Comme prévu, le démocrate Bill de Blasio a prêté serment ce
1er janvier 2014 pour devenir le 109° maire de New York.
Elu lors du scrutin de novembre dans un fauteuil, il occupe
désormais celui laissé vacant par Michael Bloomberg, le premier magistrat de la
cité pendant douze ans et centriste.
Imaginez que sa victoire a été la plus large remportée par un
candidat qui n’était pas le maire sortant (73% contre 24% à son adversaire
républicain Joe Lhota). Il a même remporté certains districts avec 100% des
voix!
Donc New York s’est réveillée, non pas démocrate ce qu’elle
a toujours été et encore plus depuis que le Parti républicain n’incarne plus
que la droite de l’échiquier politique, mais avec un maire démocrate ce qui,
paradoxe des paradoxes pour une des villes les plus démocrates des Etats-Unis, ne
s’était plus produit depuis 1989!
D’autant que que Bill de Blasio s’est décrit comme un
«liberal» (gauche du Parti démocrate) pendant toute la campagne et a rappelé
son engagement fort pour réduire les inégalités à New York lors de son discours
d’investiture.
D’ailleurs les médias le présentent comme un démocrate de
gauche même s’il est un ancien de l’administration de Bill Clinton et qu’il fut
le directeur de campagne d’Hillary Clinton lorsque celle-ci fut élue sénatrice
de New York au Congrès en 2000.
Il est un peut trop tôt pour savoir s’il sera un maire
«socialiste» ou s’il mettra de l’eau dans son vin, devant le patchwork qu’est
cette ville, le véritable melting-pot américain, mais on peut déjà affirmer
qu’il devra préserver une grande partie de l’héritage centriste de Michael
Bloomberg.
Un héritage controversé par certains démocrates qui n’ont
pas manqué de le critiquer le 1er janvier dans leurs interventions
mais qui a été globalement positif selon les analystes les plus sérieux ainsi
que l’affirme un éditorial du New York Times.
Celui-ci explique «qu’en tout état de cause, quoi qu’il en
soit, New York est en meilleur forme que lorsqu’il est devenu maire. Alors que
le citoyen Bloomberg retourne à sa vie privée et s’occupera de diverses causes
comme celles du contrôle des armes à feu, de la réforme de l’immigration, du
changement climatique et des villes plus saines, nous ne pouvons que lui
souhaiter bonne chance».
Et de rappeler qu’il avait promis de reconstruire et
revitaliser New York et de faire en sorte qu’elle demeure la «capitale du monde
libre».
Au moment où il quitte son poste, pour le quotidien, «dans
de nombreux domaines, il a tenu sa promesse. New York est de nouveau une cité
prospère et attrayante où, M. Bloomberg s’en vante, plus de gens s’y
établissent qu’ils ne la quittent. Plus de 54 millions de touristes, le record,
ont en foulé les rues en 2013. Le taux de criminalité est bas, le système de
transports est plus efficace, l’environnement meilleur. Il laisse un budget en
excédent de 2,4 milliards de dollars».
Sans oublier, qu’au cours de son mandat, Michael Bloomberg,
homme le plus riche de New York (et maire sans salaire puisqu’il n’a accepté
qu’un dollar par an de d’indemnisation pour accomplir sa tâche), a permis à
l’activité économique et financière de repartir après les attentats du 11
septembre 2001 et a fait de sa ville un laboratoire en matière d’environnement
(avec la création de pistes cyclables et de vélos en location, entre autres) et
de santé (interdiction de fumer dans les lieux publics autre que la rue et
bannissement de certaine graisses dans les aliments, entre autres).
Au passif de son action, il y a, bien sûr, le creusement des
inégalités à New York (mais qui est un phénomène national dont Barack Obama a
promis de s’occuper dans les trois dernières années de sa présidence), son
attention toute particulière à Manhattan et Brooklyn au détriment des trois
autres «boroughs», le Queens, Staten Island et le Bronx ainsi que son bilan
mitigé (certains parlent de succès, d’autres d’échec) dans sa réforme du
système scolaire de la ville.
Ce sont d’ailleurs les trois priorités de Bill de Blasio
(les inégalités, l’aménagement des boroughs plus pauvres et le système
éducatif) qui s’est voulu, durant la campagne, un contre-Bloomberg, en
particulier sur la pratique du «stop and frisk» de la police newyorkaise, la
fameuse NYPD, qui permet d’arrêter toute personne que l’on suspecte de détenir
une arme à feu et qui a été largement utilisée pour contrôler les minorités
ethniques (même si certains représentants de ces minorités se sont déclarées en
faveur de cette pratique, remarquant que la délinquance était plus élevée dans
ces groupes ethniques et devaient être donc plus surveillés).
Pour autant, Bill de Blasio ne pourra ignorer les résultats
de Michael Bloomberg et devra même les consolider s’il veut être un maire
efficace et apprécier des newyorkais, capable d’être réélu pour un second
mandat.
Dans cette optique, sa décision de nommer comme chef de la
police («police commissioner») William J Bratton, le père de la politique «zéro
tolérance» en 1994, une véritable révolution qui a permis à la délinquance de
baisser dans des proportions gigantesques sous l’ère de son successeur, Raymond
W Kelly, faisant de New York une des villes les plus sûres du pays, va dans le
bon sens et est une excellente nouvelle.
Laboratoire mondial des nouvelles pratiques, New York est
une ville totalement métissée ce qui en fait la première ville globale du XXI°
siècle. Tout ce qui s’y passe intéresse le reste de la planète.
Et Michael Bloomberg a montré que l’on pouvait très bien la
gouverner avec une vision de juste équilibre. Souhaitons que Bill de Blasio
s’en inspire largement.