lundi 28 décembre 2015

L’année du Centrisme dans le monde - Edition 2015. Centristes européens à la peine

Les victoires électorales centristes ont été peu nombreuses cette année comme celle de Justin Trudeau au Canada.
La situation est néanmoins meilleure si l’on compte les coalitions dont les formations du Centre faisaient partie tout en n’étant pas les leaders de celles-ci.
Certaines ont permis de mettre fin à des années de régimes plus ou moins autoritaires comme en Argentine ou au Venezuela.
Pendant ce temps, aux Etats-Unis, Hillary Clinton, une centriste, est bien placée pour remplacer un autre centriste, Barack Obama et de faire l’histoire en devenant la première femme présidente du pays.
Mais il reste encore onze mois de campagne.
En Europe, les centristes ont conquis des positions comme en Espagne.
Mais ils ont aussi beaucoup perdu comme en Grande Bretagne et en Pologne.
Au Portugal, ils ont remporté les élections mais se sont retrouvés dans l’opposition du fait d’une alliance inédite entre les socialistes et l’extrême-gauche.
► Etats-Unis: Barack Obama fin de parcours plutôt positif – La dynamique d’Hillary Clinton
Il y a un paradoxe aux Etats-Unis depuis l’élection de Bill Clinton en 1992.
Le pays élit en effet des présidents centristes mais le Parti républicain se droitise de plus en plus et parvient, dans le même temps, grâce entre autres à un découpage électoral souvent inique et une meilleure mobilisation de ses troupes pour les élections locales, à contrôler une majorité d’Etats (gouverneurs et congrès) et à être majoritaires désormais au Congrès du pays.
Evidemment, l’on peut prendre comme contre exemple de ce qui vient d’être dit l’ère de George W Bush, élu en 2000 et réélu en 2004 et un Congrès qui redevint entièrement démocrate de 2006 à 2010.
Mais ce serait oublié que Bush fils a perdu l’élection de 2000 en nombre de voix et, sans doute, en nombre de grands électeurs si un vrai recomptage avait eu lieu en Floride (Etat dont il ne faut pas oublier que son gouverneur était alors son frère, Jeb!) et qu’il a bénéficié d’une décision encore aujourd’hui condamnable de la Cour suprême majoritairement contrôlée par les républicains.
Si cela n’avait pas été le cas, alors Al Gore, ancien vice-président de Clinton et homme de centre-gauche, aurait été élu à la Maison blanche.
Quant à la réélection de Bush en 2004, elle doit tout autant aux attaques immondes et mensongères dont fut l’objet le centriste John Kerry – pendant longtemps en tête dans les sondages – de la part de la droite radicale et de l’extrême-droite du Parti républicain qu’à la situation particulière du pays qui était en guerre après les attentats du 11 septembre 2001.
Dès lors, on aurait pu avoir une ère de présidents démocrates, rappelant un peu celle qui fut républicaine après la guerre de Sécession – surtout si Hillary Clinton succède à Barack Obama –, toute proportion gardée
Quant à la majorité démocrate au Congrès malgré le redécoupage scandaleux réalisé principalement par les républicains, elle fut acquise alors que le pays portait un regard extrêmement critique sur la présidence de George W Bush dont la fin de son mandat à la Maison blanche fut catastrophique en termes de popularité.
Cette situation prévaut encore actuellement et il se pourrait bien qu’on la retrouve le 8 novembre 2016 au soir avec l’élection d’une centriste à la présidence alors que le Congrès pourrait demeurer républicain même si le Parti démocrate espère pouvoir reprendre la majorité au Sénat.
- Présidentielle 2016 - La dynamique d’Hillary Clinton
Ça avait mal commencé.
A peine Hillary Clinton avait-elle annoncé sa candidature pour la présidentielle qui se tiendra le 8 novembre 2016 que les grosses machines médiatique d’un côté et de propagande du Parti républicain de l’autre se mettaient à déverser un flot d’informations, parfois vraies souvent fausses (notamment à propos de ses e-mails non-sécurisés qu’elle avait envoyé en tant que secrétaire d’Etat), afin de tuer dans l’œuf ce qui aurait du être la marche triomphale de la future première présidente des Etats-Unis de l’histoire.
Si les attaques venues des républicains n’étaient évidemment pas une surprise, la virulence de celles provenant des médias a choqué même si l’on sait que les relations entre Hillary Clinton et les journalistes n’ont jamais été bonnes, ce qui est un euphémisme.
Cette hystérie anti-Hillary a pris de telles proportions que le New York Times, quotidien le plus respecté du pays et démocrate de longue date, a du s’expliquer sur son attitude extrêmement agressive vis-à-vis de l’ex-secrétaire d’Etat d’Obama après que nombre de ses lecteurs se soient plaints d’un «Hillary bashing» primaire.
Les relations demeurent tendues, même si les journalistes sont redevenus un peu plus professionnels en mettant leurs sentiments de côté.
Cela n’a pas empêché la candidate à l’investiture démocrate de se sortir d’une nasse où ses opposants avaient presque réussi à l’enfermer et espéraient bien tuer ses espoirs présidentiels pour de bon.
Ainsi, elle est désormais la favorite de l’élection du 8 novembre et semble sans danger face à son rival pour l’investiture démocrate, le socialiste Bernie Sanders qui réalise tout de même des scores assez importants, à la fois par l’absence de candidats à la candidature (ils ne sont que trois avec Martin O’Malley) et par une volonté de la gauche du parti démocrate de relever la tête contre une centriste qu’ils n’apprécient pas.
Du côté de ses opposants républicains, les deux favoris du moment (mais tout peut changer très vite), le populiste démagogue Donald Trump et l’extrémiste du Tea party Ted Cruz ont peu de chances de la battre.
- Barack Obama fin de parcours plutôt positif
2015 aurait pu être une «annus horribilis» pour Barack Obama.
Généralement, les présidents effectuant un deuxième mandat et ne pouvant donc plus se représenter, perdent toute capacité dans les deux dernières années de leur pouvoir de mettre en route de grandes réformes ou de réaliser de grands projets et sont cantonnés à une gestion du quotidien peu glamour pendant que les prétendants à sa succession trustent les écrans télés, les unes de la presse et le web, des réseaux sociaux aux sites d’information.
Pourtant, Obama a réussi, non seulement, à améliorer pendant un temps sa popularité dans les sondages mais aussi à demeurer sous le feu des projecteurs au grand dam de ses adversaires les plus acharnés du Parti républicain.
Que ce soit lors de moments difficiles (tueries de masse et attentats terroristes), ou pour des questions essentielles (protection de l’environnement et réchauffement climatique, immigration, guerre contre le terrorisme), des problèmes de société (mariage homosexuel, droit de détenir une arme à feu) ou des problèmes politiques (accord nucléaire avec l’Iran), il a été présent et a même avancé des projets ambitieux qui, sans doute, ne connaîtront pas un aboutissement heureux mais qui ont le mérite d’avoir été au centre de débats politiques ou de sociétés d’importance.
Le tout sur fond de croissance économique et de réduction du chômage.
En revanche, la lecture difficile de sa stratégie face aux régimes dictatoriaux comme en Syrie et de guerre contre le terrorisme en Afghanistan, en Irak et en Syrie, a joué en sa défaveur, ses hésitations semblant démontrer une faiblesse dans l’appréciation des menaces avec cette volonté de ne pas replonger le pays dans un conflit aussi désastreux que la seconde guerre d’Irak menée de manière catastrophique par George W Bush au risque de traiter ces problèmes aussi mal que ce dernier mais en sens inverse!

