Avant qu’il ne soit réellement trop tard, il n’est jamais
trop tard pour parler Europe et parler de l’Union européenne.
Ni de vouloir reconstruire le rêve européen qui se délite
dans l’inaction des soi-disant pro-européens et sous les coups de boutoirs des
anti-européens qui n’ont manifestement pas la même stupide prévention – pour ne
pas dire frousse – que les premiers nommés.
Car, au train où vont les choses, l’Union européenne
deviendra, au mieux une zone de libre-échange dans la paix, au pire, un machin
bureaucratique qui se détruira tout seul.
Donc, soit ce que voulaient les Britanniques depuis toujours
et qui a fait que la France, avec raison, s’est longtemps opposée à l’entrée du
Royaume Uni dans une Europe dont celui-ci voulait faire un simple marché
économique, soit ce que dénonçait en son temps le Général de Gaulle qui pensait
avant tout grandeur française.
Où est donc le rêve européen voulut par Jean Monnet mais
aussi par tous ses glorieux devanciers d’Emmanuel Kant à Aristide Briand, de
Victor Hugo à Robert Schuman?
Où est donc ce rêve que les peuples ont cru pouvoir réaliser
après la Deuxième guerre mondiale avant de se retrancher derrière les vieux
égoïsmes nationalistes qui ont été les causes des deux conflits mondiaux qui
ravagèrent l’Europe et qui avaient permis la création d’une union entre des
hommes et des femmes qui souhaitaient partager un présent et un avenir commun?
Les centristes, partout en Europe, même au Royaume Uni,
tentent, vaille que vaille, que ce rêve européen constitutif de l’Union
européenne et qui, seul, peut soutenir l’édifice politique, économique et
juridique dans le temps et le renforcer, ne disparaisse pas.
Vaste tâche qui semble perdue d’avance aux sceptiques
d’aujourd’hui au vu des échecs à répétition de l’Europe, et de l’incapacité de
mettre en place des politiques efficaces, d’une politique d’immigration
intelligente (voir la Méditerranée et Calais) à une politique extérieure et
sécuritaire consistante (voir l’Ukraine et la lutte contre le terrorisme) en
passant par des convergences dans les politiques fiscales et sociales.
Elle n’est même plus capable de maîtriser ses trublions, de
Tsipras en Grèce à Viktor Orban en Hongrie.
Aujourd’hui, l’Europe n’est plus crédible dans bien des
domaines – il suffit de voir comment la traite Vladimir Poutine – et totalement
inefficace, parce que divisée, dans nombre d’autres – il suffit de voir comment
se gère la crise en Grèce.
Et demain, elle risque de sombrer suite au son triomphe
électoral de David Cameron qui va permettre à ce dernier d’organiser un
référendum pour demander aux Britanniques s’ils veulent demeurer dans l’Union
européenne.
Un tel vote est déjà une défaite pour l’Europe quel que soit
son résultat.
Dès lors, il faut que les pro-européens montent au créneau
et réaffirment constamment leur attachement à la construction d’une Union
européenne fédérale pour poursuivre ce rêve européen de tous les humanistes qui
ont concouru à le créer.
On peut ainsi se féliciter de l’initiative de l’UDI qui a
envoyé, les 11 et 12 mai derniers, une délégation à Bruxelles sous la direction
de son président, Jean-Christophe Lagarde et qui a publié un communiqué pour
dire que «Contre les faux-semblants agités par les partis populistes, ils (les
membres de la délégation) rappellent que l’Europe est l’échelon indispensable
pour la mise en œuvre des politiques publiques demandées par nos concitoyens et
imposées par les circonstances: immigration clandestine en Méditerranée, lutte
contre le terrorisme mais aussi action en faveur de l’apprentissage, de
l’investissement et de la croissance économique».
Ce n’est pas grand-chose mais c’est déjà ça car la bataille
pour l’Europe dans laquelle nous sommes, il ne faut pas se leurrer, doit aussi
se nourrir de toutes les initiatives et déclarations, gestes et décisions qui
défendent cette si importante union des Européens qui se sont si souvent battus
et détruits les uns, les autres quand il étaient séparés.
Mais il faudra bien aussi discuter sérieusement un jour pour
revenir au rêve européen.
Car la voie que prend l’Union européenne est celle d’une
réunion d’Etats ad minima.
Si c’est bien son avenir, alors ce rêve a un absolument
besoin d’être refondé sur une autre initiative, une vraie construction d’une
fédération réunissant des peuples qui ont envie de s’unir réellement parce
qu’ils savent, d’abord, qu’ils sont bien un même peuple européen, ensuite, que
c’est la seule manière qu’ils ont de préserver et d’augmenter leurs acquis dans
un futur mondialisé.
Pour cela, il faut des leaders qui ne soient pas tétanisés
par les enjeux et qui ne tremblent pas chaque fois qu’un populiste quelconque
menace de détruire l’Europe et qui n’ait pas peur d’affronter les difficultés.
Où que l’on regarde sur le vieux continent, on n’en voit pas
émerger.
Voilà qui est bien inquiétant.
Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC
Jean-Louis Pommery
Directeur des études du CREC