Les responsables Les républicains (LR) n’arrêtent pas de le
dire pour s’en plaindre amèrement: les centristes ont été particulièrement bien
(trop) servis pour les régionales où ils pourraient avoir entre 240 et 350 élus
alors qu’ils ne comptent que 130 conseiller régionaux sortants.
Si l’on se réfère aux chiffres, cela semble une évidence.
Représentant moins de 10% des électeurs (9,94% aux
européennes de 2014, seule élections où ils y sont allés seuls et unis) et moins
de 6% des députés (34 sur 577), l’UDI et le MoDem ont entre 25% et 33% des
sièges dit «éligibles» (candidats qui ont une chance de se faire élire) sur les
listes de LR.
En outre, trois leaders de l’UDI pourraient se retrouver
président de région à l’issue du scrutin de décembre prochain.
Nicolas Sarkozy qui a été l’objet de critiques de la part de
son camp en tant que président de LR qui a négocié les termes de l’accord
répète que c’était le prix de l’alliance avec les centristes.
Il n’a pas tort, d’autant que le cadeau offert aux
centristes est un piège pour ces derniers en vue des présidentielles et des
législatives, élections autrement plus importante que les régionales.
Mais la première raison est, tout simplement, l’avantage
dans ce genre d’alliances du faible au fort.
Ainsi, LR veut absolument être en tête à l’issue du premier
tour le 6 décembre au soir devant le PS et, surtout, le FN pour marquer
l’opinion dans ce qui sera la dernière élection nationale avant celle de la
présidentielle en avril 2017.
Etre le premier parti de France, comme les médias l’affirmeront
(sans d’ailleurs citer l’UDI et le MoDem comme d’habitude), voilà qui vaut
toutes les alliances pour une élection mineure.
Comme le montre les sondages, pour y parvenir, il lui
fallait donc une indispensable alliance avec les centristes.
Même si ces derniers avaient également besoin de s’allier
avec la Droite pour avoir de nombreux élus, ils pouvaient toujours y aller
seuls, les régionales n’étant pas cruciales pour eux, ni en termes d’élus, ni
en termes de puissance politique.
Dès lors, il était facile à Jean-Christophe Lagarde de faire
monter les enchères mais tout aussi facile à Nicolas Sarkozy d’y céder en
partie.
La deuxième raison, c’est que Nicolas Sarkozy voulait
phagocyter les centristes en vue des présidentielles (et des législatives) et
qu’il a réussi son coup.
Il ne se voit pas médiatiquement parlant pour l’instant mais
il produira tous ses effets en 2016 après la victoire aux régionales.
Car du statut de sauveurs, les centristes passeront
mécaniquement à celui d’obligés de LR.
Bien sûr, l’UDI pourra toujours décider d’avoir un candidat
à la présidentielle lors de son congrès de mars sur le sujet.
Bien sûr, François Bayrou pourra toujours se présenter si ce
n’est pas Alain Juppé le vainqueur de la primaire de LR, fin 2016.
Mais les centristes prendront le risque devant l’opinion
publique et devant les électeurs de droite d’être peu reconnaissants à LR et de
lui planter un couteau dans le dos avec le risque énorme que la Droite soit
éliminée dès le premier tour de la présidentielle par leur faute alors même qu’ils
avaient été si bien servis pour les régionales…
Donc, ce qu’espère Nicolas Sarkozy, c’est que les régionales
seront la barrière qui empêchera les centristes de franchir le pas d’une
candidature (voire deux!) indépendante en 2017.
Au-delà de la pression venue de toutes parts qui va s’exercer
sur les dirigeants centristes (dont il faut rappeler que certains plaident déjà
ouvertement pour un ralliement pur et simple à LR pour 2017) pour qu’ils soient
les alliés sages de la Droite, les moyens de les y amener par la force et le
chantage (menaces pour les législatives, pour le futur gouvernement, de faire
imploser l’UDI et de réduire à néant le MoDem, de quitter la majorité
municipale à Pau, etc.) sont nombreux et particulièrement puissants.
Pas sûr que les centristes puissent y résister, soient même
capables de le faire ou même aient envie d’entamer un bras de fer avec son «partenaire».
D’autant qu’un candidat centriste n’a quasiment aucune
chance de remporter la présidentielle même si François Bayrou croit en son
étoile pourtant bien pâle en la matière et qu’il faudrait des circonstances
assez exceptionnelles pour qu’il ait une chance de disputer la victoire.
Prendre le risque d’un clash pour une candidature de
témoignage, cela en vaut-il la peine alors que l’on espère être bien servi en
nombre de députés et en places au gouvernement en cas de victoire du candidat
de la Droite?
Et ce même si une présence à la reine des élections est le
passage obligé pour être reconnu comme un courant majeur de la politique
française.
Alors, Nicolas Sarkozy et tous les leaders de LR qui se
plaignent de la «gentillesse» de leur président pourront se frotter les mains
du bon tour joué aux centristes.
Des centristes qui n’étaient certainement pas dupes au
moment de signer l’accord pour les régionales.
Et, certainement, ils ont déjà du préparer leur argumentaire
pour expliquer leur prochain ralliement.
Ils parleront sans doute de responsabilité et oublieront l’autre
dimension essentielle de l’engagement politique, le courage.
Aux militants, sympathisants et électeurs centristes de
croire ou non leurs explications.
Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC
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