Yves Jégo a peu de chances de remporter l’élection à la
présidence de l’UDI et il le sait.
Alors, pour mettre un maximum de chances de son côté, il a
toujours laissé entendre, dans une sorte de message subliminal, qu’il gardait
la maison centristes en attendant le retour de son enfant prodigue, Jean-Louis
Borloo.
Ce dernier, créateur et ancien président de l’UDI, a
toujours expliqué qu’il avait mis un terme à sa carrière politique et ses
«proches» affirment aujourd’hui qu’il n’a pas changé d’avis sauf si… on
l’appelait directement à de hautes responsabilités, du genre Nicolas: «Cher Jean-Louis
veux-tu être mon premier ministre?».
Mais ce scénario n’est sans doute pas pour tout de suite.
De son côté, Yves Jégo a relancé le débat d’une reprise en
main de l’UDI par Borloo en affirmant aux militants du parti centriste dans un
courrier qu’il fallait «organiser l'UDI pour que son seul leader présidentiable
actuel, Jean-Louis Borloo, puisse, le jour où il l'aura décidé et selon les
modalités qui seront les siennes, à nouveau s'exprimer sur la scène politique
et porter nos couleurs».
Rappelons qu’à l’UDI, beaucoup souhaiterait que le candidat
à l’Elysée ne soit pas, en même temps, président du parti.
Jégo parle donc de faire une alliance avec Borloo, au
premier la parti, au second la présidentielle.
Alors, s’agit-il d’une intox de Jégo (et de sa colistière,
Jouanno) pour se présenter comme le seul candidat légitime, lui qui semble être,
sur le papier, le seul qui ne l’est pas du fait de sa provenance directe de
l’UMP, via le Parti radical, et son ancienne dévotion à Sarkozy?
C’est possible.
Toujours est-il que dans ces lignes, nous avons souvent
prétendu que la carrière politique de Jean-Louis Borloo n’était pas forcément
terminée et qu’il se voyait bien en sauveur d’une l’UDI qui serait menacée
d’implosion à la suite de l’élection du nouveau président du parti.
Il se présenterait alors en sauveur du Centre (une nouvelle
fois) et, cerise sur le gâteau, il deviendrait, ce qu’il a toujours souhaité
être sans y parvenir, le leader indiscutable et indiscuté de l’UDI, pouvant la
réformer en un parti centralisé et en marginalisant définitivement tous ses
concurrents.
C’est en imaginant ce scénario, d’ailleurs, que les deux
frères ennemis, Jean-Christophe Lagarde et Hervé Morin, ont enterré la hache de
guerre et ont affirmé que quel que soit le gagnant de l’élection (Lagarde ou
Morin), aucun des deux n’aurait de difficultés à travailler avec lui et que le
parti ne serait nullement en danger de mort.
Mais, il se peut également, en connaissant Jean-Louis Borloo
et son caractère, que ce dernier ne veuille surtout pas revenir en tant que
président d’une confédération de partis ingérables (la confédération et les
partis qui la compose).
Il s’agit même pour de nombreux membres de l’UDI, de la
raison principale qui explique son départ.
Dès lors, le possible appel de Sarkozy serait l’élément
déclencheur d’un retour.
Sauf que, pour l’instant, l’ancien président de la
république a choisi de revenir dans l’arène politique par la droite.
Reste que personne ne doute qu’il enverra des signaux à tous
les centristes susceptibles de le rejoindre et dont Jean-Louis Borloo fait partie,
même s’il n’a pris aucun engagement encore vis-à-vis de Nicolas Sarkozy.
Pour autant, l’alliance Alain Juppé-François Bayrou (dont
l’acrimonie pour Sarkozy n’a semble-t-il pas changé), impose à Nicolas Sarkozy,
dans l’optique des primaires de l’UMP pour la présidentielle de 2017, de
trouver un poids lourd centriste qui fasse le pendant.
Or, actuellement, il n’y a que Jean-Louis Borloo dans les
rayons (Valéry Giscard d’Estaing ou Simone Veil sont trop âgés).
Si ce scénario, déjà évoqué dans la presse, du ticket
Juppé-Bayrou contre le ticket Sarkozy-Borloo voit le jour, cela se fera
évidemment au détriment du Centre, de ses idées et de son indépendance.
Cela voudrait dire, également, qu’il n’y aurait pas de
candidat des partis centristes en 2017.
Or, seules les formations qui ne comptent pas dans la vie
politique sont dans ce cas de figure.
C’est sans doute pourquoi l’avenir du Centre et du
Centrisme, surtout des partis centristes, se trouve dans la nouvelle génération
même si son émancipation de l’ancienne garde est un douloureux chemin de croix.
Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC
Jean-Louis Pommery
Directeur des études du CREC