Les amabilités entre Manuel Valls et François Bayrou lors
d’une visite du premier nommé au second à Pau ainsi que les déclarations à la
télévision d’Alain Juppé affirmant qu’il n’était pas centriste ont donné un
nouvel éclairage sur les intentions des uns et des autres à propos de cet axe
central qui semble se dessiner entre les sociaux-libéraux de gauche, les
centristes et les réformistes de droite.
On a la désagréable impression que celui-ci est en train
d’être instrumentalisé, utilisé comme gadget politicien et ficelle
électoraliste par certains qui ont besoin des voix centristes pour exister et
se bâtir un avenir politique.
Comme par Manuel Valls avec ses appels du pied à François
Bayrou mais dont on se demande quel programme propose-t-il pour une véritable
alliance au centre.
Ou comme Alain Juppé avec ses appels du pied à ce même
Bayrou ainsi qu’aux centristes de l’UDI mais qui déclare dans le même temps
qu’il n’est pas centriste et qu’il ne veut pas une politique de l’eau tiède,
une des critiques les plus virulentes que la Droite et la Gauche adressent si
souvent aux centristes pour leur dénier une quelconque originalité et courage
politiques.
Ou encore comme François Bayrou qui, en jouant à celui qui
écoute Valls et Juppé, se reconstruit doucement une image personnelle de
potentiel présidentiable mais dont on attend toujours le début d’un début de projet
qui permettrait de dire pourquoi il est d’accord avec Juppé et intéressé par
Valls.
De ce point de vue, la prudence et la circonspection des
leaders de l’UDI, Hervé Morin et Jean-Christophe Lagarde en tête, semblent plus
appropriées pour l’instant face à une réelle convergence de vues mais sans
aucune discussion sur une quelconque plateforme commune.
Or cet axe central pour se concrétiser doit absolument
passer par les idées avant de passer par les hommes et les femmes qui le
porteront.
Non pas que son incarnation dans des personnalités
politiques de premier plan soit pas ou peu importante, bien au contraire.
Mais l’opportunisme qui caractérise si souvent les
positionnements au centre (et non du Centre) rend absolument nécessaire que
cette possible coalition des humanistes progressistes et réformistes pragmatistes
se fassent dans la clarté des projets et des programmes politiques ainsi que
par l’onction du suffrage universel, in fine.
Si ce n’est pas le cas, s’il s’agit pour Manuel Valls se
sauver sa peau, pour Alain Juppé de siphonner les voix centristes pour occuper
l’Elysée et pour François Bayrou de pouvoir à nouveau se présenter en 2017,
alors cet axe central aura un impact désastreux sur le Centre et les centristes
mais aussi sur la vie politique tout court.
S’il n’est que ce gadget et cette ficelle, il profitera aux
extrêmes, dont en particulier le Front national, qui pourront railler à foison
ce rassemblement de notables plus préoccupés de leur avenir personnel que de
celui de la France.
Ce serait un coup dur pour les valeurs portées par les
centristes qui, une nouvelle fois, se trouveraient assimilées à de la démagogie
et à de l’opportunisme alors qu’elles sont si importantes pour redresser le
pays et construire son futur.