Non, il n’y a pas d’erreur ou de faute de frappe dans le
titre que vous venez de lire.
Car quel est bien le secret espoir des démocrates pour la
prochaine élection présidentielle? Que Donald Trump soit le candidat
républicain pour qu’ils puissent l’emporter.
Et quel est celui des républicains? Que Bernie Sanders soit
le candidat démocrate pour qu’ils puissent l’emporter.
Voilà ce qui est actuellement dans la tête des dirigeants
des deux principaux partis qui regardent avec effroi les deux démagogues
populistes qui n’en finissent pas de monter dans les sondages.
Du coup, ils nourrissent cette espérance ultime, non pas de
faire gagner leur camp avec le meilleur candidat possible mais à espérer qu’un
démagogue populiste représente le parti adverse pour le plomber et faire élire
son champion, quel qu’il soit, comme un rempart au personnage dangereux et
irresponsable qu’il aura en face de lui.
C’est un bien étrange dévoiement de la démocratie que
d’espérer ainsi la présence d’un candidat repoussoir, même si l’on sait depuis
longtemps qu’une élection, si elle est le choix d’un candidat, est aussi et
souvent surtout l’élimination d’un autre (voire de plusieurs dans une élection
à deux tours).
Reste que l’essentiel dans une élection pour un parti ou un
camp politique est de présenter son programme et de choisir son candidat en
faisant tout pour que ceux-ci emportent l’adhésion d’une majorité du corps
électoral.
Ce n’est pas de vouloir un duel face à un personnage
inéligible pour triompher.
Or c’est peut-être ce qui se passera le 8 novembre 2016 aux
Etats-Unis, pays pionnier de la démocratie.
Choisir un candidat totalement par défaut serait une sorte
de première dans le monde démocratique (même si Jacques Chirac face à
Jean-Marie Le Pen a été un peu dans ce cas, lui qui n’avait même pas réuni 20%
des suffrages au premier tour, 19,88%, de la présidentielle de 2002 mais qui en
remporta plus de 80% au second tour, 82,21%…).
Bien sûr, des populistes se sont souvent présentés aux
élections dans les pays démocratiques et les Français en savent quelque chose
avec les Boulanger et autres Poujade.
Et si aux Etats-Unis, d’Andrew Jackson à Ronald Reagan en
passant par Barry Goldwater ou Ross Perot, le pays en a connu un certain nombre
prétendant s’installer à la Maison blanche – dont quelques uns ont même été
élus –, les deux grands partis luttent avant tout pour leur candidat et leur
programme.
Mais c’est vrai que l’on a assisté à glissement préoccupant
en la matière lors de la réélection d’Obama en 2012 où les républicains avec
leur aile extrémiste et raciste du Tea party, voulaient avant tout faire
barrage au président sortant, peu importe qui se trouverait face à lui et avec
quel programme.
Pour en revenir à Trump et Sanders, jusqu’à présent, un seul
camp à la fois était concerné par des candidatures de populistes démagogues.
Ce qui doit interpeller dans cette affaire, c’est que ces
derniers dont l’un (Trump) glorifie sa condition de milliardaire comme unique
programme pendant que l’autre (Sanders) attaque obsessionnellement les
milliardaires comme unique programme et qu’une partie importante des électeurs
les glorifient pour cela.
Ils ont même réussi avec ces discours au ras des pâquerettes
à marginaliser les candidats sérieux, surtout les candidats centristes comme
Hillary Clinton (démocrate) ou modérés comme John Kasich (républicain), ceux
qui ont un vrai programme politique et qui veulent, non pas, diviser le pays
mais l’unir.
Evidemment, le cauchemar serait d’avoir un duel
Trump-Sanders, le stade ultime du fourvoiement de la démocratie républicaine et
sa transformation en une populo-démagocratie avec tous les risques qui vont de
pair.
Dans ces situations flottantes, certains parient sur la
sagesse des peuples pour que le pire soit évité.
Alors parions sur celle des Américains mais pas sûr que cela
suffira…
Alexandre Vatimbella
Directeur du Crec