Laurent Hénart veut un candidat UDI à la prochaine
présidentielle et il veut que ce soit son ami, Jean-Christophe Lagarde, avec
qui il a contribué à créer le parti derrière Jean-Louis Borloo, qui représente
la formation de centre-droit et de la droite modérée.
De même, il souhaite ressouder la famille centriste et c’est
la raison pour laquelle il a invité François Bayrou au congrès de la formation
dont il est le président, ce week-end.
Il pourra également parler avec Jean-Michel Baylet, le
leader des Radicaux de gauche (centre-gauche), lui aussi invité.
Quand on lui demande quel est son objectif, le maire de
Nancy explique que l’UDI – dont il est le président du Conseil national, le
«parlement» du parti – a été créée pour être une formation indépendante et que,
dans ce cadre, son président, Lagarde, doit se présenter à la présidentielle de
2017 et non de soutenir un candidat de droite lors des primaires LR.
En cela il diverge avec François Bayrou qui a déjà décidé
que le Mouvement démocrate se rangerait derrière Alain Juppé.
Mais il envoie également un message à Jean-Christophe
Lagarde pour lui rappeler que son élection à la tête de l’UDI s’est aussi faite
parce qu’il défendait le même point de vue que lui, à savoir la présence sans
équivoque d’un candidat du parti à l’Elysée.
Et, depuis la négociation pour les régionales où le
président de l’UDI a obtenu beaucoup plus que ce que son parti représente
électoralement avec l’accord signé avec Nicolas Sarkozy, beaucoup de centristes
croient savoir ou craignent qu’un autre accord, plus ou moins secret, en
découle, celui de rallier automatiquement l’UDI à la primaire LR.
D’autant que si Hénart veut un candidat UDI, ce n’est pas le
cas d’autres notables du parti, au premier chef desquels on trouve Hervé Morin,
adversaire déterminé de Lagarde, mais aussi François Sauvadet, Maurice Leroy et
quelques autres.
Il peut sembler étonnant que ce soit le Parti radical qui
mène la lutte pour l’indépendance de l’UDI alors même qu’il était membre de
l’UMP et que son fondateur, Jean-Louis Borloo, a été ministre de Jacques Chirac
et de Nicolas Sarkozy.
Sans oublier que le même Borloo a renoncé à concourir à la
présidentielle de 2012 alors qu’il avait de bons sondages, afin que la Droite
puisse présenter une candidature face au risque d’élimination dès le premier
tour par le Front national (même si certains estiment que les raisons de la
renonciation de Borloo sont autres).
Mais c’est sans doute ce passé récent qui renforce
aujourd’hui la détermination du Parti radical à jouer l’indépendance de l’UDI à
fond.
D’autant qu’il ne faut pas oublier que beaucoup de radicaux
valoisiens sont demeurés à l’UMP (désormais LR) lors de la formation de l’UDI.
Ceux qui ont décidé de franchir le pas sont donc ceux qui
voulaient justement créer une confédération de partis vraiment indépendante
dans laquelle les radicaux seraient les fers de lance.
On peut aussi se demander pourquoi Hénart parle autant de
l’indépendance de l’UDI et d’une candidature à la présidentielle en ce moment.
Deux explications principales.
D’une part, le malaise réel créé dans le parti et auprès des
militants après une négociation avec LR où l’UDI est apparue avant tout
soucieuse d’élus avant son indépendance ainsi que les déclarations de Lagarde
qui n’exprime plus la présence à la présidentielle comme certaine, nécessite
sûrement un discours rassurant.
D’autre part, il fau se rappeler que Hénart et Lagarde sont
dans le même bateau.
Il se peut très bien, dès lors, qu’il y ait une
double-stratégie qui est de jouer, d’un côté, le jeu de l’union (Lagarde avec
Sarkozy lors des négociations pour les régionales) et de l’autre le rappel du
principe premier de l’indépendance (Hénart et ses déclarations pour une
candidature à la présidentielle).
Derrière ce qui semble un paradoxe, les deux hommes
tenteraient de créer ainsi une dynamique grâce à la pression des militants pour
qu’une candidature à la présidentielle s’impose au-delà des accords avec LR.
Reste qu’il va falloir cravacher car Lagarde, candidat
«naturel» de l’UDI, ne décolle pas dans les sondages comme le montre le dernier
baromètre IFOP pour le Figaro magazine où seuls 5% des Français veulent lui
voir jouer un rôle important dans les mois et les années à venir.
Le message brouillé qu’envoie l’UDI aux Français sur ce qu’elle
est et ce qu’elle veut n’est certainement pas pour rien dans ce score décevant.
Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC
Jean-Louis Pommery
Directeur des études du CREC