Lors de sa conférence de presse du 16 mai, François Hollande
a été catégorique: il n’est pas question d’un remaniement ministériel dans les
prochains mois et encore moins d’un élargissement de la majorité. «Avec qui?»
a-t-il ajouté, expliquant qu’il était, en revanche, ouvert à tout ralliement à
sa politique et à sa majorité mais qu’il n’irait pas en chercher une autre.
Fermer le ban et les espoirs, à court terme, de François
Bayrou de constituer un axe gouvernemental PS-MoDem.
Quelques jours auparavant, lors d’un colloque, le directeur
du Cecop (Centre d’études et de connaissance sur l’opinion publique), Jérôme
Jaffré, estimait que l’erreur politique majeure de François Hollande avait été
de ne pas élargir au centre sa majorité dès qu’il a été élu. Ainsi, il aurait
du, selon l’analyste politique, faire entrer le Mouvement démocrate de François
Bayrou dans la majorité présidentielle tout en faisant réélire son leader à
l’Assemblée nationale.
Mal élu, sur une base minoritaire de la gauche (un de ses
scores les plus bas lors des dernières élections) avec l’apport essentiel des
déçus de droite de Sarkozy et d’un fort mouvement de rejet du président sortant,
toutes choses qu’il connaissait, il se devait, afin d’élargir ses soutiens, de
créer avec une partie des centristes une nouvelle majorité présidentielle que
même le Front de gauche (qui n’est pas dans la majorité actuelle) alors aurait
du accepter même en rechignant.
Mais cela ne s’est pas passé ainsi.
Peut-être parce que François Hollande a dans l’idée que ce
rapprochement va se faire petit à petit et qu’il s’imposera à tous dans quelques
temps. Si l’on doit retenir une évidence de sa première année à l’Elysée, c’est
sa capacité à mettre en route des politiques qui font lentement leur chemin, qu’on
les supporte ou qu’on s’y oppose étant une autre question.
Quoiqu’il en soit, à défaut de l’avoir voulue et d’affirmer
la souhaiter, pourra-t-il encore la faire au cours de son quinquennat si la
situation l’exige? C’est évidemment beaucoup plus compliqué avec la gauche de
la gauche du PS quasi en rébellion avec le gouvernement, un Front de gauche qui
a une attitude plus d’opposant radical que de soutien du pouvoir et un Centre
éclaté qui ne pèse pas grand-chose, notamment la partie de celui-ci qui
pourrait être son nouvel allié.
Sans doute que les élections municipales et européennes de
l’année prochaine pourraient débloquer cette situation dans un sens ou dans
l’autre, selon les scores du PS, du MoDem et de l’UDI (sans oublier celui du
Front de gauche).
En revanche, au-delà des postures, des rhétoriques, des
coquetteries et des fiertés personnelles, il existe de nombreuses proximités
programmatiques actuelles entre la gauche modérée et le centre du Centre (par
exemple sur la relance de l’économie, la défense d’un modèle social rénové, la
politique étrangère, l’intégration européenne, la régulation de la finance) qui
peuvent très bien faire l’objet d’un contrat de gouvernement sur ce qui
rapproche plutôt que sur ce qui divise.
Il est évident que cette alliance, pour l’instant hautement
hypothétique, n’aura de chances de voir le jour que si le Parti socialiste n’a
plus d’autre alternative que de faire des appels vers le centre de l’échiquier
politique (en cas de détérioration continue la situation de la France couplée
avec des échecs électoraux) ou si le Mouvement démocrate n’a plus d’autre
alternative que de s’adosser au Parti socialiste sans condition pour ne pas
disparaître (à moins qu’il n’implose alors à ce moment là).
Sans prendre parti ou non pour une solution de ce genre, il
est important ici de répéter ce que tout historien politique et tout
commentateur de la vie publique savent, c’est qu’il n’y a jamais eu d’alliance
«naturelle» pour le Centre au cours de son histoire, que ce soit à droite ou à
gauche.
Si, demain, une partie du Centre décidait de s’allier avec
la Gauche, il ne s’agirait pas d’une quelconque trahison brandie par la Droite
mais bien ce que, en son temps, a fait le MRP lors de la quatrième république,
pour ne pas remonter encore plus loin, ou même ce qu’ont fait les centristes
dans les premiers temps de la V° République sans oublier les ralliements
centristes dans les gouvernements de François Mitterrand.
Pour autant, il existe actuellement des différences fortes
dans certains domaines entre la vision du PS et celle des partis centristes qui
sont un frein à une collaboration entre les deux bords. Celles-ci auraient sans
doute pu être transcendées lors de la victoire de François Hollande dans une
dynamique qui a désormais totalement disparu. Dès lors, les chances d’un accord
sont, pour l’instant, minimes.
Evdemment, nous savons aussi qu’il existe deux règles en
politique qui peuvent tout chambouler. La première est que la vérité
d’aujourd’hui, n’est pas celle de demain. La deuxième est que tout va très vite
dans la sphère politico-médiatique et que le mouvement n’a fait que s’accélérer
cette dernière décennie…