Les récentes déclarations de plusieurs responsables
centristes remettent sur le devant de la scène une possible alliance entre
l’UDI de Jean-Louis Borloo et le Mouvement démocrate de François Bayrou.
Il est bien trop tôt pour dire si cela va se concrétiser
d’autant qu’il ne s’agit pas, pour l’instant, de rapprochements programmatiques
ou de projets politiques mais d’une nécessité de faire alliance en vue des
prochains scrutins de 2014, les municipales et les européennes.
Une alliance dictée avant tout par la nécessité de ne pas
être, à nouveau, les grands perdants des consultations populaires.
Car le constat est là, dur et abrupt. Au jour d’aujourd’hui
et sans préjuger d’évolutions futures plus positives, l’UDI et le MoDem sont à
la peine dans les sondages.
Que ce soit pour les européennes (où à eux d’eux, ils font
moins de 15% des intentions de vote ce qui les place, chacun, derrière l’UMP,
le PS, le FN, le Front de gauche et les Verts) ou les municipales (où les listes
autonomes de l’une et de l’autre ont peu d’appétence auprès des électeurs même
dans certains fiefs centristes).
D’où l’idée de s’allier pour éviter le fiasco et peser sur la
vie politique française, voire européenne.
Quoi de plus naturel entre centristes, pourrait-on penser
tout en se félicitant de ce tournant responsable alors que les deux formations
se regardent plutôt en chien de faïence depuis la création de l’UDI l’année
dernière.
Sauf que l’UDI se déclare toujours pour une alliance
exclusive avec l’UMP et que le Mouvement démocrate, lui, navigue à vue à ce
sujet, ayant inventé le concept de l’alliance à la carte, en particulier pour
les municipales.
Ces deux stratégies, qui ressortent de deux positionnements
politiques différents (l’UDI se dit de centre-droit et le MoDem du Centre),
semblent peu à même de se fondre l’une dans l’autre.
Il n’en reste pas moins, cependant, que les passerelles
existent depuis toujours (n’y a-t-il pas un groupe commun entre les deux
formations au Sénat) et que les réalités imposent aux centristes un pragmatisme
en matière d’alliances, d’autant qu’ils partagent, tout de même, des valeurs
identiques et nombre de vues communes.
D’autant que l’alliance exclusive avec l’UMP prônée par
Jean-Louis Borloo est perçue du côté du parti de droite comme un simple
ralliement du petit parti (UDI) au grand (UMP), ce qui signifie que la place
d’égal réclamée par Borloo a peu de chance d’être acceptée par Copé en l’état.
De son côté, Bayrou n’a pu réaliser jusqu’à maintenant son
alliance avec le PS, ce dernier préférant ne pas s’aliéner définitivement le
Front de gauche de Jean-Luc Mélenchon.
Dès lors, il s’est tourné vers ce drôle de concept
d’alliance à la carte pour les municipales où l’on peut faire liste commune
avec l’UMP dans une ville et avec le PS dans l’autre, voire, pourquoi pas, avec
l’UDI dans une troisième…
Mais cette stratégie n’est guère satisfaisante car elle
recèle en elle-même une absence de projet politique crédible et, surtout,
original qui, à terme, fera du MoDem, au mieux une force d’appoint pour qui
saura lui proposer le plus de gratifications.
S’en rendant compte, c’est peut-être la raison pour laquelle,
dans un entretien au Journal du Dimanche, le même Bayrou vient d’affirmer que,
à défaut d’une alliance en bonne et due forme avec le PS, «le plus probable,
c’est que des passerelles se bâtissent entre la droite républicaine et nous».
Une déclaration qui rapproche évidemment le Mouvement
démocrate de l’UDI et ouvre des perspectives d’alliances.
Encore faut-il que l’UDI saisisse ce que Jean-Marie Cavada
(député européen de l’UDI élu grâce à François Bayrou) a appelé la main tendue
ou que demande le Mouvement démocrate à la formation dirigée par Jean-Louis
Borloo.
Il répondait à Marielle de Sarnez, numéro deux du MoDem qui,
pour les municipales, veut «créer les conditions d'un rassemblement plus large
au centre. C'est ce que j'essaie de faire depuis des semaines et des semaines
avec, par exemple, le parti de Jean-Louis Borloo, à Paris. J'aimerais beaucoup
arriver à ce rassemblement du Centre».
Un autre responsable du parti de François Bayrou, Robert
Rochefort, veut, pour les élections européennes, une liste commune avec «nos
cousins de l’UDI».
Reste que cela n’est pour l’instant que des déclarations
d’intentions et que rien de concret, comme l’ouverture officielle de
négociations, n’a été annoncé.
Mais, quoiqu’il arrive, l’essentiel sera de ne pas décevoir
une nouvelle fois l’électorat centriste avec des arrière-pensées politiciennes
et des ambitions uniquement personnelles, voire pour ne sauver quelques sièges
et en grappiller quelques autres.
Ici, on ne fait malheureusement pas de procès d’intention,
on s’appuie simplement sur l’expérience passée…
Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC
Jean-Louis Pommery
Directeur des études du CREC