Les centristes sauront-ils prendre leur destin en main ou se
montreront-ils incapables de jouer collectivement et d’être présents lors des prochaines
présidentielles de 2017?
La réponse à cette question conditionnera leur capacité à
gouverner et/ou à peser sur le débat politique quoi qu’il arrive.
Elle sera aussi importante sur le rapport de force qui
s’instaurera dans les prochaines années avec les tentations de radicalisation
de la Droite, la menace de l’extrême-droite et, plus généralement, les dérives
populistes et démagogiques qui impactent tous les bords politiques.
Le premier challenge qui attend les centristes est celui de
l’union, de l’écriture d’un projet politique, de la réflexion sur un programme
électoral, c’est-à-dire celui de la cohésion de l’espace centriste.
Le deuxième challenge sera celui des alliances politiques et
de l’attitude face à l’élection la plus importante de la vie démocratique de la
V° République, la présidentielle où ils auront le choix entre présenter un
candidat indépendant, participer à la primaire de l’opposition avec l’UMP ou de
faire ni l’un, ni l’autre.
Or donc, le premier challenge concerne la capacité d’union
des centristes.
Sans parler des centristes qui sont à l’UMP et d’autres qui
se trouvent dans la majorité actuelle, la refondation du Centre dans une
réunion des différents courants centristes indépendants ne va pas de soi.
Outre la séparation entre le Mouvement démocrate et l’UDI
que la création de l’Alternative n’a absolument pas réduite, les diverses
chapelles à l’intérieur de la confédération qu’est l’UDI vont avoir beaucoup de
mal à cohabiter ensemble dans les mois qui viennent.
La victoire de Jean-Christophe Lagarde sur Hervé Morin pour
la présidence de la formation de centre-droit n’a pas permis, comme on le
supposait et on le craignait, de renforcer l’unité.
Il suffit de voir l’organigramme de la nouvelle direction
concoctée par Lagarde où les partisans de Morin sont marginalisés pour les
rares qui auront une fonction de direction ou d’entendre ce dernier lancer des
piques sans arrêt à l’encontre de son concurrent victorieux et de toutes ses
initiatives, prenant un malin plaisir à dire le contraire de ce qu’il vient de
déclarer pour s’apercevoir que la tâche de rassembler l’UDI pour qu’elle se
tourne vers ce qui est sa fonction et son objectif, la conquête du pouvoir et
la mise en place d’une politique centriste ne va vraiment pas de soi.
Sans oublier que François Bayrou, qui a intérêt en une UDI
faible et divisée, ne manquera pas d’attiser les rivalités entre ces deux
anciens lieutenants.
Et pour que cette conquête puisse avoir lieu, il faut
évidemment un projet politique et un programme électoral qui permettra enfin
aux Français de distinguer vraiment le Centre de la Droite et de la Gauche.
Mais ceux-ci ne pourront être élaborés que dans une union où
tous tireront dans le même sens et non dans des directions opposées.
Comment écrire des textes si importants quand des
chicaneries empêchent la réflexion de fond?
Le challenge de la cohésion de l’espace centriste est donc
loin d’être gagné à l’heure actuelle.
Néanmoins, l’espérance de gagner les élections et de
gouverner qui ressort des sondages et de l’état d’esprit des Français peut
imposer une entente des centristes.
Car il serait totalement irresponsable de leur part de
manquer l’opportunité qui se présente pour des querelles auxquelles les
électeurs ne comprennent pas grand-chose sauf que les centristes, décidément,
ne sont pas capables, une nouvelle fois, d’être crédibles à leurs yeux.
Le deuxième challenge sera de savoir comment aborder la
présidentielle.
Les centristes doivent-ils avoir un candidat indépendant
(voire deux s’il y en a un du MoDem et un de l’UDI) qui se présente quoiqu’il
arrive ou doivent-ils faire une croix sur 2017, soit en se présentant à la
primaire de la Droite avec 100% de chance d’être battus ou en renonçant à
participer à ce rendez-vous électoral directement de quelque façon que ce soit?
En préambule, on doit dire qu’il est difficile de prédire
qu’un centriste puisse être vainqueur de la prochaine présidentielle.
Même si rien n’est forcément donné, même si un Bayrou et,
pourquoi pas, un Lagarde pourraient créer la surprise, il est plus sérieux
d’envisager un score conséquent qui permettent de placer le centre et ses idées
en position de force dans une alliance pour le second tour.
L’évidence pour un courant de pensée majeur et indépendant
est d’avoir un candidat à la reine des élections qui est la présidentielle dans
notre système politique actuel.
Renoncer à s’y présenter, c’est admettre que l’on est
incapable de la gagner mais aussi incapable de bien y figurer et d’en retirer
un avantage politique.
Si l’on regarde bien les résultats des dernières
présidentielles, il semble clair que les centristes ont existé plus ou moins
bien (autour de 7% en 2002, 18,5% en 2007 et 9% en 2012).
Pour autant, ils ont été incapables de bien négocier leur
force électorale pour gouverner ou même influencer le pouvoir issu de ces
élections.
Il faut évidemment que cela change.
Cependant, ce n’est pas en refusant d’être présent au
premier tour de la présidentielle de 2017 que les centristes pourront peser
réellement et non à la marge sur la gouvernance de la France.
En décidant de participer à la primaire de la Droite – où
les quelques milliers de militants ne feront pas le poids face aux dizaines de
milliers de l’UMP, sans parler des sympathisants et ce même en cas d’un
mouvement populaire en faveur des partis centristes – et en se désistant pour un des candidats
présent au second tour de celle-ci et en se ralliant au vainqueur, les
centristes auront quelques miettes et quelques promesses mais elles seront loin
de valoir celles qu’ils pourraient obtenir dans des négociations entre les deux
tours d’une présidentielle où c’est la victoire finale qui est en jeu,
installant une pression sur celui qui veut rallier derrière son nom.
Une réalité même si le vainqueur de la primaire s’appelle
Alain Juppé.
Reste une troisième alternative qui serait de ne pas
participer directement à la présidentielle en se préparant avant tout pour les
législatives qui suivront et en tentant d’influencer le choix des candidats de
Droite (Juppé) et de Gauche (Valls) puis en s’engageant pour l’un d’entre eux
(plus Juppé que Valls mais que se passerait-il si c’était Sarkozy-Valls?).
Les centristes se retrouveraient dans une configuration
qu’ils ont connue en 1995 avec leur soutien raté à Edouard Balladur.
Mais, en misant sur le bon cheval, ils pourraient, en amont,
négocier un vrai contrat de gouvernement avec une vraie alliance électorale.
Cette dernière solution n’est évidemment pas la meilleure
alors que l’élection présidentielle est un passage obligé pour les grands
courants politiques d’exister et de peser.
Mais, à défaut d’être présent directement, ne vaut-il pas
mieux ne pas y aller que de se ridiculiser dans une primaire à droite comme
Jean-Michel Baylet se ridiculisa en 2011 dans la primaire à gauche, où le
président des Radicaux de gauche obtint laborieusement 0,64% des voix…