C’était prévisible, le battu aux élections de la présidence
de l’UDI ne digère pas sa défaite qu’il affirme être une «victoire morale».
Deux semaines après les résultats, le député de l’Eure et
président du Nouveau centre continue à douter de la sincérité du scrutin
affirmant même, sans en donner les preuves, qu’il est arrivé en tête dans tous
les départements sauf en Seine-Saint-Denis qui est celui de Jean-Christophe
Lagarde, le vainqueur et désormais président de l’UDI où il estime que des
pratiques douteuses se sont déroulées avant et pendant des élections menées par
son concurrent.
Et d’appuyer ses dires en citant les enquêtes de la presse
sur les comportements suspects de Lagarde, en oubliant de préciser que
certaines ont pu avoir lieu grâce aux confidences de ses amis aux journalistes.
Le portrait que consacre le quotidien Libération au nouveau
président de l’UDI en est une preuve parmi d’autres.
Toujours est-il qu’Hervé Morin déclare dans tous les médias
qu’il est toujours dans l’UDI et qu’il a tourné la page.
En revanche, quelle va être sa stratégie et son
positionnement à l’intérieur de la confédération centriste et pour quel but?
La première indication est qu’il sera un opposant déterminé
à Jean-Christophe Lagarde – ce qui était hautement prévisible – en se parant
d’une moralité politique que son adversaire ne possèderait pas et dont il a
fait son porte-étendard avant même les résultats du second tour.
La deuxième est venue de ses déclarations à Sud radio sur sa
volonté de créer une «majorité d’idées larges» avec François Bayrou et Alain
Juppé pour contrer Nicolas Sarkozy en 2017 mais aussi pour marginaliser
Jean-Christophe Lagarde qui milite depuis longtemps pour une candidature
indépendante de l’UDI au premier tour de la présidentielle.
Quel est donc son but?
Il est sans doute trop tôt, même pour Hervé Morin, pour
savoir où le mènera exactement cette stratégie et ce positionnement mais ce qui
est sûr c’est qu’il en va de sa survie politique.
Dénier ainsi à Jean-Christophe Lagarde la légitimité au
moins morale d’être le président incontesté de l’UDI est une manière de le
fragiliser en instillant un doute afin de miner son assise et de l’empêcher de
prendre une dimension politique nationale à son détriment.
C’est, bien sûr, en conséquence, parier sur l’échec de la
présidence Lagarde et de se mettre en réserve du parti, prêt à être le recours
au cas où.
En ayant obtenu près de 47% des suffrages, Hervé Morin n’a
pas été écrasé, loin de là, et peut s’appuyer sur ce résultat pour être
l’opposant légitime numéro un de l’intérieur à Jean-Christophe Lagarde.
Pour autant, il prend un risque pour lui et, surtout, pour
l’UDI.
Le risque pour lui est d’apparaître comme le mauvais perdant
qui ne conteste que la place prise par son adversaire sans donner un contenu
politique suffisant à cette opposition.
Ainsi, s’il continue ses accusations sur des actes douteux
de Lagarde, il faudra bien qu’il apporte à un moment ou à un autre les preuves
à ses dires afin de ne pas se décrédibiliser.
Néanmoins, ses déclarations sur une alliance avec Bayrou et
Juppé mais aussi ses propos durant la campagne pour la présidence du parti sur
sa vision d’un libéralisme totalement assumé sont là pour donner du fond à son
opposition.
Le risque qu’il fait courir à l’UDI est, bien entendu, de
fragiliser cette confédération en l’empêchant de devenir une force politique
majeure.
Si cela se produisait, Hervé Morin pourrait évidemment en
pâtir par effet boomerang.
Mais il faut se rappeler qu’il n’a pas intégré l’UDI de
gaieté de cœur et qu’il lui reste la présidence du Nouveau centre pour peser et
exister politiquement.
Et il pourrait se servir de ce dernier pour se rapprocher de
Bayrou et Juppé si l’occasion se présente.
Sans aller jusque là, au moins pour l’instant, il lui faut
apparaître unitaire – ne pas remettre en cause l’existence de l’UDI – et un
homme libre – ne pas disparaître des écrans radars médiatiques – pour avoir un
avenir politique à court terme.
Le clash entre les deux personnalités pourraient avoir lieu
en 2016 ou même plus tôt sur une candidature UDI à la présidentielle qu’Hervé
Morin pourrait dénoncer comme de l’aventurisme irresponsable de la part de
Jean-Christophe Lagarde si celui-ci se présentait comme il en a envie.
Ironie de l’histoire, c’est justement en reprochant cet
aventurisme irresponsable de Morin en 2012 lors de sa candidature à la
présidentielle que Lagarde avait provoqué un clash et était parti créer sa
Force européenne démocrate qui est ensuite devenue une des composantes
fondatrices de l’UDI…
Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC
Jean-Louis Pommery
Directeur des études du CREC
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