En 2016, pour exister, grandir et peser réellement sur le
débat politique national, le Centre devra relever d’importants défis: celui de
l’unité, celui de l’indépendance, celui de la recomposition et celui de la
crédibilité.
► Le défi de l’unité
des centristes
Bien entendu, personne ne s’attend à ce que le Mouvement
démocrate et l’UDI se rapprochent sensiblement, ni même que L’Alternative soit
réactivée.
Personne, non plus, ne s’attend à ce que Jean-Christophe
Lagarde et Hervé Morin deviennent des amis, ni même que François Bayrou daigne
considérer Jean-Christophe Lagarde comme un interlocuteur sérieux.
Et pourtant, c’est ce qu’il faudrait au minimum pour que le
Centre commence à acquérir cette véritable dynamique qui lui manque.
Mais, au lieu de cela, beaucoup s’attendent à ce que le
MoDem et l’UDI soient des concurrents déterminés pour s’approprier l’espace
centriste, que l’UDI implose et que d’autres micro-partis voient éventuellement
le jour dans la foulée pendant que certains rejoindront carrément Les
républicains.
C’est dire si la fusion des partis centristes, véritable
acte fondateur d’un nouveau départ pour le Centre en France demeure une
fiction.
► Le défi de l’indépendance
du Centre
L’indépendance du Centre existe dans les appellations des
partis et dans les discours de leurs dirigeants mais pas dans les faits, loin
de là.
Même François Bayrou qui a confondu alliance et allégeance
pendant longtemps en se voulant «indépendant» là où il était dans un isolement complet,
s’est rallié à la Droite sans aucune discussion de fond pour les
départementales et les régionales et ce même sans en parler avec l’UDI.
2016 sera une année charnière de ce point de vue.
Ou les formations centristes décident de présenter un ou
plusieurs candidats à la présidentielle de 2017 et elles actent enfin leur
véritable indépendance dans ce qui est la reine des élections françaises, ou
elles décident de se ranger derrière la Droite et son candidat issu des
primaires en n’étant qu’un appendice de LR (Les républicains).
Tout concoure à penser que c’est la deuxième solution qui
sera choisie par l’UDI mais aussi par le Mouvement démocrate si Alain Juppé est
le candidat de LR.
A noter que ce cas de figure, aucun candidat centriste à la
présidentielle, ne s’est produit qu’une seule fois au cours de la V°
République, en 1995 quand les centristes ont soutenu majoritairement Edouard
Balladur (et minoritairement Jacques Chirac).
On sait que l’histoire s’est mal terminée avec l’implosion
de l’UDF quelques temps plus tard.
Alors il se peut bien que les propos de Lagarde et Bayrou
soient teintés de formules lyriques sur l’indépendance du Centre.
Concrètement, c’est le contraire qui est le plus probable
même s’il n’est pas certain.
L’UDI peut faire mentir cette prédiction dès le 20 mars
prochain en choisissant de présenter un candidat au premier tour de la
présidentielle.
► Le défi de la recomposition
du paysage politique
L’axe central va-t-il émerger en 2016? En cette année
préélectorale, cela semble utopique.
En revanche, les rapprochements dans les discours et les
programmes pourra sans doute continuer en vue d’une possible recomposition
politique entre le deuxième tour de la présidentielle et le premier tour des
législatives ou après les élections de 2017.
Les centristes, qui seraient au cœur de cet axe central qui
se dessine et qui regrouperait les libéraux sociaux, les sociaux libéraux, les
sociaux réformistes et les gaullo-réformistes, ne sont guère en pointe pour
porter cette recomposition, comme s’il craignait pour leur pré-carré ou, pire,
pour leur capacité à conclure un accord électoral particulièrement avantageux
avec LR.
2016, changera peut-être la donne, surtout en cas de
candidature centriste à la présidentielle de 2017.
► Le défi de la crédibilité
des partis centristes
Les centristes souffrent depuis des années d’une absence de
crédibilité qui contraste fortement avec les opinions positives qu’ils
recueillent dans les sondages, tant au niveau des personnalités (François
Bayrou) que des partis (UDI et Mouvement démocrate sont ceux qui recueillent le
plus d’opinions favorables de tous les partis même si les opinions défavorables
demeurent majoritaires).
On les aime bien mais on ne les voit pas gouverner.
Pour mettre fin à cet état de fait, ils vont devoir imposer
leur crédibilité.
Celle-ci passe évidemment par leur indépendance, voire leur
unité, mais surtout par des projets politiques et des programmes électoraux qui
n’existent pas à l’heure actuelle ou qui sont embryonnaires.
Si cela n’impacte pas la Droite et la Gauche, voire l’extrême-droite,
c’est certainement le cas pour le Centre, les électeurs potentiels se demandant
ce que les centristes ont à proposer.
Mais cette crédibilité passe aussi par des leaders assez
charismatiques pour donner une image conquérante du Centre, assez dynamiques
pour attirer les militants et les électeurs, capables de mobiliser réellement
sur un projet et qui jouent la carte du Centrisme indépendant sans faiblir.
Ces quatre qualités ne sont pas actuellement réunies dans un
seul des leaders de l’UDI et du MoDem.
Si ces défis ne sont pas relevés – et il est probable
malheureusement qu’ils ne le soient pas – les partis centristes pourront
toujours peser par leur utilité électorale, celle de faire gagner à la marge soit
la Droite, soit la Gauche.
Un pouvoir qui semble aujourd’hui démesuré par rapport à
leur force politique mais bien réel.
Ils seraient évidemment bêtes de ne pas en profiter.
D’autant qu’il leur a permis, en 2015, d’obtenir beaucoup
aux régionales.
En 2017, il pourrait, de même, leur permettre d’obtenir
beaucoup aux législatives.
A une condition, bien sûr, faire gagner la Droite aux
présidentielles.
Ce qui ne résoudra pas leurs problèmes existentiels.
Alexandre Vatimbella & Jean-Louis Pommery avec l’équipe
du CREC
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