Dans la bataille pour la prise de contrôle de l’espace au
centre, force est de reconnaitre que Jean-Louis Borloo vient de gagner la
première bataille.
Plus, il est bien parti pour remporter la victoire finale.
Si un doute subsistait quant au vainqueur de la première
manche, Il suffirait d’écouter les propos confus et contradictoires de François
Bayrou pour s’en convaincre.
Pour lui, sur bien des points, Il s’agit d’un reniement
complet de tout ce qu’il a dit et espéré depuis un an.
Ainsi sa critique de François Hollande semble bien exagérée
à ce qu’il pouvait en dire de bien il y a peu comme s’il devait donner des
gages à ses «anciens nouveaux» amis de l’UDI et parfois à la manière d’un
amoureux éconduit.
A l’opposé, il est désormais capable d’expliquer qu’il est d’accord
à 95% avec Jean-Louis Borloo et qu’entre autres les accords municipaux qui
lient le Mouvement démocrate avec le Parti socialiste dans de nombreuses villes
et pas des moindres ne sont rien d’autre que des exceptions alors qu’il en
faisait encore hier l’emblème de son indépendance avec ceux passés avec l’UMP.
Et ce même s’il continue, timidement, à affirmer que le
Centre se trouve au centre et pas à droite, il s’agit objectivement beaucoup
plus d’un ralliement au positionnement de centre-droit de l’UDI que le contraire.
On voit bien ici dans quelle urgence il se trouve pour ne
pas disparaître de la scène politique.
Sera-ce suffisant et est-il capable de reprendre la main
face à un Jean-Louis Borloo qui vient de marquer un premier point qui risque
d’être décisif.
Non pas que le président de l’UDI soit dans une meilleure
forme politique que celui du Mouvement démocrate.
Sa formation est à la peine jusqu’à présent, manquant
d’unité ainsi que d’identité, incapable de peser dans le débat politique et de
séduire les Français.
Les sondages électoraux donnent les deux partis centristes
très proches et, surtout, très proches de rien du tout…
Seuls les baromètres de popularité donnent des raisons
d’espérer avec les bons scores des deux leaders.
Mais François Bayrou s’est enfermé dans une logique de la
solitude et de la marginalisation, tout à son rêve monomaniaque de devenir
président de la république pendant que Jean-Louis Borloo, lui, faisait le
contraire en s’entourant de tous les autres leaders centristes qui avaient
quitté un à un le président du MoDem à cause principalement de son incapacité à
partager le pouvoir au-delà d’un petit cercle de fidèles et à s’intéresser à l’avenir
du Centre au-delà des présidentielles.
Rien n’est évidemment totalement perdu pour Bayrou mais la
tâche va s’avérer difficile pour lui.
D’abord, il va lui falloir regagner la confiance de ses
«anciens nouveaux» amis qui n’ont pas oublié 2002, 2007 et 2012.
Ensuite, il va devoir redonner une crédibilité à son parti,
en particulier en matière électorale s’il veut peser d’un poids politique
suffisant dans les négociations à venir avec ses partenaires.
Enfin son discours va devoir évoluer en prenant en compte le
positionnement de centre-droit de l’UDI et son tropisme qui penche uniquement à
droite en direction d’une UMP qui a, depuis toujours, représenté selon lui l’ennemi
le plus dangereux, une machine à tuer le Centre.
Jean-Louis Borloo, lui, est dans une situation bien plus
confortable car il n’a absolument rien renié de son entreprise de parti centriste
adossé au parti de droite.
Plus, sa stratégie semble la bonne puisqu’il a obligé Bayrou
à se rapprocher de lui sans aucune contrepartie pour l’instant.
Cela le met dans une position de force afin de revendiquer
la place de chef de la galaxie centriste alors même qu’il ne se définit pas
comme centriste!
Tout ceci, bien sûr, au cas où les rapprochements
Borloo-Bayrou et MoDem-UDI se font dans le dur et non pour la galerie et les
élections de 2014.
Si l’on est réellement dans une logique d’une (ré)union
alors Borloo mène bien par 1-0.
Mais est-ce vraiment balle au Centre?!
Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC
Jean-Louis Pommery
Directeur des études du CREC