Valls, Hollande, Macron |
C’était sans doute couru d’avance.
A un peu plus d’un an de la présidentielle, il faut réunir
son camp (quitte ensuite à s’ouvrir dans la dernière ligne droite) et c’est ce
qu’à fait François Hollande avec le remaniement ministériel du 11 février.
Pas d’ouverture vers les centristes, qui n’était pas à
l’ordre du jour mais, en revanche, une gauchisation évidente de l’équipe
gouvernementale.
Certes, pas à gauche toute mais vers une social-démocratie à
l’ancienne et non vers plus de social-libéralisme à la Emmanuel Macron et pas
vraiment non plus vers le social-réformisme de Manuel Valls.
C’est donc une certaine distance qui est mise par rapport à
cet axe central (allant des gaullos-réformistes de droite aux
sociaux-réformistes de gauche en passant par les libéraux sociaux du Centre et
les sociaux-libéraux) dont les Français demandent la concrétisation dans les
sondages.
L’entrée dans le gouvernement de Jean-Marc Ayrault,
d’Emmanuelle Cosse et de quelques autres – même la présence du président des
Radicaux de gauche, Jean-Michel Baylet – est plus dans une tradition socialiste
française à la François Mitterrand du premier septennat, de 1981 à 1988, un
certain retour à la «gauche archaïque» pourfendue par Michel Rocard dans les
années 1970-1980.
Bien sûr, il s’agit d’un pari politique de François
Hollande.
Au-delà d’une critique venue de tous les bords sur l’aspect
politicien du remaniement – Jean-Christophe Lagarde (UDI), parlant de
«placement des petits copains» – il est
plus intéressant de se demander si la stratégie adoptée peut fonctionner.
Rappelons que celle-ci est d’abord une constante en
politique avant chaque scrutin d’importance: réunir son camp, en l’occurrence,
ici, la gauche socialiste et ses alliés plus ou moins fidèles de ces dernières
années, les Radicaux de gauche et les écologistes sociaux-démocrates ou
sociaux-libéraux.
Réunir ce «noyau dur» permet de montrer que l’on est uni,
que l’on forme un bloc difficile à bouger pour les contestataires (frondeur du
PS et gauche radicale) et que l’on est bien à gauche.
Une stratégie mitterrandienne qui a fait ses preuves.
Et, en 2017, ceci est d’une importance sans doute jamais
aussi grande depuis le début de la V° République car le match se fera selon
toute vraisemblance à trois, le candidat de droite, le candidat de gauche et le
candidat d’extrême-droite.
Comme le dernier nommé, Marine Le Pen, puisqu’elle vient
d’ailleurs d’annoncer sa candidature, est pratiquement sûr selon les sondages
de se retrouver au second tour, il reste une place.
Le pari de Hollande est que celui qui la gagnera, sera celui
qui réunira son camp surtout sur la peur que ce soit le candidat de l’autre
bord qui l’emporte.
Car, dans son souhait le plus ardent, il espère que le
candidat LR sera Nicolas Sarkozy, personnalité clivante à l’extrême et qui est
un repoussoir pour la quasi-totalité des électeurs de la Gauche mais aussi pour
une grande partie de ceux du Centre.
Dès lors, réunir la Gauche en entier en marginalisant les
autres candidatures venues de ce camp au motif qu’elles pourraient permettre à
Sarkozy de se qualifier pour le second tour puis de l’emporter et de revenir à
l’Elysée sera une tâche pas insurmontable, loin de là, qui pourrait donner les
résultats escomptés.
Dans le même temps, même s’ils ne votent pas pour Hollande,
les électeurs centristes pourraient se reporter sur d’autres candidats que
l’ancien président de la république, lui faisant perdre des points cruciaux.
Quant au deuxième tour face à Marine Le Pen, le réflexe
républicain devrait encore fonctionner en 2017, réflexe qu’il s’agira de
dynamiser quelque peu avec des promesses œcuméniques au bon moment.
Battre un Sarkozy peu aimé au premier tour et une Marine Le
Pen repoussoir au second, c’est sans doute la seule chance de l’emporter de
François Hollande mais elle existe réellement.
Du coup, le social-libéralisme d’Emmanuel Macron masi
également le social-réformisme de Manuel Valls sont les grands perdants de ce
remaniement.
Non pas qu’ils soient éliminés (Valls est toujours le
Premier ministre et Macron toujours le ministre de l’Economie) mais ils ne sont
pas promus alors même que les deux personnalités qui les portent sont celles
qui sont en tête des baromètres de popularité à gauche.
D’ailleurs, il aurait été difficile de s’en passer puisque
les sondages montrent que les sympathisants socialistes soutiennent majoritairement
la ligne politique, et de Macron, et de Valls.
Evidemment, pour que le pari réussisse, il faudra quelques
résultats au niveau des politiques suivies, essentiellement en matière de
sécurité et de lutte contre le terrorisme ainsi qu’en matière économique,
particulièrement dans la création d’emplois.
On peut penser qu’une attaque terroriste sanglante ou une
croissance atone avec augmentation du chômage, deux éventualités que l’on ne
peut écarter et qui ressortent de l’environnement international de la France
mais également de ses faiblesses actuelles, sonneront l’hallali d’un deuxième
quinquennat de François Hollande.
Ce qu’il y a de plus paradoxal, c’est que les réussites des
politiques du nouveau gouvernement ne se feront qu’en suivant les lignes sociale-libérale
et sociale-réformiste d’Emmanuel Macron et de Manuel Valls et non dans un
retour aux vieilles et mauvaises recettes du socialisme à la française auquel
la nouvelle équipe de ministres fait plutôt penser.
En s’éloignant du Centre en apparence, François Hollande ne
peut espérer son salut que par une politique de plus en plus centriste.
Comme en sont temps, son maître et mentor, François Mitterrand...
Comme en sont temps, son maître et mentor, François Mitterrand...
Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC
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