Dans cette rubrique, nous publions les
points de vue de personnalités centristes qui ne reflètent pas nécessairement
ceux du CREC. Ces points de vue ont pour but d’ouvrir le débat et de faire
progresser la pensée centriste.
Jean-François Borrou est le pseudonyme
d’un journaliste proche des idées centristes et qui collabore épisodiquement à
cette rubrique. Ses propos sont les siens et non ceux du CREC.
Yves Jégo sera toujours Yves Jégo.
L’homme politique à l’opportunisme consternant et pathétique
ainsi qu’en mal de médiatisation a encore frappé, à la recherche désespérée
d’exister par tous les moyens
Celui qui se retrouve aujourd’hui au centre par accident au
grand dam des véritables centristes et qui prônait il y a encore peu une
indépendance sans restriction de l’UDI et la présence indispensable du parti de
centre-droit à la présidentielle, le voilà qui soutien désormais le droitiste Bruno
Le Maire pour la primaire LR.
Et cela juste au moment où le président de son parti,
Jean-Christophe Lagarde, vient de déclarer, «Je ne reconnais plus Bruno Le
Maire (...) qui ne tient plus du tout ni le même positionnement ni le même
discours politique», l’accusant d’avoir entamé un virage très à droite
préoccupant...
Petit retour sur un parcours politicien qui est un cas
d’école en la matière.
Yves Jégo a été un groupie de Nicolas Sarkozy, après avoir
été un proche de Nicolas Dupont-Aignan, le souverainiste proche de l’extrême-droite,
ne tarissant pas d’éloges sur ce leader exceptionnel… qui l’avait nommé secrétaire
d’Etat à l’Outre-mer en 2008.
Une fois remercié sans ménagement par le même Sarkozy un peu
plus d’un an après sa nomination, il en devint immédiatement un des contempteurs
les plus virulents, quittant du même coup l’UMP pour devenir membre du Parti
radical (un mois après son éviction!) puis partir avec son nouveau mentor,
Jean-Louis Borloo – pour lequel il voue la même admiration que celle qu’il
avait pour Sarkozy –, créer en 2011, l’Alliance républicaine écologiste et
sociale.
Puis il le suit à l’UDI dont il devint, en 2014, par hasard
et pour quelques mois le «président par intérim» lorsque Borloo quitta le
parti.
Il crut alors que le destin avait enfin frappé à sa porte.
Malheureusement pour lui, il n’avait hérité du poste que
parce qu’il était le moins dangereux de tous les dirigeants de l’UDI aux yeux
de ceux qui fourbissaient leurs armes pour en prendre réellement la tête.
Retour sur terre d’autant plus brutal qu’il fut laminé au
premier tour du scrutin pour la présidence de l’UDI.
Il se rallia au bon cheval, Jean-Christophe Lagarde qui, une
fois élu, le nomma pour le récompenser premier vice-président, une fonction qui
est un placard pas vraiment doré.
Dès lors, il devait se chercher une autre façon d’exister.
Il tenta nombre d’initiatives qui tombèrent dans les limbes
des fausses bonnes idées politiques comme celle d’accorder l’asile politique à
Edward Snowden tout en le nommant citoyen d’honneur de la République française…
Il fit parler de lui dernièrement avec sa proposition de
menus végétariens pour les cantines scolaires puis par la tenue des «Assises du
produire en France» organisées en compagnie d’un autre grand opportuniste de la
politique française, Arnaud Montebourg.
Mais il lui fallait aussi trouver un nouveau maître.
C’est fait avec son soutien à Bruno Le Maire.
Mais pourquoi diable Le Maire?
On pense évidemment qu’il était assez difficile à Jégo de
revenir chez Sarkozy (encore qu’il en est tout à fait capable).
Sans doute a-t-il pensé avec raison qu’il ne serait pas
accueilli comme le retour du fils prodigue et qu’il n’obtiendrait aucun
strapontin, ceux-ci étant préemptés depuis longtemps par des politiques d’une
autre trempe.
Aller voir Juppé n’était guère plus intéressant dans cette
optique.
Restaient des seconds couteaux.
Dans ce cadre, celui qui a le plus de chance de «faire un
coup» est Bruno Le Maire.
Cela tombait bien, il est en mal de soutiens venus de l’UDI.
Il y avait donc une place à prendre et Yves Jégo l’a prise.
En tout cas, il l’espère.
Pour justifier son ralliement au député LR de l’Eure, il a
expliqué, sans rire, au JDD qu’il est «le seul qui peut créer la surprise et
représenter le saut générationnel qui changera la donne», capable d’apporter
une «bouffée d’air frais» que, selon lui, les Français attendent.
Un peu court évidemment mais c’est le cadet des soucis de
monsieur Jégo.
Avec Le Maire, il pourra peut-être exister et ça, pour lui,
ça n’a pas de prix.
Une dernière chose, notre homme a rebaptisé son micro-parti Mieux
vivre ensemble et sa nouvelle devise politique est de «faire de la politique
autrement».
Non, ça ne s’invente pas…
Jean-François Borrou