C’est peu dire que les centristes sont actuellement
courtisés à droite et à gauche alors que, paradoxe, c’est un des moments de
leur histoire où ils sont les plus faibles en termes de force politique.
Dès lors, il faut se demander si dans les déclarations
venues tant de la droite que de la gauche il n’y a pas une volonté de les
instrumentaliser ou s’ils sont vraiment considérés comme de possibles
partenaires égaux afin de bâtir une majorité nouvelle pour 2017.
Quand Alain Juppé estime que la Droite ne peut gagner sans
le Centre la prochaine présidentielle, cela signifie, selon lui, que l’UMP doit
absolument s’allier avec l’UDI et le Mouvement démocrate pour remporter
l’élection.
Mais cela ne signifie par forcément qu’il souhaite en faire des
associés à égalité.
De même lorsque de Manuel Valls déclare qu’il veut ouvrir sa
majorité au centre, cela signifie, selon lui, que le PS a besoin de l’UDI et du
Mouvement démocrate pour effectuer sa mue afin de pouvoir poursuivre la
politique entreprise depuis le début de l’année et d’avoir une chance de rester
au pouvoir en 2017.
Mais cela ne signifie pas forcément qu’il veut mettre en
place les réformes proposées par les centristes.
Il est certain que le tropisme centriste d’Alain Juppé et
Manuel Valls est réel.
Mais il n’est pas certain qu’ils veuillent d’un projet et
d’un programme centristes, ni même qu’ils soient prêts à s’inspirer d’un tel
projet et d’un tel programme.
En revanche, travailler avec les centristes auraient pour
eux de nombreux avantages.
D’abord, cela leur permettrait d’apparaître aux Français
comme des hommes d’ouverture face aux caciques de leurs partis arcboutés sur
leurs idéologies clientélistes.
Ensuite, cela leur permettrait de se libérer du carcan de
leurs partis respectifs qui ne leur assure pas, loin de là, d’être les
candidats de la Droite (Juppé) et de la Gauche (Valls) pour 2017 (voire 2022
pour Valls).
De plus, cela leur permettrait de récupérer un électorat,
même réduit ces derniers temps, qui ferait la différence au premier ainsi qu’au
second tour de la présidentielle ainsi que de renvoyer les extrêmes dans les
cordes.
Enfin, cela leur permettrait de réformer la France de
manière plus profonde, comme ils prétendent vouloir le faire, les centristes
ayant exprimé leurs vœux depuis longtemps de mettre en route des réformes de
grande ampleur alors que ni l’UMP avant 2012, ni le PS depuis 2012 n’en ont été
capables jusqu’à présent.
Mais qu’auraient à gagner les centristes en s’alliant soit à
Juppé (le plus probable des scénarios), soit à Valls?
Aujourd’hui, on parle beaucoup des centristes parce qu’ils
sont courtisés de toute part.
Il suffirait qu’ils concluent une alliance dès à présent
pour qu’ils retournent dans une sorte d’anonymat peu propice à leur renouveau.
Avant donc de se lancer éventuellement d’un côté ou de
l’autre, leur tâche est de reconstruire un Centre crédible et sûr de lui qui
sera capable de négocier une alliance gagnante-gagnante dans deux ans.
Et là, cette alliance pourrait être un tournant pour un
Centre en reconquête, ses valeurs, ses principes et son projet politique (qu’il
n’a pas encore).
A plus long terme, les partis centristes pourraient devenir
ce cœur du nouvel axe central dont l’émergence semble de plus en plus possible
par les déclarations de Juppé et de Valls.
Néanmoins, les centristes ne doivent pas oublier qu’ils ont
souvent été instrumentalisés par le passé et que, ni Alain Juppé, ni Manuel
Valls ne sont des centristes.
Qu’ont-ils gagné en 2012 en soutenant Sarkozy (Nouveau
centre) ou Hollande (Mouvement démocrate)? Rien.
Et que la meilleure façon de faire gagner le Centre et ses
idées, c’est d’avoir un candidat centriste en capacité de remporter la prochaine
présidentielle.
Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC
Jean-Louis Pommery
Directeur des études du CREC
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