Maintenant que sont passés les deux vrais premiers tests
électoraux que l’UDI attendait avec autant d’impatience que de crainte, quel
est l’avenir de la confédération de centre-droit, à la fois dans l’Alternative,
dans ses relations avec (feue?) l’UMP, dans sa capacité à demeurer unie et à se
structurer en vrai parti centralisé, dans son projet politique, dans sa réponse
à la montée des extrêmes?
Beaucoup de questions auxquelles vont devoir répondre les
responsables de la formation créée puis quittée par Jean-Louis Borloo et en
particulier ceux qui vont se présenter à la présidence du parti dans les mois
qui viennent pour le remplacer et prendre la place occupée actuellement par
l’«intérimaire» Yves Jégo.
Si on analyse les résultats des élections municipales et
ceux des élections européennes, l’UDI n’a pas de quoi pavoiser.
Même si elle a réussi à enlever nombre de villes, elle le
doit en grande partie à son alliance avec l’UMP dès le premier tour, ce qui ne
permet évidemment pas de savoir quel est son poids politique réel lors des
municipales.
Quant à sa présence au Parlement européen, le parti perd
quatre députés et le score de l’Alternative (l’«organisation coopérative» avec
le Mouvement démocrate) est décevant pour des centristes qui espéraient en
secret approcher la barre des 15%, en tout cas, dépasser celle des 12% et qui
n’ont pas réussi à atteindre un score à deux chiffres avec seulement 9,90% des
suffrages exprimés.
D’ailleurs, le seul à avoir postulé officiellement à ce jour
à la présidence du parti, le député-maire de Neuilly-sur-Seine, Jean-Christophe
Fromantin, estime qu’il est surprenant de dire que «c'est formidable d'avoir
fait 9% aux élections européennes alors que nous perdons des sièges».
Ceux qui estiment dans les médias que tout s’est bien passé
lors de la campagne européenne avec le Mouvement démocrate sont démentis par
les multiples prises de parole et de position critiques de leaders du parti,
comme celle du vice-président François Sauvadet qui n’a même pas voté pour
l’Alternative au motif que la tête de liste dans sa région était MoDem ou celle
de la vice-présidente Rama Yade (et candidate à la président du Parti radical)
qui vient de déclarer qu’elle n’était pas «satisfaite de la tournure qu'a prise
l'alliance entre l'UDI et le Modem. C'est l'UDI qui a tendu la main au Modem
quand celui-ci était au plus mal et le Modem a exercé une sorte de chantage
pour la constitution des listes ce qui fait que l'UDI est passée de sept
députés européens à trois».
Le temps de l’explication avec François Bayrou et ses
lieutenants, voulue par le secrétaire général Jean-Christophe Lagarde avant
même les européennes, est donc venu afin de savoir si l’Alternative a un
quelconque avenir.
L’échec de cette dernière serait évidemment un coup dur pour
l’UDI qui a sauvé la carrière politique de François Bayrou et qui n’a rien
obtenu de tangible en retour pour l’instant.
Néanmoins, si cette organisation coopérative devait demeurer
dans le flou programmatique et dans son positionnement politique, ni l’UDI, ni
le Mouvement démocrate n’en sortiraient gagnants.
Rappelons qu’il y a un certain nombre de personnes à l’UDI
qui ne veulent pas entendre parler d’une alliance avec François Bayrou qu’ils
considèrent toujours comme un «traître» (ou un homme qui a voté pour François
Hollande) et qu’il va bien falloir régler ce problème soit par l’abandon de
l’alliance avec le MoDem, soit avec le départ de cette frange contestataire qui
pourrait trouver refuge dans le prochain parti de droite qui devrait succéder à
l’UMP dans les mois qui viennent (ou à une UMP «rénovée»).
Tout ceci pose la question de l’unité de l’UDI.
Celle-ci, il faut encore une fois le rappeler, n’est qu’une
confédération de partis.
Jean-Louis Borloo a bien essayé d’aller vers un parti
centralisé mais il n’a pas réussi dans cette tâche.
