Les centristes doivent-ils privilégier l’émergence d’un pôle
centriste ou participer à l’élaboration d’un axe central qui semble se dessiner
et qui pourrait aller du social-libéralisme de Manuel Valls à la droite
réformiste d’Alain Juppé en passant par le libéralisme-social du Centre?
En réalité, ils doivent d’abord bâtir un pôle centriste
moteur d’un possible axe central qui pourrait être dans les années à venir
l’alternative la plus novatrice de la politique française de ces trente-cinq
dernières années et une réponse efficace à la montée des extrêmes et des
populismes démagogiques, tant à droite qu’à gauche.
N’étant pas hégémonique, loin de là, les partis centristes
doivent donc d’abord créer un pôle centriste fort et crédible avant de pouvoir
prétendre à être l’animateur (ou un des animateurs principaux) de l’axe central
en train de voir le jour, pour l’instant plus au niveau d’une convergence d’idées
que d’une volonté de rapprochements politiques.
Pour autant, aujourd’hui, une redistribution des cartes se
met en place.
Alors qu’auparavant les centristes avaient le choix entre
une alliance avec la Droite ou avec la Gauche, une troisième possibilité est en
train d’émerger, une alliance avec la Droite et la Gauche ou, tout au moins,
une partie de la Gauche, celle qui est social-libérale, et une partie de la
Droite, celle qui est libérale réformiste, toutes deux modernes et ouvertes.
Il ne s’agit pas d’une union nationale chère à François
Bayrou car il n’est pas question de faire une coalition de tous les partis
démocratiques. La gauche du PS et la droite de l’UMP ne sont pas solubles dans
cet axe central et doivent demeurer pour les centristes une opposition
démocratique à leur projet politique.
Il n’est pas non plus question que cet axe central soit une
alliance de circonstance afin de régler uniquement et pendant un laps de temps
déterminé les graves problèmes qui se posent au pays.
Car les courants politiques qui le constituent doivent
travailler ensemble sur le long terme sans pour autant se dissoudre dans une
grande formation, chacun ayant son histoire et ses différences.
Libéraux, sociaux, réformistes, pragmatiques – ces quatre
qualificatifs se mettant dans un ordre différent selon chaque courant –, ils
partagent une vision de la France et de son avenir très proche.
En refusant les réflexes de repli sur soi, la soi-disant
irréversibilité du déclin du pays et de la disparition à terme de l’Union
européenne, ils veulent créer les conditions d’un renouveau et d’une nouvelle
société où le mérite et la solidarité dans une égalité des chances remettront à
l’honneur l’ambition de la réussite et du partage.
Bien entendu, pour les centristes, il s’agit d’une
opportunité afin de diffuser beaucoup plus largement leurs idées et leurs
valeurs, surtout un moyen de les appliquer concrètement.
Si cet axe central n’est pas une vue de l’esprit, il n’existe
pas dans les faits actuellement.
De même que le pôle centriste qui le rendra possible.
Dès lors, les centristes doivent se mettre au travail pour
le bâtir sur les dépouilles d’une Alternative («organisation coopérative» entre
le Mouvement démocrate et l’UDI) qui n’est rien d’autre qu’un cartel électoral
sans intérêt.
C’est sans doute là que l’on verra si les centristes sont
capables, non seulement, d’être responsables mais d’acquérir cette culture de
la gagne qui semble les avoir désertés depuis si longtemps, surtout cette force
à vouloir réformer le pays et non plus seulement regarder les autres échouer à
le faire.
Si les partis centristes ne sont pas capables de construire
d’abord un pôle centriste, ils ne pourront prétendre être le cœur dirigeant de
l’axe central et seront, comme à leur mauvaise habitude de ce XXI° siècle, des
suivistes et des subordonnés.