Les parieurs avisés avaient prédit que le deuxième tour de
l’élection à la présidence de l’UDI opposerait Jean-Christophe Lagarde à Hervé
Morin.
Ce sera donc le cas avec une petite avance de quelques
points en faveur du premier nommé ainsi que le supposaient ces mêmes parieurs.
Il est encore un peu tôt pour savoir qui se désistera pour
qui (les deux éliminés étant Yves Jégo et Jean-Christophe Fromantin qui ne
nourrissent guère de grande sympathie pour les deux finalistes) et qui saura
créer une dynamique autour de son nom, sachant qu’Hervé Morin y est
relativement bien parvenu lors de ce premier tour.
Mais l’on peut déjà faire deux constatations et comparer les
deux candidats finalistes.
La première constatation est que la présidence de l’UDI
reviendra à un centriste «historique», ceux que fustigeaient Chantal Jouanno,
la colistière d’Yves Jégo au premier tour.
Et c’est déjà un petit événement si l’on se rappelle que
l’UDI a été créée par Jean-Louis Borloo qui ne se définissait pas comme
centriste mais comme républicain social.
Les centristes vont donc récupérer le leadership de cette
confédération où se mélangent centristes, centristes de centre-droit et droitistes
de droite-modérée, un peu comme ce fut le cas au début de l’UDF.
Et l’on peut dire que c’est une petite revanche pour ceux
qui avaient rejoint Jean-Louis Borloo, contraints et forcés pour ne pas
disparaître après les échecs cuisants des élections, présidentielle et
législatives, de 2012.
A eux de saisir leur chance pour imposer leur vision
centriste et faire grandir l’UDI.
La deuxième constatation est que la présence de
Jean-Christophe Lagarde et d’Hervé Morin au second tour recèle nombre de dangers
pour la cohésion de la formation centriste, voire un risque d’implosion,
tellement les deux hommes se méfient l’un de l’autre (et malgré un pacte de
non-agression durant la campagne).
La proximité de leur résultat du premier tour (35,9% pour
Lagarde et 31,5% pour Morin) annonce peut-être une proximité lors du deuxième
tour.
Si c’est le cas, le perdant aura certainement beaucoup de
mal à se ranger derrière le vainqueur.
Seule une victoire nette, voire écrasante, fera en sorte que
le vainqueur ne soit pas contesté.
Quant aux différences entre les deux hommes, elles ne sont
pas extrêmes mais elles existent.
Jean-Christophe Lagarde se veut un centro-centriste même
s’il penche un peu à droite alors qu’Hervé Morin se revendique du centre-droit.
- Hervé Morin représente l’option centre-droit de l’UDI.
Il est un défenseur de l’«alliance naturelle» avec l’UMP
comme l’a d’ailleurs fait pendant cinq ans (entre 2007 et 2012) de gouvernement
le Nouveau centre qu’il dirige.
Il veut un Centre, certes indépendant, mais pré-positionné à
droite quoi qu’il arrive, ce qui fut d’ailleurs le motif de sa rupture
officielle avec François Bayrou après la présidentielle de 2007.
Sa vision économique et sociale est très libérale.
Il n’est pas un supporter intransigeant d’une candidature du
Centre à la présidentielle de 2017, restant ouvert à la possibilité d’une
primaire UMP-UDI.
S’il devient président de l’UDI, il devra d’abord rassurer
toutes les autres formations de la confédération de son consensualisme et de sa
capacité à les rassembler autour d’un projet commun alors même qu’il n’a pu
éviter la scission au Nouveau centre (et que les sécessionnistes font partie de
l’UDI…).
Ensuite, pour réussir en tant que président de l’UDI, il
devra démontrer aux Français qu’il y a un nouveau Morin, un homme avec plus de
personnalité qu’il n’en a montré lors de son passage au ministère de Défense et
plus de charisme qu’il n’en a montré lors de sa campagne présidentielle de 2012
complètement ratée.
- Jean-Christophe Lagarde représente, avec toutes les
précautions nécessaires, l’option centre de l’UDI.
Il s’est positionné pour une UDI totalement indépendante de
l’UMP et, qui plus est, qui doit se confronter avec cette dernière en défendant
un programme centriste pour en ressortir vainqueur.
Il veut absolument un candidat du Centre à l’élection
présidentielle de 2017.
Son projet politique est à la fois libéral économiquement
parlant et teinté de solidarisme, socialement parlant.
S’il devient président de l’UDI, ce sera un véritable
challenge pour lui qui n’a été, jusqu’à présent, qu’un éternel espoir de la
politique.
A 46 ans, il peut, s’il en a les capacités, insuffler une
dynamique politique à la formation centriste et imposer un nouveau visage qui
pourrait être celui du renouveau.
Mais, pour cela, il devra améliorer ses sorties médiatiques,
à la fois sur la forme et sur le fond.
Quoi qu’il en soit, le duel de ce deuxième tour devrait être
un révélateur de ce qu’est l’UDI aujourd’hui, ce que personne ne sait
exactement, même pas les deux finalistes...
Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC