Le Centrisme en tant que pensée influencée par le
personnalisme est pour une Europe fédérale qui réunisse, non pas, des peuples
ou des communautés, mais des individus et, in fine, des personnes, des
Européens à part entière, dotés de droits et de devoirs européens.
Cela ne signifie pas que ces personnes doivent abandonner
leurs spécificités librement choisies dans les sociétés dans lesquelles elles
vivent mais simplement que le but ultime de la construction européenne pour le
Centre, c’est bien le citoyen européen, personne libre, égale, solidaire,
tolérante, respectueuse et dont on respecte l’individualité (les fameuses «différences»).
Et c’est seulement cette Europe là qui a des chances
d’émerger dans l’avenir et non celle, poussiéreuse, que la plupart des partis
dans les vingt-sept pays de l’Union européenne essaient de nous vendre ou de
nous en dégoûter, cette Europe, à la fois, bureaucratique et faite de peuples
qui, au fur et à mesure que le temps passent, sont de moins en moins enclin à
s’unir parce qu’ils ne perçoivent pas ou plus l’importance de cette identité
européenne qui, malgré les divisions du vieux continent, à une réalité forte et
qui fait que nous avons tous le même avenir commun, que nous soyons unis ou
non, d’ailleurs.
Car, avec cette montée de l’individualisme (qui n’est pas
une tare, ce qui n’est pas le cas de celle de l’autonomisation irresponsable de
l’individu) dans toutes les sociétés démocratiques, c’est bien à une Europe
régénérée, qui parle à chacun, que chacun peut s’approprier et dans lequel il
peut retrouver son rêve qu’il faut tendre désormais.
Il faudrait enfin que les dirigeants comprennent que la
grille de lecture sur l’Europe a changé. Que comme tout, le rêve européen a
évolué et qu’il faut le réformer pour qu’il devienne le rêve de chaque
européen.
C’est d’ailleurs la seule manière de faire en sorte que
chacun d’entre nous se sente réellement concerné par l’Europe.
En faisant partie d’un peuple distinct des vingt-six autres,
le tout chapeauté par une bureaucratie où ne règne ni la transparence, ni le
souffle démocratique, il est quasiment impossible pour un citoyen de l’Union
européenne de s’identifier à cette construction branlante et si loin d’avoir une
âme quelconque, au grand dam des plus pro-européens d’entre nous.
Bien entendu, tout ne peut pas se régler demain mais le
tournant doit être pris au plus vite si l’on veut qu’il y ait encore une chance
que l’Union européenne ne devienne pas un cartel de pays qui ne défendra qu’a
minima un ensemble européen que quand tous les pays qui le composent seront
entièrement d’accord et pour des questions dont le citoyen européen demeurera
exclu.
Certains souhaitent cette évolution qui remettrait en cause
la raison même pour laquelle on a fait l’Europe après une guerre mondiale au 50
millions de morts dont les Européens sont entièrement responsables, tout comme
ils l’étaient de la précédente qui fit près de 15 millions de morts.
Evidemment, cette Europe est à construire.
Dès lors, le 25 mai, la question n’est pas de voter pour la
vieille Union européenne mais bien pour celle de demain.
Voilà qui n’est guère facile puisque l’on continue à nous
vendre la vieille.
Toujours est-il qu’il ne faut pas tourner le dos à tous ceux
qui veulent faire avancer la construction européenne.
Et au premier rang desquels se trouvent les centristes.
Bien sûr, si l’on lit avec attention les 65
propositions de l’Alternative pour l’Europe (UDI+Mouvement démocrate), on est
un peu déçu d’y voir un mélange assez étrange de bonnes intentions, de souhaits
incantatoires et de mesures concrètes, une sorte de condensé de le vieille Union
européenne dans un programme électoral où le salut passe essentiellement par
les Etats-membres ou les fonctionnaires de Bruxelles…
Celui-ci, en outre, balance constamment entre utopie et
réalité, renforcement fédéral et union étatique, laisser-faire et keynésianisme
dont on ne comprend pas comment tout cela peut s’articuler harmonieusement.
En outre, si dans le chapitre consacré à «l’’Europe du
contrat social et fiscal» on retrouve les thèmes chers aux centristes, il n’en
est pas exactement de même dans le chapitre sur «l’Europe de la croissance et
de l’emploi» où est clairement énoncé un volontarisme étatique et une approche
keynésienne, le tout dans un patriotisme non seulement européen mais français
qui n’est peut-être pas le plus sûr moyen de libérer les énergies
entrepreneuriales.
Il n’est guère surprenant, dès lors, de constater qu’il n’y
a pas de vision commune entre les différentes mouvances centristes européennes
réunies dans l’Alde (Alliance des libéraux et des démocrates pour l’Europe),
sachant qu’en plus, une partie de l’Alternative y est adhérente (le Mouvement
démocrate) et l’autre (UDI), non…
Pour autant, le programme de l’Alternative reste européen
pour l’essentiel et tous ceux qui veulent s’atteler à la création d’une Europe
des personnes peuvent s’y reconnaître en partie et mettre un bulletin de vote
pour ses listes dans l’urne le 25 mai.
Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC
Jean-Louis Pommery
Directeur des études du CREC