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► Canada: La victoire surprise du centriste Trudeau
(Voir ci-dessous «Centriste de l’année: Pierre Trudeau»)

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► Grande Bretagne: La défaite cuisante des Libéraux-démocrates
Les Libéraux-démocrates pensaient qu’ils seraient faiseurs de roi après les élections législatives en Grande Bretagne et ce malgré leur fort recul dans les sondages après une union avec les Conservateurs de David Cameron au gouvernement où ils avaient renié quasiment toutes les promesses électorales qu’ils avaient faites, promesses qui leur avaient permis de réaliser un très bon score aux précédentes législatives et à s’imposer comme partenaires de la Droite dans une coalition gouvernementale où leur leader, Nick Clegg, était nommé vice-premier ministre.
Mais les électeurs n’avaient pas oublié leurs reniements et leur incapacité à faire prévaloir leurs idées.
Le référendum prochain sur la sortie de la Grande Bretagne de l’Union européenne étant une claque parmi tant d’autres pour un parti qui se dit totalement pro-européen.
Et ce qui devait arriver arriva, les Libéraux-démocrates ont été balayés lors du scrutin et n’ont même pas pu mettre en route leur stratégie qui était de s’allier avec le vainqueur quel qu’il soit, une attitude très opportuniste qui leur fut fort justement reprochée.
En effet, le Parti conservateur a réussi à obtenir à lui tout seul la majorité à la Chambre des communes.
Mais les dirigeants centristes ont vu rapidement une occasion de rebondir dans la défaite des Travaillistes et, surtout, dans la nomination d’un homme de gauche radicale à leur tête, Jeremy Corbyn.
Ainsi, les Libéraux démocrates espèrent bien récupérer une partie importante des électeurs de centre-gauche et devenir la deuxième grande formation du pays.
Cet espoir ne s’est pas encore concrétisé et rien ne dit que ce sera le cas.