Actuellement, il semble impossible que des hommes et des
femmes comme Hervé Morin, Jean-Christophe Lagarde, François Sauvadet, Rama
Yade, Jean-Christophe Fromantin et quelques autres se retrouvent dans le même
parti et abandonnent leurs ambitions et leurs postes dans leurs formations
respectives.
Pour ne prendre qu’un exemple, Hervé Morin continue à peser
politiquement et en particulier à l’intérieur de l’UDI, uniquement parce qu’il
est le président du Nouveau centre, la formation qui a le plus de députés de la
confédération et non parce qu’il a des fonctions à l’intérieur de la
confédération.
En tant que parti de centre-droit revendiqué et dans une
alliance «naturelle» avec la droite affirmée, l’UDI a donc des relations
spécifiques avec l’UMP.
Cette dernière, au-delà de ses graves problèmes actuels, a
toujours regardé l’UDI comme une excroissance d’elle-même qu’elle se ferait
fort de récupérer le moment venu, soit en l’absorbant, soit en la phagocytant
avec cette arme imparable qu’aucun membre de l’UDI ou presque ne peut être élu
à une élection sans le concours de l’UMP.
Bien entendu, les leaders de la formation centriste le
savent mais veulent garder le plus d’indépendance possible tout en sachant que
tous leurs postes électifs ou presque (pas ceux de députés européens…) viennent
de leur alliance électorale avec l’UMP.
De même, la montée du Front national, marquée par sa
victoire aux élections européennes, repose la question de l’unité de la Droite
et du Centre par ceux qui estiment que les centristes sont «naturellement» dans
le camp de la Droite.
Mais aussi par des centristes qui veulent faire barrage à l’extrême-droite
et qui souhaitent être ceux qui éviteront que l’UMP s’allient avec le Front
national ou n’épouse ses thèses pour soi-disant mieux le combattre en lui
offrant une alternative (rappelons tout de même que la création de l’UMP, parti
de la Droite et du Centre, en 2002 était la réponse à la présence de Jean-Marie
Le Pen au deuxième tour de la présidentielle mais que douze ans plus tard le
Front national a remporté les élections européennes avec 24,85% des voix…).
Bien évidemment, tout serait plus facile pour l’UDI si elle
faisait 25% des voix et avait deux cents députés.
C’est le rêve des leaders de la confédération mais ce n’est
pas du tout la réalité actuelle.
Dès lors, en tant que formation «petite» ou «moyenne», tout
dépend de la façon de voir le verre à moitié vide ou à moitié rempli (c’est-à-dire
de savoir ce que représente 30 députés sur 577 à l’Assemblée nationale), elle
doit se positionner face au double-défi de la reconquête du pouvoir (alliance à
droite ou à gauche) et barrage à l’extrême-droite (alliance fusionnelle avec l’UMP),
le tout en se demandant s’il faut continuer le chemin avec le Mouvement
démocrate.
Et les votes à l’Assemblée nationale lors de la discussion
du Pacte de responsabilité présenté par Manuel Valls n’ont pas éclairci les
positions avec ceux qui ont voté pour, ceux qui ont voté contre et ceux qui se
sont abstenus.
Tout cela serait sans doute plus simple si l’UDI avait un
projet politique au lieu d’avoir un gadget avec ce «contre-gouvernement» mis en
place par Jean-Louis Borloo (sur le modèle de celui qu’avait mis en place sans
succès François Bayrou au Mouvement démocrate il y a quelques années) et qui n’intéresse
personne.
Car l’UDI ne sera une vraie formation avec un avenir que
lorsqu’elle aura un positionnement politique clair et un programme cohérent.
En tout cas, les mois qui viennent seront importants pour l’avenir
de l’UDI qui, comme l’UMP, devra se choisir un nouveau président lors d’un
processus qui risque d’être aussi sanglant, à défaut d’être aussi
spectaculaire, que celui du parti de droite…
Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC
Jean-Louis Pommery
Directeur des études du CREC
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