du président le plus instable, le plus fièrement inculte, le plus
inapte psychologiquement à pouvoir jamais entrer à la Maison blanche.
Certains journaux conservateurs ne son pas allés jusqu’à
soutenir Clinton mais ont pris position contre Trump.
C’est le cas, notamment, du Detroit News qui, depuis sa
création en 1873, avait toujours appelé à voter républicain: «Trump est sans
principe, instable et très vraisemblablement dangereux. Il ne peut pas être
notre président».
Il est difficile de savoir si ces prises de position ont un
effet sur le lectorat de ces journaux et sur l’électorat.
Selon USA Today, «Le nombre de surprises dans les soutiens
pourrait avoir, cette année plus d’impact. Une étude de 2011 de Chun-Fang
Chiang et Brian Knight, publié par Oxford University Press, a constaté que les soutiens
peuvent avoir de l’influence, ajoutant, ‘le niveau de cette influence,
cependant, dépend de la crédibilité du soutien. Ainsi, les soutiens pour le
candidat démocrate des journaux de gauche sont moins influents que des
approbations de journaux indépendants ou de droite et de même pour les soutiens
pour le candidat républicain’.»
Quoiqu’il en soit, elles montrent l’énorme crainte que
ressent une grande partie de l’Amérique devant la possibilité de voir Donald
Trump l’emporter le 8 novembre.
Sondages
des sondages au 7 octobre 2016
|
|||
L’avance de
Clinton devient plus conséquente
|
|||
|
Clinton
|
Trump
|
Ecart
|
Election projection
|
48,0%
|
44,6%
|
Clinton 3,4
|
Five Thirty Eight (1)
|
44,6 %
|
39,9%
|
Clinton 4,7
|
Huffington Post
|
48,3%
|
41,7%
|
Clinton 6,6
|
New York Times
|
45,0%
|
41,0%
|
Clinton 4,0
|
Polltracker TPM
|
47,0%
|
41,0%
|
Clinton 6,0
|
Pure Polling
|
47,6%
|
43,5%
|
Clinton 4,1
|
Real Clear Politics
|
48,1%
|
44,2%
|
Clinton 3,9
|
270 to win (1) (2)
|
48,3%
|
43,0%
|
Clinton 5,3
|
(1) Prend en
compte 3 candidatures (+ Gary Johnson – Libertarian party)
(2) Prend en
compte un mois de sondage alors que les autres prennent
en compte autour de 15 jours
de sondages
Alexandre Vatimbella avec l’équipe du CREC
Présidentielle USA 2016
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