Le socialiste Bernie Sanders a remporté, comme prévu, la
primaire du Wisconsin avec 56,53% des voix contre 43,14% à Hillary Clinton.
Cette nouvelle victoire, la sixième d’affilée, l’installe
dans une dynamique face à la centriste pour devenir le candidat du Parti
démocrate à la présidentielle même si l’ancienne secrétaire d’Etat de Barack
Obama demeure encore l’ultra-favorite.
Reste que l’on peut se poser la question de savoir si Hillary
Clinton est faite pour une élection aussi dure que la présidentielle américaine
alors même qu’en 2007 elle survolait les sondages avant de se confronter à
Barack Obama qui l’a battue, tout comme c’était le cas en 2015 face à Bernie
Sanders qui parvient à la mettre actuellement en difficulté.
Son échec en 2008 face à Barack Obama lors des primaires
avait montré nombre de faiblesses dans une compétition où tous les coups sont
permis et où certains candidats passent à la trappe sur des questions mineures
voire des mensonges proférés par leurs opposants ou pour une question d’image s’ils
ne parviennent pas à répondre aux attaques ou à montrer une forte personnalité.
Il semblait que sa nouvelle candidature pour 2016 avait pris
en compte tous ces pièges et que les sujets sensibles avaient été passés au
crible avec des réponses déjà prêtes et crédibles.
Sauf que l’irrationnel a une nouvelle fois dicté son agenda
avec l’aide, évidemment, de tous ceux qui travaillent à détruire les
candidatures des adversaires de leurs hérauts.
Sans oublier, évidemment, l’hostilité du monde des médias
dont on a souvent parlé ici.
Surtout son équipe n’avait sans doute pas prévue
l’apparition puis l’émergence improbable d’un socialiste de 74 ans,
presqu’inconnu du grand public et qui est venu s’agréger avec succès à la vague
populiste et démagogique qui s’est abattue sur les Etats-Unis depuis la
création en 2009 du mouvement d’extrême-droite Tea Party mais aussi du
mouvement d’extrême-gauche Occupy Wall Street de 2011.
Cette vague n’est d’ailleurs pas une exception de l’Amérique
mais bien un phénomène plus large qui touche l’ensemble des démocraties
républicaines, de l’Espagne à la France, de la Grèce à la Grande Bretagne, de
l’Allemagne à l’Italie, en passant par le Portugal, la Pologne ou la Hongrie.
Seule, bizarrement, l’Amérique centrale semble moins
touchée, pour l’instant, avec des populations qui viennent de renvoyer lors d’élections
les populistes démagogues au Venezuela et en Argentine et, sans doute bientôt
au Brésil.
Pour en revenir à Hillary Clinton, elle semble être le
réceptacle de toutes les acrimonies et les antipathies des Américains – mais aussi
des Européens – vis-à-vis du système politique largement décrédibilisé depuis
le début de ce siècle.
Dès lors, elle est accusée de tous les maux, même ceux dont
elle n’est pas responsable (ainsi, par exemple, des décisions prises par Obama
en matière de politique étrangère lorsqu’elle était sa secrétaire d’Etat et
alors même qu’elle n’était pas d’accord avec la président).
Sans aucune preuve – elle n’a jamais été condamnée par un
tribunal et aucune enquête journalistique ne l’a jamais démontré – elle est
perçue comme une personne malhonnête, à qui l’on ne peut pas faire confiance.
Evidemment, ses adversaires républicains mais aussi
démocrates – Bernie Sanders ne s’est pas gêné de laisser propager quelques
mensonges à son encontre – ont utilisé cette perception de la population pour
tenter de la décrédibiliser.
Et ses maladresses assez nombreuses ainsi que ses réactions
souvent peu à la hauteur de l’enjeu, on fait le reste.
D’autant plus qu’elle est la cible constante d’activistes
qui tentent de la pousser à la faute et de journalistes qui, comme nombre d’études
l’ont montré, sont d’une extrême agressivité avec elle par rapport aux autres
candidats, même Trump!
Etonnamment, dans un tel contexte, elle demeure encore la
favorite pour gagner la présidentielle.
Car il y a un domaine où elle fait quasiment l’unanimité, c’est
sa compétence et son expérience.
Ainsi, les Américains estiment qu’elle est capable de
diriger le pays, qu’elle est prête pour la fonction et qu’elle sait où elle va
même si cela ne les fait pas rêver comme ils rêvent aux promesses irréalisables
d’un Trump et d’un Sanders.
Néanmoins, personne ne peut dire si sa candidature pourra résister
au déversement de haine qui se produira si elle est la candidate du Parti
démocrate pour l’élection du 8 novembre prochain.
Car si elle explique qu’elle est désormais blindée contre
tous les coups tordus parce qu’ayant été la personnalité politique la plus
critiquée et la plus insultée, il n’est pas sûr qu’elle parvienne à repousser
toutes les vagues d’attaques qui, les unes après les autres, la prendront pour
cible et risquent de la couler définitivement.
A noter que du côté républicain, Donald Trump a subi une
défaite lourde de sens dans le même Etat du Wisconsin, arrivant en seconde
position derrière Ted Cruz (35,12% contre 48,25%, 3 délégués contre 33).
En effet, après une semaine catastrophique pour lui où ses
propos très controversés sur l’avortement, sur le soutien à un candidat
républicain si ce n’était pas lui le nominé et quelques autres provocations et/ou
maladresses du même genre, il a été battu par son rival le plus dangereux à la
nomination républicaine.
Mais il serait très aventureux de se réjouir de cette montée
en puissance de Cruz qui, au-delà d’être une alternative moins grossière que
Trump, est un homme de l’extrême-droite et, qui plus est, psychorigide.
Alexandre Vatimbella avec l’équipe du CREC
Présidentielle USA 2016
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