«No future», le slogan le plus célèbre du mouvement punk, né
dans les années 1970, est-il en train de se confirmer pour cette jeunesse du
XXI° siècle de plus en plus marginalisée dans les sociétés occidentales et où,
en France, elle ne n’aperçoit plus d’avenir avec un taux de chômage record et
un manque flagrant d’intégration de la part de la société qui semble avoir
baissé les bras face à son incapacité à offrir de l’espoir à ses enfants.
Ainsi, au lieu de faire les gros titres pour ses succès et
son dynamisme, la jeunesse française les fait pour son désœuvrement, pour son
renoncement, pour sa violence ou pour son exil à l’étranger en quête d’une vie
meilleure.
Prenons l’exemple de cette fameuse violence que l’on
reproche aux jeunes. A chaque élection nationale, on ne parle que de cela et on
fait évidemment de la répression un argument électoral.
Mais si, aujourd’hui, le mal être de la jeunesse s’exprime
parfois de façon violente, n’est-ce pas aussi parce que la société a failli
dans la tâche d’accueillir les enfants puis les adolescents en de leur permettre
de grandir et développer leurs personnalités et leurs capacités dans un
environnement sain sûr.
La simple énonciation de cette question fait bondir les
tenants du tout répressif (surtout lorsque les échéances électorales se rapprochent…).
Pourtant, elle se doit d’être posée et mérite, c’est là l’essentiel, que l’on y
réponde concrètement, non pas en multipliant les centres d’éducation fermés et
les déclarations fracassantes et anxiogènes mais en ouvrant grand les portes du
futur à la jeunesse.
En incitant, à tous ceux ricanent à ces propos en mettant en
avant cette soi-disant violence endémique qui ne cesse de progresser, à rouvrir
leurs livres d’histoire pour y lire ce qu’était la violence des jeunes il y a
juste quelques décennies où l’on parlait des méfaits des loubards, des voyous et
autres blousons noirs tout en se rappelant qu’il y a à peine cent ans, il
n’était pas du tout raisonnable d’aller se promener à la tombée de la nuit
au-delà des «barrières» qui délimitait Paris de sa proche banlieue pour ne pas
tomber sur des bandes de jeunes malfamées…
Ce qui n’est évidemment pas une excuse pour les violences et
les incivilités d’aujourd’hui mais il est important de ne pas utiliser un
discours hystérique et stigmatisant qui ne produit rien de bon et divise sur
une question aussi essentielle du devenir de notre jeunesse.
Les partis centristes qui se réclament du Centrisme, qui est
un humanisme intégral, devrait s’en saisir prioritairement et y donner une
réponse forte, adéquate à l’enjeu et au défi qu’elle représente. Car c’est à
l’accueil et à la place faite aux enfants et aux adolescents que l’on juge une
société.
Cela ne veut pas dire qu’il faille faire preuve d’angélisme
et d’excuser tous les actes délictueux des jeunes à cause de ce «no future» tout
en accusant uniquement une société qui serait responsable de tout et n’importe
quoi.
Néanmoins, se défausser de nos manquements évidents en la
matière sur cette jeunesse soi-disant incontrôlable et dangereuse pour la paix
civile et sociale est tout autant irresponsable et permet en présentant
quelques mesures chocs de faire croire que l’on s’attaque au problème et que
l’on va tout régler d’un coup de baguette magique alors que l’on ne fait que
l’aggraver avec de la poudre de perlimpinpin.
Il n’est pas dans ce propos de vouloir récupérer la révolte
de la jeunesse ce qui serait, à la fois, stupide et démagogique. Celle-ci a
toujours existé et il est bon qu’elle continue à exister parce qu’elle remet en
cause de manière salutaire un ordre établi en le faisant souvent progresser
positivement.
En revanche, la société doit donner toute sa place à la
jeunesse, à ses capacités, à ses idées et faire en sorte que les jeunes se
sentent impliqués dans un projet global et non pas rejetés à la marge par un
dédain à leur égard, par le fait que celle-ci n’est pas capable de leur trouver
un emploi et par la crainte rampante de leur révolte possible avec un remake brutal
et sanguinaire de Mai 68.
Et le Centre doit ainsi être à l’avant-garde de cette
intégration et non d’une récupération en élaborant un plan national pour les jeunes
qui doit être d’une priorité absolue dans toute action d’un gouvernement
responsable.
Les partis centristes doivent aussi incorporer dans leurs
rangs le plus de jeunes possibles.
Le dire est chose facile, le réaliser est beaucoup plus compliqué
puisque l’on sait que le désir d’absolu et de refaire le monde de la jeunesse
la porte le plus souvent à endosser des idéologies extrêmes voire extrémistes
plutôt qu’à se tourner vers une vision centriste.
Il faut ainsi leur démontrer que le romantisme de la
révolution est un mensonge criminel, une chimère qui ne produit rien de positif
et est un fossoyeur de leurs bonnes idées et de leurs bonnes volontés.
En revanche, le réformisme permanent que prône le Centrisme
permet à ceux qui veulent vraiment s’investir pour améliorer de manière
significative le monde, qui souhaitent se battre concrètement pour un humanisme
respectueux et cette liberté chérie dans la différence qui donne un sens à
chaque existence, de trouver de quoi contenter leurs désirs et stimuler leurs
forces vives.
En retour, il faut évidemment que la jeunesse se pense
respectée, prise au sérieux et que ses rêves d’un monde meilleur ne se
fracassent plus sur le cynisme et le manque de convictions de ceux qui nous
gouvernent.
Le pire c’est de lui montrer que tout ce qu’elle propose
finira dans les poubelles et les oubliettes de nos propres renoncements.
Nous avons toujours à la bouche le fait que nous bâtissons
l’avenir pour nos enfants, que rien n’est plus important que de leur offrir un monde
meilleur et que nous sommes prêts à tout sacrifier pour eux.
Malheureusement, ce discours est souvent creux parce que
rien de concret ne vient l’étayer.
Dès lors, nous ne devons pas nous étonner que la jeunesse
ressente une profonde désillusion et une grande méfiance vis-à-vis de ses aînés
qui prodiguent des bons conseils que bizarrement ils ne s’appliquent pas
eux-mêmes et qui ont une propension à faire la morale sans jamais se regarder
dans la glace.
Sans cette implication de la jeunesse dans le projet de la
société, non seulement nous nous coupons de la force la plus vive de la
communauté mais nous l’enfermons dans un ghetto où s’évapore ses espérances
présentes et futures.
Ne nous étonnons pas ensuite des réactions violentes de
certains, de l’exil d’autres, d’une ambiance de défiance largement répandue
mais surtout de ce sentiment d’être abandonné qui est, plus que tout,
destructeur pour les jeunes et leur avenir mais aussi pour celui de toute la
communauté.