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► Espagne: La percée insuffisante de Cuidadanos aux législatives
A un moment donné, Alberto Rivera, le fondateur du parti centriste et anticorruption, Cuidadanos, y a cru.
Les sondages donnaient sa formation politique au coude à coude avec les conservateurs du Parti populaire et les socialistes du PSOE.
L’un d’entre eux lui prédisait même la victoire.
Et même si Cuidadanos est passé de zéro député à 40 avec près de 14% des voix, le résultat a été décevant car les centristes ne peuvent être qu’une force d’appoint à la chambre des députés.
Surtout, ils ne peuvent pas prendre la tête d’une coalition gouvernementale, seule cas de figure acceptable pour Rivera de partager le pouvoir avec d’autres partis.
Et puis, Podemos, la confédération de partis d’extrême-gauche est arrivée devant Cuidadanos, en troisième position derrière le Parti populaire et le PSOE, autre déception pour les centristes.
Reste à savoir si le Centre, disparu dans les années 1980 après avoir été le courant dominant lors des premières élections libres suite à la mort de Franco et le rétablissement de la démocratie, avec Adolfo Suarez comme premier ministre, va s’implanter durablement dans le paysage politique espagnol ou s’il s’agit simplement d’un épiphénomène en rapport avec la situation économique et sociale que connaît actuellement l’Espagne.

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► Pologne: Les centristes laissent la place à la droite dure
On croyait que la Pologne s’était définitivement débarrassée du parti de droite radicale et nationaliste, Droit et justice, des frères Jaroslaw et Lech Kaczynski.
Quand l’un, Jaroslaw, premier ministre, s’était fait battre aux législatives de 2007 par l’homme d’affaire et centriste Donald Tusk et l’autre, Lech, président de la république, était mort dans le crash de son avion en 2010 et qu’un centriste avait été élu à sa place, on espérait que les Polonais avaient choisi la modernité, le libéralisme et l’Europe en s’étant définitivement détournés d’un populisme nationaliste agressif.
Or tout cela vient d’être remis en cause avec la victoire surprise de Droite et justice aux dernières législatives sur les centristes de Plateforme civique après une victoire tout aussi surprenante, quelques mois auparavant, à la présidentielle.
Les premières mesures du nouveau gouvernement ainsi que les déclarations de Jaroslaw Kaczynski font craindre un retour en arrière dans la plus pure tradition d’un nationalisme obscurantiste et d’une grande xénophobie.
Certains diront que l’histoire de la Pologne est remplie d’excuses compréhensibles pour le choix d’un tel parti par les électeurs.
Sans doute, mais il faut aussi savoir tourner la page un jour pour se projeter définitivement dans le cas de la démocratie républicaine.

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► Centriste de l’année: Justin Trudeau
Depuis le 4 novembre, Justin Trudeau est le vingt-troisième premier ministre du pays.
Peu de monde aurait parié que le fils de Pierre Trudeau, voici quelques années, suive son illustre père en politique puis qu’il devienne, à sa suite, premier ministre du Canada dans une victoire tout aussi éclatante que peu prévisible voici quelques mois.
Mais Justin Trudeau, tout juste 44 ans et député depuis 2007, a du talent et du charisme comme son père et il a su redonner vie au projet centriste et progressiste du Parti libéral, une formation que beaucoup avaient enterrée et qui se trouvait, disait-on, coincée entre les conservateurs et les socialistes.
Mais l’usure du pouvoir des premiers ainsi que leur conservatisme appuyé et le positionnement très à gauche du Parti social-démocrate ont ouvert la voie à la victoire du Parti libéral le 19 octobre dernier.
Les premières mesures prises par le gouvernement Trudeau ont été bien accueillies mais il faudra évidemment attendre pour savoir si le jeune premier ministre peut gouverner le Canada avec succès et mettre en place les réformes nécessaires.
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Autres événements de 2015:
- Suisse: Les centristes tiennent bon
- Grèce: Le Centre se fait une place
- Portugal: le centre-droit gagne mais perd!
- Argentine: Une coalition de centre-droit au pouvoir
- Venezuela: Une coalition de partis, dont centristes, bat le régime autoritaire
- Côte d’Ivoire: Victoire du président sortant Alassane Ouattara


Alexandre Vatimbella & Jean-Louis Pommery avec l’équipe du CREC

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