Les chiffres sont là, les listes de l’Alternative,
regroupant l’UDI et le Mouvement démocrate sont aux alentours de 10% des
intentions de vote dans les sondages mais ne parviennent pas à créer une
dynamique.
Et la voix des centristes dans le débat européen, malgré
leur mobilisation et leur disponibilité médiatique, ne porte guère.
Bien sûr, en se présentant comme les plus pro-européens au
moment où l’euroscepticisme n’a jamais été aussi fort, les partis centristes
prennent un risque de n’être pas compris, de n’être pas entendus, pire, d’être
rejetés.
Néanmoins, expliquer ces faibles intentions de vote aussi
peu encourageantes par un refus d’Europe de la part des Français est trop court.
Même si l’Union européenne est de plus en plus vue comme un
problème et non une solution, il n’en reste pas moins vrai que tous les
sondages donnent encore une majorité en faveur de l’idée et de la construction
européennes auxquelles tente de s’associer et de s’identifier complètement
l’Alternative.
Le scrutin n’a pas encore eu lieu et il se peut qu’il y ait
une petite progression des listes centristes par rapport aux sondages actuels
avant le 25 mai.
Pour autant, il semble difficile qu’un score de plus de 15%
soit atteignable ce qui, malgré les dires des leaders de l’UDI et du MoDem (qui
affirment qu’ils seront satisfaits avec un score à deux chiffres, une absence d’ambition
suspecte…), sera une déception, voire une défaite.
Une des raisons tient certainement à ce que les partis
centristes ne parviennent pas à être crédibles sur la scène politique
nationale.
Il y a bien eu les municipales avec de bons résultats mais
ceux-ci, sans être quand même exceptionnels, ont une signification nationale
limitée et, surtout, les centristes faisaient alors alliance dans la très
grande majorité des cas avec d’autres, principalement l’UMP.
L’élection européenne permet, puisqu’elle se déroule à la
proportionnelle, de jauger l’importance de chaque parti et ce malgré
l’abstention qui y est forte généralement et qui pourrait encore battre des
records cette année.
De même, si elle peut être un défouloir puisqu’«elle ne
porte pas à conséquence», comme on dit, au vu des pouvoirs limités du Parlement
européen, elle est une photographie pas aussi infidèle que cela du paysage
politique à un moment donné
Ainsi, cette année, elle risque de consacrer la montée de
l’extrême-droite avec un score élevé du FN, une bonne tenue de l’UMP et une
forte baisse du PS, tous ces phénomènes étant indépendants de l’élection
européenne elle-même.
Dès lors, un Centre à 10% sera donc, en gros, ce que
celui-ci représente actuellement en France. C’est-à-dire pas beaucoup plus
qu’en 2012 pour les présidentielles où son résultat avait été considéré comme
une lourde défaite et qui a initié, dans la foulée, le regroupement du
centre-droit sous la bannière de l’UDI créée par Jean-Louis Borloo puis la mise
sur pied de l’Alternative, associant cette même UDI et le Mouvement démocrate.
Les résultats, s’ils sont proches de ce que disent les
sondages, signifieront que les partis centristes n’ont pas réussi leur coup
alors qu’ils avaient deux ans pour s’y préparer depuis la présidentielle et la
création de l’UDI (d’ailleurs, ils demandaient, lors de leur regroupement, à
être jugés sur les résultats de ces européennes).
Plus fondamentalement, cela signifiera que l’espace
centriste est toujours très fragile et que sa refondation prendra plus de
temps.
Mais cela pourrait aussi signifier, comme l’ont montré
certaines enquêtes, que les centristes demeurent très divisés sur leur
positionnement, tant au niveau de leurs dirigeants que de celui de leurs
militants ou de leurs sympathisants.
L’arrivée de Manuel Valls à Matignon en a été le révélateur.
En tout cas, si échec il devait y avoir le 25 mai, il est
fort probable que des mises au point se feront rapidement.
Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC
Jean-Louis Pommery
Directeur des études du CREC