Le président par intérim de l’UDI, Yves Jégo, interrogé par
Le Monde, estime que «si Manuel Valls a le courage d’engager clairement et
rapidement les réformes nécessaires, nous devons avoir le courage de les
soutenir».
De même, il déclare que les membres de son parti s’étaient
«interrogés» sur un vote de confiance au nouveau gouvernement et que «nous
avons décidé de voter contre car, trop longtemps, le Centre a été qualifié de
girouette», ajoutant immédiatement «Nous sommes le centre-droit, nous sommes
dans l’opposition, il ne doit pas y avoir d’ambiguïté».
Vite dit puisque ses propos en contiennent et parce que
trois députés UDI et un député Mouvement démocrate se sont abstenus lors du
vote de confiance à l’Assemblée nationale, souhaitant sans doute donner une
chance à Manuel Valls alors que, pendant le même temps, Jean-Christophe Lagarde
et Hervé Morin, les deux ennemis intimes de l’UDI et sans doute prochains
candidats à la présidence du parti, ruaient dans les brancards du nouveau
premier ministre et de son équipe avec une rare violence.
Tout cela traduit chez les centristes un certain trouble que
représente l’«inconnue Valls» dans la nouvelle équation politique du pays.
Voilà un social-libéral très proche des positions des
libéraux-sociaux que sont les centristes et qui se propose, globalement, de
faire une bonne partie de leur politique.
Bien sûr, Manuel Valls sera jugé à ses actes et à sa
capacité à s’émanciper de la chape de plomb que fait peser sur le Parti socialiste
les idéologues qui sont encore en nombre dans ses rangs, sans oublier les
pressions inamicales qui viendront de la gauche radicale et de l’extrême-gauche,
sans oublier des syndicats politisés (comme la CGT) et corporatistes (comme FO).
Néanmoins, on voit nettement plus de cohérence entre le
programme de Valls et les mesures défendues par l’UDI qu’entre ces dernières et
les positionnements de la droite dure de l’UMP.
De même, personne ne peut penser une seule seconde que
François Bayrou – étrangement discret sur son opinion à l’égard du nouveau
gouvernement –, s’il était de bonne foi de son soutien à François Hollande en
avril 2012 jusqu’à la constitution de l’Alternative en novembre 2013, ne soit
pas proche d’un Manuel Valls à Matignon et d’un Jean-Pierre Jouyet (nouveau
secrétaire général de la présidence de la république) à l’Elysée, deux
disciples de deux hommes qu’admire le président du Mouvement démocrate, Michel
Rocard et Jacques Delors.
Le ralliement de la galaxie centriste, pour autant, était
politiquement impossible en ce mois d’avril 2014.
D’une part parce que l’UDI et l’Alternative (regroupant l’UDI
et le Mouvement démocrate) se sont bâtis sur une alliance exclusive à droite et
que celle-ci a permis aux formations centristes de se refaire une santé aux
élections municipales.
D’autre part parce que les velléités de certains de soutenir
Valls auraient certainement conduit au jour d’aujourd’hui l’espace centriste à
une dislocation, d’autant plus avec le retrait de la vie politique concomitant
de Jean-Louis Borloo.
Mais si le gouvernement commence à obtenir des résultats, si
la confiance des Français envers le premier ministre continue (55% ont été
convaincus pas son discours de politique générale et 62% se disent satisfaits
de lui), alors l’«inconnue Valls» pourrait devenir un véritable casse-tête pour
les centristes et leur cohésion.
Nous n’en sommes pas encore là.
Mais nous ne sommes déjà plus politiquement parlant où nous en
étions avant les municipales.